Vu la requête enregistrée au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat le 31 mars 1994, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 26 février 1994 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 janvier 1991 décidant la reconduite à la frontière de Mme Wonje X... épouse Y... ;
2°) de rejeter la requête présentée par le PREFET DE POLICE devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits, de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ...3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Wonje X... épouse Y... s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 7 août 1990, de la décision du PREFET DE POLICE du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3°) de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 lorsque le PREFET DE POLICE a pris l'arrêté du 14 janvier 1991 décidant sa reconduite à la frontière ;
Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que Mme Wonje X... épouse Y..., entrée en France en 1981, est mère de deux enfants résidant en France, issus d'un premier mariage ; que remariée à un ressortissant camerounais titulaire d'une carte de résident, elle a eu de ce second mariage un troisième enfant qui réside en France ainsi que son époux ; que, compte tenu de ces circonstances et eu égard à la durée du séjour en France de l'intéressée, l'arrêté susvisé du PREFET DE POLICE a porté au droit au respect de la vie familiale de Mme Wonje X... épouse Y... une atteinte disproportionnée par rapport au but en vue duquel il a été pris ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 14 janvier 1991 décidant la reconduite à la frontière de Mme Wonje X... épouse Y... ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Wonje X... épouse Y..., au PREFET DE POLICE et au ministre de l'intérieur.