Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE enregistré le 3 février 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 2 juillet 1992 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande des consorts Y..., la décision du 12 octobre 1988 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Sarthe statuant sur leur réclamation ;
2°) rejette la demande présentée par les consorts Y... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Keller, Auditeur,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 211 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf disposition contraire, les jugements, les ordonnances et arrêts sont notifiés par les soins du greffe à toutes les parties en cause, à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice" ; qu'aux termes de l'article R. 229 du même code : "Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues à l'article R. 211. Si le jugement a été signifié par huissier de justice, le délai court à dater de cette signification à la fois contre la partie qui l'a faite et contre celle qui l'a reçue" ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que, contrairement à ce que soutient le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, l'une des deux parties a la faculté de faire signifier un jugement du tribunal administratif à une autre partie à l'instance et que cette signification fait courir le délai d'appel contre la partie qui l'a reçue ;
Considérant que si le ministre fait valoir que l'acte par lequel le jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 juillet 1992 a été signifié ne comportait pas le nom et la qualité de l'agent qui l'a reçu, il ne conteste pas que la signification est parvenue dans les services du ministère le 8 juin 1993 ; que cette date constitue le point de départ du délai de recours contre ce jugement ; que le recours du ministre n'a été enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat que le 3 février 1994 ; que, dès lors, il a été présenté tardivement et n'est, par suite, pas recevable ;
Considérant qu'aux termes de l'article 57-2 du décret du 30 juillet 1963 modifié : "Dans le cas d'une requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 20 000 F" ; que la faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions des consorts Y... tendant à ce que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE soit condamné à une telle amende ne sont pas recevables ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer aux consorts Y... une somme de 5 000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera aux consorts Y... la somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions des consorts Y... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'agriculture et de la pêche, à Mme Claudette Y..., à Mlle Yveline Y..., à Mme Nicole X..., à M. Denis Y... et à M. Joël Y....