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10/11/1997 | FRANCE | N°156703

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 10 novembre 1997, 156703


Vu 1°), sous le n° 156703, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 mars et 1er avril 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Marie-Louise X..., demeurant ..., Mme Jeanine X..., demeurant ..., Mme Elisabeth A..., demeurant ..., Mme Françoise Z..., demeurant ..., l'association "POUR UN TRACE DE L'AUTOROUTE A67 PROTEGEANT LES INTERETS AGRICOLES, FORESTIERS ET CYNEGETIQUES", dont le siège est La Marionière à La Bussière (45230), représentée par son président en exercice et la société "FERME DES REAUX", dont le siège es

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Vu 1°), sous le n° 156703, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 3 mars et 1er avril 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Marie-Louise X..., demeurant ..., Mme Jeanine X..., demeurant ..., Mme Elisabeth A..., demeurant ..., Mme Françoise Z..., demeurant ..., l'association "POUR UN TRACE DE L'AUTOROUTE A67 PROTEGEANT LES INTERETS AGRICOLES, FORESTIERS ET CYNEGETIQUES", dont le siège est La Marionière à La Bussière (45230), représentée par son président en exercice et la société "FERME DES REAUX", dont le siège est à Ouzouer-surTrézée Les Réaux (45250), SARL agissant par ses représentants en exercice ; les requérantes demandent au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 31 décembre 1993 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de l'autoroute A67 comprise entre Dordives et Cosne-Cours-sur-Loire et portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes de Souppes-sur-Loing, Château-Landon, Dordives, Nargis, Corquilleroy, Pannes, Villemandeur, Chevillon-sur-Huillard, Varennes-Changy, Vimory, Nogent-surVernisson, La Bussière, Gien-Arrabloy, Briare, Ouzouer-sur-Trézée, Bonny-sur-Loire, Neuvysur-Loire, La Celle-sur-Loire, Myennes et Cosnes-Cours-sur-Loire ;
Vu 2°), sous le n° 156775, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 7 mars et 7 juillet 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE BRIARE-LE-CANAL, représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE BRIARE-LE-CANAL demande au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 31 décembre 1993 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de l'autoroute A 67 comprise entre Dordives et Cosnes-sur-Loire et portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes de Souppes-sur-Loing, ChâteauLandon, Dordives, Nargis, Corquilleroy, Pannes, Villemandeur, Chevillon-sur-Huillard, Varennes-Changy, Vimory, Nogent-sur-Vernisson, La Bussière, Gien-Arrabloy, Briare, Ouzouer-sur-Trézée, Bonny-sur-Loire, Neuvy-sur-Loire, La Celle-sur-Loire, Myennes et Cosnes-Cours-sur-Loire ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Vu la loi du 2 mai 1930 relative à la protection des monuments naturels et des sites ;
Vu la directive des communautés européennes du 27 juin 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de Mmes Marie-Louise X... et autres et de Me Foussard, avocat de la COMMUNE DE BRIARE-LE Y...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 156703 et 156775 sont dirigées contre un même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur le moyen tiré de l'absence de contreseing de certains ministres :
Considérant qu'en application de l'article 22 de la Constitution, les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution ;
Considérant que la déclaration d'utilité publique des travaux à exécuter pour le projet d'autoroute en cause n'implique l'intervention d'aucun acte réglementaire ou individuel que le ministre de l'intérieur, le ministre de l'agriculture et le ministre du budget seraient compétents pour signer ou contresigner ; que, dans ces conditions, le décret attaqué n'avait pas à être soumis à leur contreseing ;
Sur la publicité de l'enquête :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-14-7 du Code de l'expropriation : "un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 11-14-5 à la connaissance du public est, par les soins du Préfet, publié en caractères apparents dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés, au moins quinze jours avant le début de l'enquête et rappelé de même dans les huit premiers jours de celle-ci. Pour les opérations d'importance nationale ledit avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale quinze jours au moins avant le début de l'enquête" ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'avis d'ouverture de l'enquête a été publié dans le "Figaro" et "Le Monde" datés du 29 mai 1992, etdans la "République de Seine-et-Marne" les 25 mai 1992 et 22 juin 1992, le "Parisien libéré" (édition de Seine-et-Marne) les 29 mai et 23 juin 1992, le "Régional de Cosne" les 28 mai 1992 et 25 juin 1992, le "Journal du Centre" les 29 mai 1992 et 23 juin 1992 et "L'éclaireur du Gâtinais" les 3 juin 1992 et 24 juin 1992 ; que si des retards pouvant aller jusqu'à dix jours sont constatés par rapport aux délais réglementaires, ils sont dûs aux jours de parution dans la semaine des titres hebdomadaires en cause ; qu'au demeurant l'enquête a été prolongée à la demande du président de la commission du 18 juillet 1992 au 31 juillet 1992 ; qu'il n'est pas allégué, alors que plus de 1 500 observations ont été recueillies, que des personnes auraient été empêchées, faute d'une publicité suffisante, de produire leurs observations ; que dès lors les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les modalités de publicité de l'enquête préalable sont entachées d'irrégularité ;
Sur les moyens relatifs à la constitution du dossier d'enquête :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation : "L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I. Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : 1°) une notice explicative ; 2°) un plan de situation ; 3°) le plan général des travaux ; 4°) les caractéristiques principales des ouvrages les plus importants ; 5°) l'appréciation sommaire des dépenses ; 6°) l'étude d'impact définie à l'article 2 du décret n° 771141 du 12 octobre 1977 lorsque les ouvrages ou travaux n'en sont pas dispensés ( ...)" et qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 : "Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. L'étude d'impact présente successivement : 1°) une analyse de l'état initial du site et de son environnement ... 2°) une analyse des effets sur l'environnement ...3°) les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu ; 4°) les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables que le projet pourrait avoir sur l'environnement, ainsi que les dépenses correspondantes" ;
Considérant que la notice explicative que comprenait le dossier soumis à enquête préalable à la déclaration d'utilité publique en vertu des dispositions précitées de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation comportait toutes précisions nécessaires sur l'objet de l'opération, indiquait les raisons pour lesquelles le projet présenté avait été retenu, décrivait les caractéristiques des ouvrages les plus importants, la nature et la localisation des travaux envisagés ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appréciation des dépenses ait été entachée d'erreurs de nature à vicier la procédure ;
Considérant qu'il ressort clairement de l'article 189 du traité de Rome du 25 mars 1957 que si les directives lient les Etats membres "quant au résultat à atteindre" et si, pour atteindre le résultat qu'elles définissent, les autorités nationales sont tenues d'adapter la législation et la réglementation des Etats membres aux directives qui leur sont destinées, ces autorités restent seules compétentes pour décider de la forme à donner à l'exécution des directives et pour fixer elles-mêmes, sous le contrôle des juridictions nationales, les moyens propres à leur faire produire des effets en droit interne ; qu'ainsi, quelles que soient d'ailleurs les précisions qu'elles contiennent à l'intention des Etats membres, les directives ne sauraient être invoquées par les ressortissants de ces Etats à l'appui d'un acte administratif non réglementaire ; qu'il suit de là que les requérants ne peuvent utilement soutenir que l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête méconnaît les dispositions de la directive communautaire du 27 juin 1985 relative à la prise en considération des effets directs et indirects du projet sur l'environnement ;

Considérant que, si les requérantes soulèvent par voie d'exception à l'encontre du décret attaqué, l'illégalité du décret du 12 octobre 1977 sur l'étude d'impact au regard des objectifs de la directive communautaire du 27 juin 1985 susvisée, il résulte des termes mêmes dudit décret dans sa rédaction introduite par le décret du 25 février 1993, en vigueur à la date de la décision attaquée, qu'un tel moyen est mal fondé ;
Considérant que l'étude d'impact jointe au dossier d'enquête comporte toutes les rubriques prévues par les dispositions précitées au décret du 12 octobre 1977 ; qu'elle analyse avec une précision suffisante l'état initial du site, les divers effets sur l'environnement du point de vue de l'impact visuel et des nuisances acoustiques ; que les mesures envisagées afin de réduire les conséquences dommageables du projet y sont énumérées ; que le dossier expose les raisons pour lesquelles le projet choisi a été retenu ; qu'il ne ressort pas de l'examen de cette étude que certains effets du projet auraient été omis ou sous-évalués ; que dès lors les prescriptions de l'article 2 du décret précité n'ont pas été méconnues ;
Considérant que contrairement à ce que soutiennent les requérantes, l'évaluation économique et sociale mentionnée à l'article 4 du décret du 17 juillet 1984 n'est pas entachée d'insuffisance ;
Sur le moyen tiré du fait que l'avis prévu par la législation sur les sites ne figurait pas au dossier de l'enquête :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 13 de la loi du 2 mai 1930 : "aucun monument naturel ou site classé ou proposé pour le classement ne peut être compris dans une enquête aux fins d'expropriation pour cause d'utilité publique qu'après que le ministre des beaux arts aura été appelé à présenter ses observations" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un monument naturel ou un site classé était compris dans le périmètre de la zone concernée ; qu'ainsi le décret attaqué a pu légalement intervenir sans qu'aient été recueillies les observations du ministre de la culture ;
Sur le moyen tiré de l'absence d'utilité publique :
Considérant que la réalisation de la section Dordives-Cosne-sur-Loire de l'autoroute A.67 qui permettra un délestage de l'autoroute A6 en renforçant l'axe Nord-Sud ParisNevers vers Lyon et le Massif central ainsi qu'une meilleure desserte régionale revêt un caractère d'utilité publique ;

Considérant qu'eu égard à l'importance de l'opération et aux précautions prises notamment à la suite de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, les inconvénients inhérents aux atteintes portées aux propriétés privées concernées ainsi que les diverses nuisances causées aux riverains ne peuvent être regardés comme excessifs par rapport à l'intérêt que présente cette opération ; que dès lors, ni ces inconvénients, ni le coût de l'ouvrage ne sont de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique ; que si les requérantes soutiennent qu'un autre tracé était possible pour le tronçon compris entre Dordives-Nord et le lieu-dit "La Métairie Godard" et aurait entraîné moins d'inconvénients, il n'appartient pas au Conseil d'Etat statuant au contentieux de se prononcer sur l'opportunité du choix opéré à cet égard par l'administration ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation du décret attaqué ;
Article 1er : Les requêtes de Mme X... et autres et de la COMMUNE DE BRIARE-LE Y... sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mmes Marie-Louise X..., Jeanine X..., Elisabeth A..., Françoise Z..., à l'ASSOCIATION "POUR UN TRACE DE L'AUTOROUTE A 67 (BOISMORAND-COSNE) PROTEGEANT LES INTERETS AGRICOLES, FORESTIERS ET CYNEGETIQUES", à la SOCIETE "FERME DES REAUX", à la COMMUNE DE BRIARE-LE Y... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

34 EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE.


Références :

CEE Directive 85-337 du 27 juin 1985 Conseil
Constitution du 04 octobre 1958 art. 8
Décret 77-1141 du 12 octobre 1977 art. 2
Décret 84-617 du 17 juillet 1984 art. 4
Décret 93-245 du 25 février 1993
Loi du 02 mai 1930 art. 13
Traité de Rome du 25 mars 1957 art. 189


Publications
Proposition de citation: CE, 10 nov. 1997, n° 156703
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Mary
Rapporteur public ?: M. Abraham

Origine de la décision
Formation : 2 / 6 ssr
Date de la décision : 10/11/1997
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 156703
Numéro NOR : CETATEXT000007973459 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1997-11-10;156703 ?
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