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27/10/1997 | FRANCE | N°184480

France | France, Conseil d'État, 7 ss, 27 octobre 1997, 184480


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 décembre 1996, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 octobre 1996 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme Gracius Héléna X..., l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 17 octobre 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressée ;
2°) de rejeter la demande de Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les a

utres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droit...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 décembre 1996, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 octobre 1996 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme Gracius Héléna X..., l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 17 octobre 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de l'intéressée ;
2°) de rejeter la demande de Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Challan-Belval, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le préfet de police peut "décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière. 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... s'est vu refuser par le PREFET DE POLICE la délivrance d'un titre de séjour après que la commission des recours des réfugiés lui ait notifié le rejet de sa demande d'asile politique ; qu'ainsi, l'intéressée entrait dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant que si Mme X..., ressortissante sri-lankaise entrée en France le 15 mars 1995, fait valoir qu'elle a épousé le 20 janvier 1996 un compatriote titulaire d'une carte de résident et bénéficiant de la qualité de réfugié, il ne résulte pas des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment du caractère récent de l'union qu'elle a contractée, de la durée et des conditions de séjour, de l'existence d'attaches familiales dans son pays d'origine, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière et notamment à la circonstance que son mari pourra demander en sa faveur le bénéfice de la législation sur le regroupement familial, l'arrêté contesté porte à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté de reconduite de Mme X... à la frontière ;
Considérant qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... ;
Considérant que le moyen tiré de ce qu'en raison des risques qu'encourrait l'intéressée si elle retournait au Sri-Lanka l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant, ledit arrêté n'indiquant pas vers quel pays Mme X... doit être reconduite ;
Considérant que la circonstance que l'intéressée n'a porté aucun trouble à l'ordre public est, tout comme la circonstance que son mari a un emploi régulier et est titulaire d'un bail locatif, sans influence sur la légalité de la décision de reconduite à la frontière ;

Considérant que si Mme X... fait valoir qu'elle a sollicité de l'office français des réfugiés et apatrides la réouverture de son dossier de demande d'asile, elle n'apporte au soutien de ses allégations aucune justification, ni précision permettant d'en apprécier le bien fondé ;
Considérant que le moyen tiré des risques encourus par l'intéressée en cas de retour au Sri Lanka en raison de son appartenance à l'ethnie tamoul, qui ne peut en tout état de cause être utilement invoqué à l'encontre de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, doit être regardé comme tendant à l'annulation de la décision distincte fixant le Sri Lanka comme pays de destination ;
Considérant toutefois que les allégations de Mme X... relatives aux risques qui pèseraient sur elle dans son pays d'origine, risques dont l'office des réfugiés et apatrides et la commission des recours des réfugiés n'ont d'ailleurs pas reconnu l'existence, ne sont pas assorties de précisions ni de justifications probantes ; qu'il suit de là que la décision fixant le pays de renvoi ne saurait être regardée comme l'exposant, en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à des traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée devant les premiers juges par Mme X... ;
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 30 octobre 1996 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7 ss
Numéro d'arrêt : 184480
Date de la décision : 27/10/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3, art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 1997, n° 184480
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Challan-Belval
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:184480.19971027
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