Vu la requête, enregistrée le 3 juin 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Maurice X... demeurant Centre Espérance, ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 février 1995 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 janvier 1995 par lequel le préfet du Val-de-Marne a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler ledit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Maïa, Auditeur,
- les observations de Me Capron, avocat de M. Maurice X...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Val-de-Marne :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a déposé le 10 août 1995 auprès du bureau d'aide juridictionnelle établi près le Conseil d'Etat une demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle afin d'interjeter appel du jugement du 6 février 1995 qui lui a été notifié le 10 juillet 1995 ; que par une décision du 27 mars 1996, notifiée à l'intéressé le 31 mai 1996, ledit bureau a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle M. X... dont la requête susvisée a été enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 3 juin 1996 et est, par suite, recevable ; qu'il suit de là que la fin de nonrecevoir opposée par le préfet du Val-de-Marne et tirée de la tardiveté de la requête de M. X..., doit être écartée ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée "les étrangers mentionnés aux 1° à 6° dudit article ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de l'ordonnance précitée" ; qu'au nombre des personnes ainsi visées figure, comme il est spécifié au 3° de l'article 25, le ressortissant étranger qui "réside régulièrement en France depuis plus de dix ans" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., de nationalité zaïroise, a séjourné en France sous couvert d'autorisations provisoires de séjour du 22 novembre 1982 au 20 octobre 1994, date à laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire en qualité de salarié ; qu'il suit de là que l'arrêté du 30 janvier 1995 par lequel le préfet du Val-de-Marne a ordonné la reconduite à la frontière de M. X... alors que celui-ci justifiait d'une résidence régulière en France depuis plus de dix ans, a méconnu les dispositions précitées de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris du 6 février 1995 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 30 janvier 1995 par lequel le préfet du Val-de-Marne a ordonné la reconduite à la frontière de M. X... est annulé.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Maurice X..., au préfet du Val-deMarne et au ministre de l'intérieur.