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17/10/1997 | FRANCE | N°164189

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 17 octobre 1997, 164189


Vu l'arrêt en date du 22 décembre 1994, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 5 janvier 1995, par lequel la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 75 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à ce tribunal par la COMMUNE DE NANTERRE (92000) ;
Vu, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 31 décembre 1993, la requête présentée pour la COMMUNE DE NANTERRE ; la COMMUNE DE NANTERRE demande à la Cour :
1°) l'annulati

on du jugement, en date du 20 octobre 1993, du tribunal administrat...

Vu l'arrêt en date du 22 décembre 1994, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 5 janvier 1995, par lequel la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 75 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à ce tribunal par la COMMUNE DE NANTERRE (92000) ;
Vu, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 31 décembre 1993, la requête présentée pour la COMMUNE DE NANTERRE ; la COMMUNE DE NANTERRE demande à la Cour :
1°) l'annulation du jugement, en date du 20 octobre 1993, du tribunal administratif de Paris en tant que ledit jugement a prononcé l'annulation de l'arrêté du 15 juin 1990 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré insalubres de façon irrémédiable l'ensemble des bâtiments sis ... et de l'arrêté du 9 juillet 1991 par lequel il a déclaré d'utilité publique la résorption de ces immeubles insalubres et autorisé le maire de Nanterre à les acquérir par voie d'expropriation ;
2°) le rejet de la requête présentée par M. Bénichou devant le tribunal administratif qui tendait à l'annulation de ces arrêtés ;
3°) la condamnation de M. Bénichou à lui verser une somme de 10 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970, tendant à faciliter la suppression de l'habitat insalubre ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et notamment son article 75-I ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Thiellay, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la COMMUNE DE NANTERRE,
- les conclusions de Mme Pécresse, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la COMMUNE DE NANTERRE relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, d'une part, l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 15 juin 1990 pris sur le fondement des articles L. 36 et suivants du code de la santé publique, déclarant insalubres de façon irrémédiable et interdisant immédiatement à l'habitation les bâtiments sis ..., et, d'autre part, l'arrêté du même préfet du 9 juillet 1991 déclarant d'utilité publique l'expropriation desdits immeubles et les déclarant cessibles au profit de la COMMUNE DE NANTERRE ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes :
Considérant que M. Bénichou s'est borné à soulever dans le délai de recours contentieux devant le tribunal administratif de Paris des moyens relevant de la légalité externe de l'arrêté préfectoral du 15 juin 1990 ; qu'en contestant ultérieurement le caractère irrémédiable de l'insalubrité des immeubles, il a soulevé un moyen procédant d'une cause juridique distincte de celle à laquelle se rattachaient lesdits moyens ; qu'ainsi c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce moyen de légalité interne, qui était irrecevable, pour annuler ledit arrêté et, par voie de conséquence, l'arrêté du 9 juillet 1991 du préfet des Hauts-de-Seine ; que le jugement attaqué doit dès lors être annulé dans l'ensemble de ses dispositions ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de M. Bénichou ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté préfectoral du 15 juin 1990 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 36 du code de la santé publique : "Les communes peuvent, en vue de faciliter leur assainissement ou leur aménagement, provoquer la déclaration d'insalubrité d'un immeuble, d'un groupe d'immeubles" ; qu'aux termes de l'articleL. 38 du même code : "Si le préfet prend en considération la délibération du conseil municipal, il saisit d'urgence de cette délibération le conseil départemental d'hygiène ( ...) (qui) en délibère et déclare, pour chaque immeuble, s'il est salubre, totalement insalubre, ou partiellement insalubre. Dans le cas d'insalubrité ( ...) lorsqu'il est impossible d'y remédier, le préfet prescrit les mesures appropriées pour mettre les locaux hors d'état d'être habités" ; qu'aux termes de l'article L. 39 du même code : "Le préfet notifie, par lettre recommandée, un extrait de la délibération du conseil départemental à chaque intéressé ( ...) Dans un délai de dix jours à dater de cette notification, tout intéressé pourra former un recours auprès du ministre de la santé publique et de la population, lequel statuera d'urgence après un avis du conseil supérieur d'hygiène publique de France, qui interviendra dans un délai maximum de deux mois" ; qu'aux termes de l'article L. 40 du même code : "La délibération du conseil départemental, modifiée le cas échéant conformément à la décision du ministre de la santé publique et de la population, sera alors approuvée par un arrêté préfectoral dont un extrait sera notifié, par lettre recommandée, aux intéressés qui auront formé le recours prévu à l'article précédent ( ...)" ;

Considérant qu'en vertu de l'arrêté préfectoral du 14 septembre 1989 le directeur départemental de l'action sanitaire et sociale avait reçu compétence pour saisir le conseil départemental d'hygiène au nom du préfet ;
Considérant que les deux immeubles en cause faisaient partie de la succession de M. Fraïm Bénichou, laquelle avait donné lieu à la désignation d'un administrateur provisoire par le tribunal de grande instance de Paris le 28 avril 1987 ; qu'ainsi l'administration s'est régulièrement acquittée de ses obligations de notification au propriétaire des différents actes de la procédure en les adressant à Me X..., administrateur provisoire de la succession ;
Considérant que le moyen relatif au nombre de rapporteurs devant le conseil départemental d'hygiène n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant enfin que le secrétaire général de la préfecture des Hauts-de-Seine avait reçu délégation par arrêté du préfet en date du 14 septembre 1989 en vue de signer l'arrêté attaqué, lequel est suffisamment motivé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de M. Bénichou dirigée contre l'arrêté du 15 juin 1990 doit être rejetée ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté préfectoral du 9 juillet 1991 :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant qu'un acte déclaratif d'utilité publique ne présente pas le caractère d'une décision administrative individuelle et n'a donc pas à être motivé en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'article 13 de la loi susvisée du 10 juillet 1970 n'obligeait pas le préfet des Hauts-de-Seine à préciser dans l'arrêté du 9 juillet 1991 les buts d'aménagement qu'il poursuivait en le prenant ;
Considérant qu'en précisant dans l'article 5 dudit arrêté que "le montant des indemnités provisionnelles allouées aux propriétaires ainsi qu'aux titulaires de baux commerciaux, y compris le montant de l'indemnité provisionnelle de déménagement, est fixé conformément à l'évaluation de l'administration des Domaines", le préfet des Hauts-de-Seine, alors même que le chiffre de ladite évaluation n'est pas mentionné dans l'arrêté, a suffisamment répondu aux exigences de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1970 ; que la circonstance que le requérant n'auraitpas reçu notification des offres de relogement annexées à l'arrêté attaqué est sans incidence sur la légalité de celui-ci ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant que M. Bénichou soulève à l'appui de ses conclusions relatives à la déclaration d'utilité publique l'illégalité de l'arrêté préfectoral du 15 juin 1990 qui lui sert de fondement ; que dans le cadre de cette exception d'illégalité il est recevable à invoquer tout moyen relatif à l'arrêté du 15 juin 1990, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que, comme il a été dit ci-dessus, les conclusions qu'il avait dirigées contre l'arrêté du 15 juin 1990 n'avaient été assorties, dans le délai de recours contentieux, que de moyens de légalité externe ;

Considérant que, sur la base d'un rapport de l'inspecteur de salubrité de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Hauts-de-Seine attribuant aux immeubles en cause une "cote globale d'insalubrité" élevée, le conseil départemental d'hygiène s'est prononcé en faveur d'une déclaration d'insalubrité irrémédiable et d'une interdiction immédiate d'habitation desdits immeubles ; que les pièces versées au dossier et notamment celles produites par M. Bénichou n'établissent pas que la délibération de ce conseil départemental serait fondée sur des motifs entachés d'inexactitude matérielle ou d'erreur d'appréciation ;
Considérant que le caractère irrémédiable de l'insalubrité ainsi établi justifiait l'intervention de l'autorité préfectorale sur le fondement des articles L. 39 et L. 40 précités du code de la santé publique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Bénichou n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté préfectoral du 9 juillet 1991 ;
Sur les conclusions de M. Bénichou tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. Bénichou la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de la COMMUNE DE NANTERRE tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions précitées, de condamner M. Bénichou à verser à la COMMUNE DE NANTERRE la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 20 octobre 1993 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Bénichou devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : M. Bénichou est condamné à verser à la COMMUNE DE NANTERRE la somme de 10 000 F en application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Les conclusions de M. Bénichou tendant à ce qu'en application de ces mêmes dispositions l'Etat soit condamné à son profit sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE NANTERRE, à M. Bénichou et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 5 / 3 ssr
Numéro d'arrêt : 164189
Date de la décision : 17/10/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

34 EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE.


Références :

Code de la santé publique L36, L39, L40
Loi 70-612 du 10 juillet 1970 art. 13, art. 14
Loi 79-587 du 11 juillet 1979
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 17 oct. 1997, n° 164189
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thiellay
Rapporteur public ?: Mme Pécresse

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:164189.19971017
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