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27/10/1997 | FRANCE | N°181795

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 27 octobre 1997, 181795


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 12 août 1996, présentée pour Mme Véronica X... demeurant ... ; Mme X... demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 février 1996 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 7 février 1996 par lequel le préfet du Val-de-Marne a décidé la reconduite à la frontière de Mme X... ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de

condamner l'Etat au versement d'une somme de 12 060 F au titre de l'article 75-I de ...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 12 août 1996, présentée pour Mme Véronica X... demeurant ... ; Mme X... demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 16 février 1996 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 7 février 1996 par lequel le préfet du Val-de-Marne a décidé la reconduite à la frontière de Mme X... ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 12 060 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Piveteau, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 25 septembre 1995, de la décision du préfet du Val-de-Marne du 14 septembre 1995, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3° de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme X..., de nationalité ghanéenne, est entrée en France en 1995 pour y demander l'asile politique ; qu'elle a épousé le 13 mai 1995 un réfugié politique ghanéen qui a depuis acquis la nationalité française ; que, dans les circonstances de l'affaire, eu égard notamment à l'absence d'attaches effectives conservées dans son pays d'origine et à l'intérêt de sa présence pour sa famille séjournant régulièrement en France, la mesure de reconduite prise à l'encontre de Mme X... porte au droit de celui-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été décidée cette mesure ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête en tant qu'elle est dirigée contre l'arrêté du 7 février 1996 du préfet du Val-de-Marne décidant sa reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, à condamner l'Etat à verser à Mme X... la somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 16 février 1996 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme X... dirigées contre l'arrêté du 7 février 1996 du préfet du Val-de-Marne décidant sa reconduite à la frontière.
Article 2 : L'arrêté en date du 7 février 1996 du préfet du Val-de-Marne décidant la reconduite à la frontière de Mme X... est annulé.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à Mme X... la somme de 5 000 F.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Véronica X..., au préfet du Val-de-Marne et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 181795
Date de la décision : 27/10/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 1997, n° 181795
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M STIRN
Rapporteur public ?: M. Piveteau

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:181795.19971027
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