Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 18 octobre 1996, présentée pour M. Hasan Z..., demeurant chez M. Abouzer X...
... à Villiers le Bel (95400) ; M. Z... demande au Conseil d Etat :
1°) d'annuler le jugement du 18 septembre 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 10 septembre 1996 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) de décider qu il sera sursis à l exécution dudit jugement jusqu à ce qu il soit statué sur la requête tendant à son annulation ;
3°) d annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ainsi que la décision de refus de séjour notifiée le 9 avril 1996 ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 4 500 F au titre de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Pêcheur, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne l'arrêté de reconduite à la frontière :
Sur l exception d illégalité tirée du refus de titre de séjour :
Considérant que la décision par laquelle un titre de séjour a été refusé à M. Z... lui a été régulièrement notifiée le 12 avril 1996 ; que cette décision étant devenue définitive, M. Z... n est pas recevable à exciper de son illégalité à l encontre de la décision de reconduite à la frontière prise à son encontre sur le fondement de l article 22-3° de l ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ; que, pour les mêmes motifs, les conclusions demandant au Conseil d'Etat d annuler ce refus de titre de séjour, qui sont d'ailleurs nouvelles en appel, sont irrecevables ;
Sur la compétence de l auteur de l acte attaqué et sur le vice de forme allégué :
Considérant, d'une part, qu il ressort des pièces du dossier que l arrêté de reconduite à la frontière attaqué a été signé par M. Bertrand Y..., secrétaire général de la préfecture du Val d Oise ; que celui-ci était titulaire d une délégation de signature du préfet donnée par un arrêté du 16 janvier 1996 et publié au recueil des actes administratifs le 18 janvier 1996 ; que cet arrêté doit être regardé comme ayant fait l objet d une publicité suffisante de nature à le rendre opposable aux tiers ; que le moyen tiré de l incompétence de l auteur de l acte ne saurait donc être accueilli ; que, d'autre part, la circonstance que la copie de la décision ne porterait pas la signature de son auteur est sans influence sur la légalité de cette décision ;
Sur la motivation de l'arrêté attaqué :
Considérant que l arrêté attaqué comporte l énoncé des éléments de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ; que la circonstance que cet arrêté ne mentionne pas de façon explicite les raisons pour lesquelles M. Z... ne pouvait bénéficier d une mesure de régularisation de sa situation n est pas de nature à faire regarder ledit arrêté comme insuffisamment motivé ;
Sur la légalité interne dudit arrêté :
Considérant que la nouvelle demande de réexamen de sa situation, présentée par M. Z... à l office français de protection des réfugiés et apatrides a été rejetée, faute d éléments nouveaux, le 19 juin 1996 ; que, dans ces conditions, le nouveau recours que M. Z... a adressé à la commission de recours des réfugiés doit être regardé comme ayant eu pour seul objet de faire échec, dans un but dilatoire, à la mesure d éloignement susceptible d être prise à son encontre et n est pas, dès lors, de nature à entacher d illégalité l arrêté en date du 10 septembre 1996 par lequel le préfet du Val d Oise a ordonné sa reconduite à la frontière ;
Considérant que le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen de la situation individuelle de l'intéressé manque en fait ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l arrêté attaqué porterait au droit de M. Z... au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu il n a donc pas méconnu les stipulations de l article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l homme et des libertés fondamentales ; que l'erreur manifeste d'appréciation alléguée ne ressort pas davantage des pièces du dossier ; que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
En ce qui concerne la décision fixant la Turquie comme pays de destination :
Considérant que l existence d une décision ordonnant la reconduite à la frontière de M. Z... vers son pays d origine doit être regardée comme établie par les mentions figurant dans la notification de l arrêté de reconduite ; que les allégations de M. Z... relatives aux risques qu il courrait en cas de retour dans son pays d origine ne sont pas assorties de précisions ni de justifications ; qu ainsi M. Z... ne justifie d aucune raison qui fasse obstacle à sa reconduite à destination du pays dont il a la nationalité et ne peut soutenir que les stipulations de l article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Z... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l arrêté préfectoral en date du 10 septembre 1996 et de la décision fixant le pays de destination ;
En ce qui concerne l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. Z... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Z... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Hasan Z..., au préfet du Val d Oise et au ministre de l'intérieur.