Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin 1995 et 21 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Didier Y..., demeurant à Soudé (51320) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 28 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a annulé, à la demande de M. et Mme X..., la décision implicite du préfet de la Marne l'autorisant à exploiter des terres mises précédemment en valeur par M. et Mme X... ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Sanson, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Odent, avocat de M. Didier Y... et de la SCP Boré, Xavier, avocat des époux Z... Gardant,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-7 du nouveau code rural dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " ...Le préfet, pour motiver sa décision, et la commission départementale des structures agricoles, pour rendre son avis, sont tenus de se conformer aux orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département sur le territoire duquel est situé le fonds. Ils sont tenus notamment : " ... 3° de prendre en considération la situation personnelle du ou des demandeurs : âge, situation familiale et professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ..." ; que le schéma directeur des structures agricoles du département de la Marne, aux termes de l'article 1er de l'arrêté préfectoral du 1er décembre 1990, a pour orientation, d'une part, "l'installation des jeunes agriculteurs pouvant prétendre à l'octroi des aides à l'installation", d'autre part, "éviter le démembrement et la disparition des exploitations d'une superficie égale à deux fois la surface minimum d'installation" ;
Considérant dès lors que, pour accorder ou refuser l'autorisation prévue à l'article L. 331-2 du code rural, le préfet doit tenir compte non seulement de la situation du demandeur, mais aussi de celle du preneur en place, ainsi que de la préservation et de l'autonomie de l'exploitation existante ; qu'en ramenant la superficie de l'exploitation de M. et Mme X... de 89 ha 60 a, superficie supérieure à deux fois la surface minimum d'installation, à 16 ha environ, et en les privant des bâtiments d'exploitation et d'habitation, la décision implicite du préfet de la Marne a méconnu les dispositions du code rural et les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles de la Marne ;
Considérant qu'il ressort de ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a annulé la décision implicite du préfet de la Marne l'autorisant à exploiter une superficie de 73 ha 53 a 30 ca de terres précédemment mises en valeur par M. et Mme X... ;
Sur les conclusions de M. Y... et de M. et Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. et Mme X..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, soient condamnés à payer à M. Y... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant en revanche qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner M. Y... à payer à M. et Mme X... une somme de 5 000 F, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : M. Y... versera à M. et Mme X... une somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. et Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Didier Y..., à M. et Mme X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.