La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/12/1997 | FRANCE | N°185971

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 29 décembre 1997, 185971


Vu la requête enregistrée le 4 mars 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et présentée par M. Mohamed Y..., demeurant chez M. Slimane Y..., ... ; M. Y... demande au Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 décembre 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre les arrêtés du 9 décembre 1996 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de renvoi ;
2°) de prononcer

l'annulation de ces arrêtés pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du ...

Vu la requête enregistrée le 4 mars 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat et présentée par M. Mohamed Y..., demeurant chez M. Slimane Y..., ... ; M. Y... demande au Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 décembre 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre les arrêtés du 9 décembre 1996 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de renvoi ;
2°) de prononcer l'annulation de ces arrêtés pour excès de pouvoir ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. Y... s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 26 juillet 1996, de la décision du 24 juillet 1996 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un certificat de résidence en qualité de travailleur salarié et l'a invité à quitter le territoire ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 3° de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que le recours gracieux formé le 13 août 1996 par M. Y... contre la décision susmentionnée du 24 juillet 1996 n'ayant pas de caractère suspensif, la circonstance que l'arrêté attaqué du 9 décembre 1996 soit intervenu avant que le préfet de la Seine-Saint-Denis ait statué sur ce recours n'entache pas d'illégalité ledit arrêté ;
Sur la légalité externe de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant que, par un arrêté du 15 avril 1996, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné à M. X..., sous-préfet, chargé de mission et de l'arrondissement de Bobigny, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que M. X... n'aurait pas été compétent pour signer l'arrêté attaqué manque en fait ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers : "Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, sous réserve des nécessités de l'ordre public et de la conduite des relations internationales, et exception faite du cas où il est statué sur une demande présentée par l'intéressélui-même, les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter des observations écrites" ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et notamment des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours, et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite et, par suite, exclure l'application des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983, dont M. Y... ne peut, dès lors, utilement se prévaloir ;
Considérant que l'arrêté du 13 décembre 1996 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a ordonné la reconduite à la frontière de M. Y..., comporte l'énoncé des éléments de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ; que, par suite, il est suffisamment motivé ;
Sur la légalité interne de l'arrêté de reconduite :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation familiale et personnelle de M. Y... ;
Considérant que le moyen tiré des risques encourus par l'intéressé en cas de retour en Algérie est inopérant à l'encontre de l'arrêté décidant sa reconduite à la frontière ;
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 9 décembre 1996, distinct de l'arrêté du même jour ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y..., le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé que l'intéressé serait éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ;
Considérant que, pour demander l'annulation de cet arrêté, M. Y... a fait valoir qu'en raison des risques que lui ferait encourir son retour dans son pays d'origine, la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'eu égard aux attestations qui'l a produites, M. Y... doit être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme établissant la réalité des risques auxquels il serait exposé en cas de retour en Algérie ; que cette circonstance est de nature à faire légalement obstacle à sa reconduite à destination du pays dont il a la nationalité ;
Article 1er : Le jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 13 décembre 1996 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. Y... dirigées contre la décision du 9 décembre 1996 fixant l'Algérie comme pays de renvoi. Ladite décision du 9 décembre est annulée.
Article 2 : Le surplus de la requête susvisée de M. Y... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Mohamed Y..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 3
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis


Publications
Proposition de citation: CE, 29 déc. 1997, n° 185971
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M GENTOT
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Formation : President de la section du contentieux
Date de la décision : 29/12/1997
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 185971
Numéro NOR : CETATEXT000007969372 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1997-12-29;185971 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award