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27/04/1998 | FRANCE | N°175228

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 27 avril 1998, 175228


Vu l'ordonnance en date du 22 novembre 1995 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes transmet, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée devant cette cour par Mme Mary Angela X... ;
Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 1995 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présentée par le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE ; le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE demande que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 9 septembre 1995 par lequel le conseiller délégué par

le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé, sur la...

Vu l'ordonnance en date du 22 novembre 1995 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes transmet, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée devant cette cour par Mme Mary Angela X... ;
Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 1995 au greffe de la cour administrative d'appel de Nantes, présentée par le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE ; le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE demande que la Cour :
1°) annule le jugement en date du 9 septembre 1995 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé, sur la demande de Mme X..., l'arrêté en date du 5 septembre 1995 ordonnant la reconduite à la frontière de celle-ci et, par voie de conséquence l'arrêté du même jour désignant le Sri Lanka comme pays de destination ;
2°) rejette la demande, présentée par Mme X..., devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son article 8 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Balmary, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X..., de nationalité sri-lankaise est mariée depuis le 6 mars 1995 à un compatriote bénéficiant du statut de réfugié politique et titulaire d'un titre de séjour et a deux frères, vivant en France, qui ont obtenu le même statut ; que, toutefois, il résulte des pièces du dossier que, compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment de la durée du séjour de l'intéressée en France, et du caractère récent de l'union contractée, alors que Mme X... ne soutient pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, l'arrêté du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE en date du 5 septembre 1995 ordonnant sa reconduite à la frontière n'a pas, eu égard aux effets d'une telle mesure, porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; qu'ainsi, c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans s'est fondé sur ce que ledit arrêté avait été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour en prononcer l'annulation ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Considérant que la demande d'asile de Mme X... a été rejetée par une décision en date du 7 mars 1994 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ; que le recours de Mme X... contre cette décision a été rejeté le 6 janvier 1995 par la commission des recours des réfugiés ; que Mme X... a été invitée à quitter le territoire français dans le délai d'un mois par une décision du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE du 23 mai 1995 notifiée le 2 juin 1995 ; que s'étant maintenue sur le territoire au-delà de cette durée, elle se trouvait dans le cas prévu par l'article 22-I-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut prendre une mesure d'éloignement ;
Considérant, toutefois, que les stipulations de l'article 31-2 de la convention de Genève et les dispositions de la loi du 21 juillet 1952 impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ; que l'article 31 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dispose que : "L'admission en France d'undemandeur d'asile ne peut être refusée que si : ... 4° la demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente ..." ;

Considérant que Mme X... soutient avoir saisi le 17 juillet 1995 l'office français de protection des réfugiés et apatrides d'une nouvelle demande accompagnée de pièces qui ne lui avaient pas été soumises antérieurement et qui selon elle était de nature à établir les faits dont elle se prévalait ; que le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE n'apporte aucun élément de nature à démontrer et d'ailleurs n'allègue même pas que cette nouvelle démarche aurait pour objet de faire échec, dans un but dilatoire, à une mesure de reconduite à la frontière ; que, par suite, le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE en ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... a entaché sa décision d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET D'INDRE-ETLOIRE n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans ait annulé ses décisions en date du 5 septembre 1995 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... et désignant le Sri-Lanka comme pays de destination ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à verser à Mme X... la somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête susvisée du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE est rejetée.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme X... la somme de 5 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Mary Angela X..., au PREFET D'INDRE-ET-LOIRE et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 175228
Date de la décision : 27/04/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 05 septembre 1995
Convention du 28 juillet 1951 Genève réfugiés art. 31
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 52-893 du 25 juillet 1952
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 31 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 1998, n° 175228
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Balmary
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:175228.19980427
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