La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/10/1997 | FRANCE | N°160072;160073;160074

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 29 octobre 1997, 160072, 160073 et 160074


Vu 1°, sous le n° 160072, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 juillet 1994 et 14 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?", dont le siège social est ... (56014), représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 25 mai 1988 par laquelle le consei

l municipal de Ploemeur a approuvé la révision partielle du plan d'o...

Vu 1°, sous le n° 160072, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 juillet 1994 et 14 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?", dont le siège social est ... (56014), représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 25 mai 1988 par laquelle le conseil municipal de Ploemeur a approuvé la révision partielle du plan d'occupation des sols de cette commune ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette délibération ;
3°) de condamner la commune de Ploemeur a lui payer la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu 2°, sous le n° 160073, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 juillet 1994 et 14 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?", dont le siègesocial est ... (56014) , représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 14 septembre 1987 par lequel le préfet du Morbihan a autorisé l'application par anticipation des orientations du schéma directeur du pays de Lorient en cours d'établissement pour la création de la zone à vocation touristique de la commune de Ploemeur, d'autre part, de la décision par laquelle le préfet du Morbihan a refusé de retirer cet arrêté ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu 3°, sous le n° 160074, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 juillet 1994 et 14 novembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?", dont le siège social est ... (56014), représentée par son président en exercice ; l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 19 octobre 1987 par lequel le préfet du Morbihan a autorisé l'application par anticipation des orientations du schéma directeur du pays de Lorient en cours d'établissement pour la création de la zone à vocation touristique de Sterbouest située sur la commune de Locmiquélic, d'autre part, de la décision par laquelle le préfet du Morbihan a refusé de retirer cet arrêté ;
2°) à titre principal, d'annuler partiellement pour excès de pouvoir cet arrêté du préfet du Morbihan uniquement en tant qu'il autorise l'application anticipée de l'orientation du schéma directeur relative à la création d'un "complexe touristico-cinématographique" ;

3°) à titre subsidiaire, de lui donner acte de son désistement si l'acte attaqué est indivisible ;
4°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hadas-Lebel, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Stahl, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes de l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne les requêtes n°s 160073 et 160074 relatives à l'application anticipée des orientations touristiques du schéma directeur du Pays de Lorient :
Sur la régularité des jugements attaqués :
Considérant qu'il ressort de l'examen des jugements attaqués que contrairement à ce qui est soutenu, ils ont répondu à l'ensemble des moyens invoqués ;
Sur les fins de non-recevoir opposées aux demandes de l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" :
Considérant, d'une part, que selon les stipulations de l'article 2 de ses statuts l'association requérante a notamment pour objet la défense des espaces naturels susceptibles d'être ouverts à l'urbanisation dans le département du Morbihan ; qu'elle a, par suite, intérêt à contester la légalité des arrêtés des 14 septembre et 19 octobre 1987 par lesquels le préfet de ce département a autorisé l'application anticipée des orientations du schéma directeur du Pays de Lorient en cours de modification, pour les zones à vocation touristique sises sur le territoire des communes de Ploemeur et de Locmiquélic ;
Considérant, d'autre part, que les demandes présentées au tribunal administratif de Rennes par le président de l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" ont été régularisées par une délibération du 22 septembre 1990 de l'assemblée générale de cette association donnant "tous pouvoirs à son président" pour agir en son nom en ce qui concerne l'application anticipée du schéma directeur sur le territoire des communes de Ploemeur et Locmiquélic ;

Sur la légalité des arrêtés attaqués :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-28 du code de l'urbanisme, pris pour l'application de l'article L. 122-6 du même code : " ... lorsqu'un schéma directeur est en cours de modification, il peut être fait application par anticipation, dans les conditions définies au présent article, des orientations en cours d'établissement afin de permettre la réalisation des programmes de l'Etat, des collectivités locales et des établissements et services publics ainsi que les décisions qui les concernent si ces programmes et décisions sont compatibles avec les orientations envisagées. -Les orientations intéressant les programmes et décisions doivent : (...) b) avoir fait l'objet d'études suffisamment avancées afin de permettre d'apprécier la compatibilité de ces programmes et décisions avec les principales perspectives d'aménagement de l'ensemble du schéma futur et avec la destination générale des sols des zones, espaces ou sites intéressés ; c) avoir été définies dans les formes prescrites par l'article R. 122-25 ..." ; qu'aux termes de ce dernier article : "Un schéma directeur se compose d'un rapport et de documents graphiques. - Lerapport présente : ... -d) l'analyse de l'état initial de l'environnement et la mesure dans laquelle le schéma prend en compte le souci de sa préservation ; -e) la justification de la compatibilité des dispositions du schéma directeur avec l'article L. 121-10 et avec les lois et prescriptions mentionnées à l'article L. 111-1-1 ..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que les orientations du futur schéma directeur du Pays de Lorient dont les arrêtés attaqués des 14 septembre et 19 octobre 1987 du préfet du Morbihan ont autorisé la mise en application anticipée, sont contenues dans deux documents intitulés "développement du tourisme" et "incidences de l'orientation développement du tourisme sur les autres orientations" ; que ces documents, succincts et généraux, constituent en l'espèce le rapport mentionné par les dispositions susrappelées de l'article R. 122-25 du code de l'urbanisme ; que, s'agissant des deux zones concernées par les orientations mises en application anticipée par les deux arrêtés attaqués, ce rapport se borne à décrire les projets touristiques des communes de Ploemeur et Locmiquélic ; qu'il ne contient aucune indication concernant l'état initial de l'environnement dans les zones concernées et sa préservation ; qu'il ne comporte pas davantage la justification de la compatibilité des orientations dont l'application anticipée est autorisée, avec les lois et prescriptions mentionnées à l'article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme et en particulier avec celles qui résultent des dispositions des articles L. 146-1, L. 146-4 et L. 146-6 de ce même code, issues de la loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, à la protection et la mise en valeur du littoral ; qu'ainsi les arrêtés des 14 septembre et 19 octobre 1987 du préfet du Morbihan ont été pris en méconnaissance des dispositions combinées des articles R. 122-25 et R. 122-28 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes, l'association requérante est fondée à demander, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 14 septembre 1987 autorisant l'application anticipée des orientations du schéma directeur relatives à la commune de Ploemeur et, d'autre part, celle de l'arrêté du 19 octobre 1987 en tant qu'il autorise l'application anticipée d'une orientation ayant pour objet de permettre la création d'un "complexe touristico-cinématographique" sur le territoire de la commune de Locmiquélic ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" est fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements des 11 et 19 mai 1994, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés et à celle des décisions par lesquelles le préfet du Morbihan a refusé de les retirer ;

En ce qui concerne la requête n° 160072 :
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" soutient que le jugement attaqué par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande dirigée contre la délibération du 25 mai 1988 du conseil municipal de Ploemeur approuvant la révision partielle du plan d'occupation des sols de la commune, serait irrégulier faute d'avoir statué sur le moyen tiré de ce que le syndicat intercommunal pour le développement universitaire et économique du Pays de Lorient (SIDEREL) n'aurait pas été compétent pour élaborer les modifications à apporter au schéma directeur et pour définir les orientations de celui-ci en matière de tourisme ; qu'il ressort du dossier de première instance que l'association requérante n'a pas invoqué ce moyen à l'appui de ses conclusions dirigées contre la délibération attaquée ; que le tribunal administratif n'avait donc pas à y répondre ;
Sur la légalité de la délibération attaquée :
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme : "Les plans d'occupation des sols doivent être compatibles avec les prescriptions prises en application de l'article L. 111-1-1 et les orientations des schémas directeurs et des schémas de secteurs, s'ils existent ..." ;
Considérant qu'à la suite de son annulation par la présente décision, l'arrêté du 14 septembre 1987 du préfet du Morbihan, autorisant l'application anticipée des orientations du schéma directeur en cours de modification pour la zone à vocation touristique sise sur le territoire de la commune de Ploemeur, doit être réputé n'être jamais intervenu ; qu'il suit de là que les orientations initialement retenues pour cette zone par le schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme de la région de Lorient approuvé le 30 avril 1981 n'ont pas cessé d'être applicables ; que ces orientations prévoient pour cette zone l'existence d'un "secteur légumier prioritaire" et d'un "espace rural" ; qu'ainsi les dispositions de la délibération du 25 mai 1988 du conseil municipal de Ploemeur approuvant la révision partielle du plan d'occupation des sols de la commune, en tant qu'elles prévoient d'affecter cette zone à des aménagements touristiques comportant notamment la réalisation d'un golf et la construction d'immeubles, ne sont pas compatibles avec les orientations du schéma directeur d'aménagement et d'urbanisme approuvé le 30 avril 1981 ; que l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" est, par suite, fondée à demander l'annulation de cette délibération ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 mai 1994, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération ;

Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner la commune de Ploemeur s'agissant de la requête n° 160072 et l'Etat, s'agissant des requêtes n° 160073 et n° 160074, à verser à l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" la somme de 5 000 F pour chaque espèce au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que l'association requérante, qui n'est pas dans les présentes instances la partie perdante, soit condamnée à payer à l'Etat la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui ;
Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Rennes des 11 et 19 mai 1994 sont annulés.
Article 2 : L'arrêté du 14 septembre 1987 du préfet du Morbihan, l'arrêté du 19 octobre 1987 de ce même préfet en tant qu'il autorise l'application anticipée d'une orientation du schéma directeur ayant pour objet de permettre la création d'un "complexe touristico-cinématographique" sur le territoire de la commune de Locmiquélic ainsi que la délibération du 25 mai 1988 du conseil municipal de Ploemeur sont annulés.
Article 3 : La commune de Ploemeur, pour la requête n° 160072 et l'Etat, pour les requêtes n°s 160073 et 160074, verseront à l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?" la somme de 5 000 F pour chaque espèce, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
Article 4 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION "URBANISME OU ENVIRONNEMENT ?", au préfet du Morbihan, à la commune de Ploemeur, à l'association Tarz-Heol, au syndicat intercommunal pour le développement universitaire et économique du Pays de Lorient, à la commune de Locmiquélic et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 160072;160073;160074
Date de la décision : 29/10/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-01-005-01-01-02 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PLANS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME - SCHEMAS DIRECTEURS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME - LEGALITE DES SCHEMAS DIRECTEURS - PROCEDURE - PROCEDURE DE MODIFICATION -Application par anticipation (article R.122-28 du code de l'urbanisme) - Procédure - Régularité - Documents prévus à l'article R.122-25 du code de l'urbanisme - Insuffisance en l'espèce.

68-01-005-01-01-02 L'article R.122-28 du code de l'urbanisme, pris pour l'application de l'article L.122-6 du même code, autorise, lorsqu'un schéma directeur est en cours de modification, l'application par anticipation des orientations en cours d'établissement, sous certaines conditions, notamment celle du respect des formes prescrites par l'article R.122-25 du même code qui prévoit qu'un schéma directeur se compose d'un rapport et de documents graphiques dont il précise le contenu. Des documents succincts et généraux qui se bornent à décrire les projets touristiques des deux communes concernées par la mise en application anticipée des orientations du schéma directeur en cours de modification et qui ne contiennent aucune indication concernant l'état initial de l'environnement et de sa préservation dans les zones concernées, ni la justification de la compatibilité des orientations dont l'application anticipée est autorisée avec les lois et prescriptions mentionnées aux articles L.111-1-1, L.146-1, L.146-4 et L.146-6 du code de l'urbanisme, ne répondent pas aux prescriptions de l'article R.122-25 du code de l'urbanisme. Illégalité de l'arrêté préfectoral autorisant la mise en application anticipée des orientations du schéma directeur relatives à ces communes.


Références :

Arrêté du 14 septembre 1987
Arrêté du 19 octobre 1987
Code de l'urbanisme R122-28, L122-6, R122-25, L111-1-1, L123-1
Loi du 03 janvier 1986 art. 75
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 29 oct. 1997, n° 160072;160073;160074
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Labetoulle
Rapporteur ?: M. Hadas-Lebel
Rapporteur public ?: M. Stahl

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:160072.19971029
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award