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13/03/1998 | FRANCE | N°110841

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 13 mars 1998, 110841


Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES (M.R.A.P.), dont le siège social est ... (75543), représenté par ses représentants légaux ; le MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES demande l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire du 2 août 1989 relative à l'application de la loi n° 89-548 du 2 août 1989, relative aux conditions de séjour et d'entrée des étrangers en France ;
Vu les autres pièces du dossier ;> Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par la loi n° 89-548 du 2 ...

Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour le MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES (M.R.A.P.), dont le siège social est ... (75543), représenté par ses représentants légaux ; le MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES demande l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire du 2 août 1989 relative à l'application de la loi n° 89-548 du 2 août 1989, relative aux conditions de séjour et d'entrée des étrangers en France ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée par la loi n° 89-548 du 2 août 1989 ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de la Verpillière, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES (M.R.A.P.),
- les conclusions de M. Girardot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision en date du 23 janvier 1991 postérieure à l'introduction de la requête, le Conseil d'Etat statuant au Contentieux a annulé le 5-2 du paragraphe 5 "Régimes Spéciaux" du titre I de la deuxième partie de la circulaire contestée ; qu'ainsi, les conclusions de la requête du MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES (M.R.A.P.) dirigées contre ces dispositions sont devenues sans objet ;
Considérant que la légalité de la circulaire attaquée doit être appréciée au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945, relative aux conditions de séjour et d'entrée des étrangers en France, dans sa rédaction résultant de la loi du 2 août 1989 ;
Considérant que le dernier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose : "En aucun cas, le refus d'entrée ne peut donner lieu à une mesure de rapatriement contre le gré de l'intéressé avant l'expiration du délai d'un jour franc" ; que le passage contesté de la circulaire du 2 août 1989 énonce : "Dans la pratique, cette disposition ne concerne que les décisions de refoulement aux frontières aériennes ou maritimes, aucune mesure de rapatriement n'étant nécessaire pour mettre à exécution une décision de refus d'entrée à la frontière terrestre" ; que, ce faisant, le ministre de l'intérieur n'a fait que se conformer aux termes précités des dispositions de l'ordonnance sans énoncer de règle nouvelle qui serait étrangère auxdites dispositions ;
Considérant que l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose : "Peut être maintenu, s'il y a nécessité absolue, par décision écrite motivée du préfet dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pendant le temps strictement nécessaire à son départ, l'étranger qui : 1° soit n'est pas en mesure de déférer immédiatement à la décision lui refusant l'autorisation d'entrer sur le territoire français ; 2° soit, faisant l'objet d'un arrêté d'expulsion, ne peut quitter immédiatement le territoire français ; 3° soit, devant être reconduit à la frontière, ne peut quitter immédiatement le territoire français" ;
Considérant que, par les dispositions de la circulaire aux termes desquelles : "ce n'est donc que, dans certains cas qu'il y a lieu de placer l'étranger en rétention administrative, dans le cadre des dispositions de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; il s'agit notamment des cas suivants : - il n'y a pas de zone internationale délimitée à la frontière par laquelle l'étranger a cherché à pénétrer en France ; - cette personne ne peut, faute d'installations suffisantes, être laissée en zone internationale au-delà d'une certaine durée ; - il peut être craint de cette personne une tentative de quitter la zone internationale en franchissant irrégulièrement le contrôle des passeports ; - cette personne trouble l'ordre public au sein de la zone internationale ; - la fréquence des dessertes du pays où l'étranger doit être réacheminé est très faible", le ministre de l'intérieur s'est borné à donner à ses services des instructions pour l'application des dispositions législatives et réglementaires précitées, notamment en précisant certains cas particuliers auxquels ces dispositions auraient lieu de s'appliquer ; qu'ainsi le ministre n'a pas ajouté aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;

Considérant qu'aux termes de l'article 18 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Il est institué, dans chaque département, une commission du séjour des étrangers ... cette commission est saisie par le préfet lorsque celui-ci envisage de refuser : - le renouvellement d'une carte de séjour temporaire ; - la délivrance d'une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 de la présente ordonnance ; - la délivrance d'un titre de séjour à un étranger mentionné à l'article 25-1° à 6°) ..." ; que si le MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES conteste les dispositions de la circulaire susvisée qui prévoient que le préfet peut, sans saisir au préalable la commission de séjour des étrangers, refuser la délivrance d'une carte de résident à l'étranger invoquant le bénéfice de l'article 15 mais ne relevant de manière incontestable d'aucune des catégories énumérées à l'article 15, le ministre de l'intérieur n'a fait ainsi que commenter les dispositions de l'article 18 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 sans édicter de règle nouvelle qui s'ajouterait à ces dispositions ;
Considérant que l'article 18 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 prévoit les règles de procédure applicables devant la commission de séjour des étrangers ; que la section 2 du titre III de la 2ème partie de la circulaire contestée est relative à la procédure applicable devant ladite commission de séjour des étrangers ; que ces dispositions de la circulaire rappellent les règles édictées à l'article 18 bis précité sans rien ajouter à ces règles et en se limitant à les commenter ;
Considérant qu'en précisant que : "Par ailleurs, et à titre exceptionnel, il vous est également possible, dans l'hypothèse où l'avis de la commission du séjour ne vous paraîtrait pas pouvoir être suivi, de la réunir à nouveau en vue d'une nouvelle délibération ; cette procédure pourra notamment se justifier en raison de l'intervention d'événements nouveaux dans la situation de l'étranger concerné ; dans cette hypothèse, il y aura lieu cependant, en attendant le second avis de la commission, de doter l'étranger du titre de séjour qu'il a sollicité ; ce titre fera l'objet d'un retrait si le second avis de la commission est défavorable à sa délivrance", le ministre de l'intérieur s'est borné à indiquer aux préfets qu'ils ont la possibilité de solliciter une seconde délibération de la commission et à leur donner des recommandations sur les conséquences à tirer d'une telle démarche, sans édicter aucune règle nouvelle susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir ;

Considérant qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "La carte de résident est délivrée de plein droit sans que puissent être opposées les dispositions des articles 6 et 9 de la présente ordonnance : ... 11° à l'apatride justifiant de trois années de résidence régulière en France ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ; 12° à l'étranger qui justifie par tous moyens avoir sa résidence habituelle en France depuis plus de quinze ans ou depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ou qui est en situation régulière depuis plus de dix ans" ; que la circulaire contestée prévoit, dans les dispositions du 1-2-2-2 du paragraphe 1 du titre III de la 2ème partie, que la carte de résident est refusée à l'étranger qui invoque le bénéfice de l'article 15-11° ou 12° au cas où celui-ci ne justifie pas d'un séjour régulier sur le territoire ; que le paragraphe 11° de l'article 15 précité prévoit la condition de résidence régulière pour pouvoir bénéficier d'une carte de résident de plein droit ; que, sur ce point, les dispositions de la circulaire se bornent à commenter l'article 15-11° précité ; qu'en prévoyant que la condition de séjour régulier pouvait être opposée à l'étranger qui invoque le bénéfice de l'article 15-12°, le ministre de l'intérieur n'a pas fait obligation à l'étranger qui justifie avoir une résidence habituelle en France depuis plus de quinze ans ou depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans, d'apporter la preuve d'un séjour régulier sur le territoire, mais a seulement visé le cas de l'étranger qui est en "situation régulière depuis plus de dix ans" ; que, dans ces conditions, les dispositions de la circulaire rappellent lesrègles édictées à l'article 15-12° précité sans rien ajouter à ces règles et en se bornant à les commenter ;
Considérant que l'article 9 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose : "Les étrangers en séjour en France, âgés de plus de dix-huit ans, doivent être titulaires d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de résident ..." ; qu'en prévoyant que les étrangers, présents en France au moment où ils atteignent l'âge de dix-huit ans, disposent d'un délai de deux mois pour présenter une demande de titre de séjour, le ministre s'est borné à édicter une mesure gracieuse que le MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES n'est pas recevable à contester ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les différentes dispositions cidessus analysées de la circulaire attaquée ne font pas grief au mouvement requérant, qui n'est, dès lors, pas recevable à en demander l'annulation ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre le 5-2 du paragraphe 5 "Régimes spéciaux" du titre I de la deuxième partie de la circulaire contestée.
Article 2 : Le surplus des conclusions du MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MOUVEMENT CONTRE LE RACISME ET POUR L'AMITIE ENTRE LES PEUPLES et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS.


Références :

Circulaire du 02 août 1989 décision attaquée confirmation
Loi 89-548 du 02 août 1989
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 5, art. 35 bis, art. 18 bis, art. 15, art. 9


Publications
Proposition de citation: CE, 13 mar. 1998, n° 110841
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. de la Verpillière
Rapporteur public ?: M. Girardot

Origine de la décision
Formation : 6 / 2 ssr
Date de la décision : 13/03/1998
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 110841
Numéro NOR : CETATEXT000008009373 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1998-03-13;110841 ?
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