Vu la requête du PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 14 octobre 1996 ; le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 13 septembre 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande de M. Moungi X..., l'arrêté du 3 juin 1996 décidant la reconduite à la frontière de celui-ci ainsi que l'arrêté du 11 septembre 1996, fixant le pays où l'intéressé serait reconduit, en tant qu'ils ordonnent sa reconduite vers l'Algérie ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Marseille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Peignot, Garreau, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement en date du 13 septembre 1996, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Marseille a annulé les arrêtés des 3 juin et 11 septembre 1996 par lesquels le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE a, d'une part, décidé la reconduite à la frontière de M. Moungi X... et d'autre part, fixé l'Algérie comme pays de renvoi de l'intéressé, en tant que ces arrêtés ordonnent la reconduite de l'intéressé en Algérie ; que le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE, pour demander l'annulation de ce jugement, soutient que le tribunal ne pouvait légalement remettre en cause l'appréciation portée par la commission des recours des réfugiés sur les risques encourus par M. X... en Algérie, la contestation d'une telle appréciation relevant, par la voie du recours en cassation, de la compétence du Conseil d'Etat statuant au contentieux ;
Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger qui a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou de reconduite à la frontière de s'assurer, sous le contrôle du juge, en application du deuxième alinéa de l'article 27 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, si l'autorité administrative compétente est en droit de tenir compte, à cet effet, des décisions qu'ont prises, le cas échéant, l'office français des réfugiés et apatrides ou la commission des recours des réfugiés saisis par l'étranger de demandes de titre de réfugié politique, l'examen par ces dernières instances, au regard des conditions mises à la reconnaissance du statut de réfugié par la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967, des faits allégués par le demandeur d'un tel statut et des craintes qu'il énonce, et l'appréciation portée sur eux, en vue de l'application de ces conventions, ne lient pas cette autorité et restent sans influence sur l'obligation qui est la sienne de vérifier, au vu du dossier dont elle dispose, que les mesures qu'elle prend ne méconnaissent pas les dispositions susévoquées de l'article 27 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 ;
Considérant que le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE soutient en outre, dans son mémoire en réplique, que, même si M. X... est fils de harki, les faits allégués par l'intéressé ne sont pas établis et qu'ils ne constituent, en tout état de cause, que de simples brimades, et non des traitements inhumains et dégradants, enfin que l'intéressé n'encourt dans son pays ni privation de liberté, ni condamnation ; que ces moyens, qui sont fondés sur une cause juridique distincte du seul moyen figurant dans la requête, et qui ont été présentés par le préfet après l'expiration du délai de recours contre le jugement attaqué, ne sont pas recevables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé les arrêtés précités des 3 juin et 11 septembre 1996, en tant qu'ils fixent l'Algérie comme pays de reconduite ;
Article 1er : La requête susvisée du PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES ALPES-DE-HAUTE-PROVENCE, à M. Moungi X... et au ministre de l'intérieur.