Vu la requête, enregistrée le 8 juillet 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA CHARENTE ; le PREFET DE LA CHARENTE demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 5 juin 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 29 mai 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Nabil X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Poitiers ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée notamment par les lois des 2 août 1989, 10 janvier 1990 et 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Rousselle, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... s'est maintenu dans de telles conditions sur le territoire et entre ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que si M. X... a épousé le 27 juin 1992 une ressortissante française et si deux enfants sont issus de ce mariage, l'intéressé, condamné à trois ans et demi d'emprisonnement, a été incarcéré du 12 août 1993 au 17 février 1996 et le 5 décembre 1995, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'Evry a rendu à la demande de Mme X... une ordonnance de non-conciliation autorisant cette dernière à assigner son conjoint devant le tribunal aux fins de divorce et lui confiant l'exercice de l'autorité parentale ; qu'à la date à laquelle l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière a été pris par le PREFET DE LA CHARENTE, M. X... ne pouvait plus se prévaloir d'une communauté de vie avec son épouse, n'exerçait plus l'autorité parentale à l'égard de ses enfants et ne subvenait pas à leurs besoins ; que, dans les circonstances de l'espèce, ledit arrêté ne portait pas au droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il avait été pris ; qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA CHARENTE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Poitiers s'est fondé sur cet unique moyen pour annuler son arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... ;
Article 1er : Le jugement en date du 5 juin 1996 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Poitiers est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA CHARENTE, à M. X... et au ministre de l'intérieur.