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30/07/1997 | FRANCE | N°159910

France | France, Conseil d'État, 5 ss, 30 juillet 1997, 159910


Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, enregistré le 7 juillet 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 avril 1994 par lequel le tribunal administratif de Nantes, à la demande des époux Y..., a annulé, en ce qu'elle concerne la propriété des intéressés, la décision des 16 et 23 octobre 1989 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Sarthe relative au remembrement de la commune de Louplande, et l'a condamné à verser aux époux Y... la somme de 3 500 F au

titre des frais irrépétibles ;
2°) de rejeter la demande présent...

Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, enregistré le 7 juillet 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 avril 1994 par lequel le tribunal administratif de Nantes, à la demande des époux Y..., a annulé, en ce qu'elle concerne la propriété des intéressés, la décision des 16 et 23 octobre 1989 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Sarthe relative au remembrement de la commune de Louplande, et l'a condamné à verser aux époux Y... la somme de 3 500 F au titre des frais irrépétibles ;
2°) de rejeter la demande présentée par les époux Y... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Thiellay, Auditeur,
- les conclusions de Mme Hubac, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 19 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur, "le remembrement applicable aux propriétés non bâties se fera au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées. Il a pour but exclusif d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y seront soumis. Il doit tendre à constituer des exploitations rurales d'un seul tenant ou à de grandes parcelles bien groupées. Le nouveau lotissement doit rapprocher des bâtiments d'exploitation les terres qui constituent l'exploitation rurale" ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ont un but essentiellement économique et que c'est uniquement en vue d'assurer une meilleure exploitation des terres qu'elles prescrivent leur regroupement et leur rapprochement des bâtiments d'exploitation ; qu'il s'ensuit que, pour l'application des dispositions susreproduites, doivent être regardés comme "bâtiments d'exploitation" les bâtiments qui, pouvant être affectés au logement du personnel et pouvant abriter le cheptel et le matériel, sont de nature à être appelés de ce fait à la desserte des terres, même si pour une cause quelconque cette desserte se trouve momentanément interrompue et que c'est seulement si cette desserte doit être regardée comme définitivement abandonnée que le rapprochement de ces terres peut être opéré avec d'autres bâtiments ; qu'il appartient aux commissions communales et départementales de remembrement de se livrer à cette appréciation sous le contrôle du juge d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire et compte-tenu notamment des intentions manifestées par le propriétaire de l'exploitation rurale dont s'agit en ce qui concerne le maintien, la reprise ou l'abandon de la desserte de ses terres par les bâtiments dont il est propriétaire ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. et Mme X... étaient propriétaires au lieu-dit "Le Petit Chêne", d'une parcelle ZS 20 ; que les consorts Houdin avaient demandé la réattribution de cette parcelle peu éloignée du centre de leur exploitation rurale situé au lieu-dit "Granville" ; que bien que les intéressés n'exploitassent pas la parcelle dont s'agit à la date où est intervenu l'arrêté préfectoral prescrivant l'opération de remembrement, c'est par rapport au centre d'exploitation désigné par ces derniers que devait être apprécié le rapprochement des parcelles et non par rapport au centre d'exploitation du fermier à qui elles étaient louées ; que le tribunal administratif, pour annuler la décision de la commission départementale refusant à M. et Mme Y... l'attribution de la parcelle ZS 20, s'est ainsi fondé à tort sur la circonstance que cette parcelle était exploitée par un fermier ayant son centre d'exploitation hors périmètre de remembrement ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme Y... devant le tribunal administratif de Nantes ;

Considérant, en premier lieu, que les requérants ne peuvent utilement exciper de l'illégalité dont seraient entachés les arrêtés préfectoraux, en date du 5 février 1988, devenus définitifs, ordonnant le remembrement sur le territoire des communes de Louplande, Allonnes, Etival Lès Le Mans, Spay et Voivres Lès Le Mans ;
Considérant, en deuxième lieu, que si les requérants soutiennent que la composition de la commission départementale aurait été irrégulière, il ressort des pièces versées au dossier, comme l'admettent d'ailleurs M. et Mme Y... dans leur mémoire en réplique devant le tribunal administratif, que celle-ci était régulièrement composée ;
Considérant, en troisième lieu, que si les requérants soutiennent que la commission départementale aurait omis de répondre à la demande d'attribution d'un verger enclavé dans leurs propriétés, il ressort du mémoire présenté par ces derniers devant ladite commission qu'ils ne demandaient pas expressément cette attribution, mais se bornaient à mentionner que ledit verger appartenait à un propriétaire différent de ceux mentionnés dans la décision de la commission communale ;
Considérant, en quatrième lieu, que si les requérants soutiennent que l'attribution des parcelles en cause aurait aggravé les conditions d'exploitation, notamment en ce qui concerne les activités d'élevage, il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions d'exploitation de l'ensemble de la propriété des époux Y... aient été aggravées ; que, dans ces conditions, ces derniers ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions de l'article 19 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur, auraient été méconnues ;
Considérant, en cinquième lieu, que les époux Y... ont reçu, en échange d'apports réduits d'une superficie de 10 ha 16 a 52 ca représentant 78 098 points, des attributions d'une superficie de 9 ha 33 a 50 ca, représentant 77 933 points ; que l'écart entre la valeur des apports et celle des attributions ne revêt pas une importance telle que la règle d'équivalence prescrite par l'article 21 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur, puisse être regardée comme méconnue ;
Considérant, en sixième lieu, que si les requérants soutiennent que le remembrement aurait été effectué sans masses de répartition, cette allégation n'est pas assortie d'éléments susceptibles de la faire regarder comme établie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le nouveau lotissement attribué aux époux Y... ait été constitué en méconnaissance des prescriptions de l'article 23 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur ;
Considérant, en septième lieu, que le moyen relatif à l'attribution d'un terrain sur lequel serait située une fosse septique, qui n'a pas été soumis à la commission départementale de remembrement, ne peut être présenté directement devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'il est par suite irrecevable ;
Considérant, enfin, que, sauf dans les cas prévus par l'article 6-1 ajouté à la loi du 16 juillet 1980 par l'article 77 de la loi du 8 février 1995, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration ; que, par suite, les conclusions des requérants tendant à ce que les limites d'une parcelle achetée par eux à un centre hospitalier voisin ne soient pas modifiées sont irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision susvisée de la commission départementale de la Sarthe en date des 16 et 23 octobre 1989 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 28 avril 1994 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par les époux Y... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Gérard Y... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

03-04 AGRICULTURE, CHASSE ET PECHE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE.


Références :

Code rural 19, 21, 23
Loi 80-502 du 16 juillet 1980 art. 6-1
Loi 95-125 du 08 février 1995 art. 77


Publications
Proposition de citation: CE, 30 jui. 1997, n° 159910
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thiellay
Rapporteur public ?: Mme Hubac

Origine de la décision
Formation : 5 ss
Date de la décision : 30/07/1997
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 159910
Numéro NOR : CETATEXT000007952674 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1997-07-30;159910 ?
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