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29/12/1997 | FRANCE | N°150370

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 29 décembre 1997, 150370


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 juillet 1993 et 22 novembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Lahssen Y..., demeurant 450, Le Grand Mail, Font Del Z... à Montpellier (34000) ; M. Y..., demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande tendant à l'obtention d'une carte de séjour, d'autre p

art, l'a condamné à une amende de 3 000 F pour requête jugée abusiv...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 juillet 1993 et 22 novembre 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Lahssen Y..., demeurant 450, Le Grand Mail, Font Del Z... à Montpellier (34000) ; M. Y..., demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande tendant à l'obtention d'une carte de séjour, d'autre part, l'a condamné à une amende de 3 000 F pour requête jugée abusive ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bordry, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Monod, avocat de M. Lahssen Y...,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que pour rejeter la requête de M. Y... le tribunal administratif, après avoir sursis à statuer jusqu'à ce que le juge pénal se soit prononcé sur l'instance en cours concernant le caractère du mariage de M. Y..., a retenu comme s'imposant à lui avec l'autorité de la chose jugée des constatations faites par le tribunal correctionnel de Montpellier au sujet du caractère du mariage de M. Y... avec Mlle X..., dans le jugement du 3 mars 1992 qui a relaxé M. Y... des fins de la poursuite sur le chef d'accusation d'obtention indue d'un livret de famille à la suite de fausses déclarations ;
Considérant que l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux juridictions administratives en ce qui concerne les constatations de fait que les juges ont retenues que si elles sont le support nécessaire de leur décision ;
Considérant que le jugement de relaxe est fondé sur ce que, en déclarant le lien conjugal pour obtenir un livret de famille l'auteur n'a pas fait une fausse déclaration dans la mesure où "le lien conjugal existe et qu'il n'est ni prétendu ni justifié qu'il ait été annulé ou qu'une instance en annulation soit en cours" ; que si les juges ont estimé que le mariage de M. Y... et de Mlle X... était un mariage blanc, ils ont reconnu que ce fait n'était pas celui poursuivi ; que dès lors les constatations relatives au mariage blanc ne sont pas le support nécessaire de la décision ; que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce que ces constatations étaient revêtues de l'autorité de la chose jugée pour rejeter la requête de M. Y... ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les moyens invoqués par M. Y... en première instance ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi du 2 août 1989 : "La carte de résident est délivrée de plein droit sans que puissent être opposées les dispositions des articles 6 et 9 de la présente ordonnance, 1°/ au conjoint étranger d'un ressortissant de nationalité française" ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. Y... ait contracté mariage avec Mlle X... dans le but exclusif d'obtenir un titre de séjour ; que dès lors le préfet ne pouvait légalement se fonder sur ce motif pour refuser de délivrer le titre de séjour qui lui était demandé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 27 novembre 1992 et la décision de refus du préfet de l'Hérault sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 150370
Date de la décision : 29/12/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

- RJ1 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - LEGALITE INTERNE - ETRANGERS NE POUVANT FAIRE L'OBJET D'UNE MESURE DE RECONDUITE A LA FRONTIERE - CONJOINT D'UN RESSORTISSANT FRANCAIS - Jugement d'un tribunal correctionnel prononçant la relaxe sur le chef d'accusation d'obtention indue d'un livret de famille à la suite de fausses déclarations - Autorité de la chose jugée - Constatation de fait qui est le support nécessaire du jugement (1) - Absence - Jugement relevant par ailleurs que le mariage en cause est un mariage blanc.

335-03-02-01-02, 54-06-06-02-02 Jugement de relaxe d'un ressortissant étranger prononcé par un tribunal correctionnel sur le chef d'accusation d'obtention indue d'un livret de famille à la suite de fausses déclarations se fondant sur ce que, en déclarant le lien conjugal pour obtenir un livret de famille, l'étranger n'a pas fait une fausse déclaration dans la mesure où "le lien conjugal existe et qu'il n'est ni prétendu, ni justifié qu'il ait été annulé ou qu'une instance en annulation soit en cours". Si les juges ont estimé par ailleurs que le mariage en cause était un mariage blanc, ils ont relevé que ce fait n'était pas celui poursuivi. Dès lors, l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'imposant aux juridictions administratives en ce qui concerne les constatations de fait que les juges ont retenues que si elles sont le support nécessaire de leur décision, les constatations relatives au mariage blanc, qui ne sont pas le support nécessaire du jugement rendu, ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée et ne s'imposent donc pas au juge administratif.

- RJ1 PROCEDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGEE - CHOSE JUGEE PAR LA JURIDICTION JUDICIAIRE - CHOSE JUGEE PAR LE JUGE PENAL - Constatation de fait qui est le support nécessaire du jugement (1) - Absence - Jugement de relaxe de la poursuite sur le chef d'accusation d'obtention indue d'un livret de famille à la suite de fausses déclarations - Jugement relevant par ailleurs que le mariage en cause est un mariage blanc.


Références :

Loi du 02 août 1989
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 15

1.

Cf. Section, 1980-03-07, S.A.R.L. Cinq-Sept et autres, p. 129


Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 1997, n° 150370
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Bordry
Rapporteur public ?: M. Hubert

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1997:150370.19971229
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