Vu 1°/, sous le n° 184473, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 1996 et 18 avril 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard H... de Saint Cyr, demeurant ..., Mme Nelly P..., demeurant ..., l'ASSOCIATION FRANCAISE DES MEDECINS ESTHETICIENS, dont le siège social est ..., M. Gilbert X..., demeurant ..., M. Benjamin Y..., demeurant ..., M. Patrick Z..., demeurant ..., M. Henri-Marc A..., demeurant ..., M. Martial B..., demeurant ..., Mme Catherine C..., demeurant 1, place de la Porte de Passy à Paris (75016), M. Thierry D..., demeurant ..., M. Victor E..., demeurant ..., M. Alain F..., demeurant ..., M. Jean-Baudoin G..., demeurant ..., M. Pierre-Alain J..., demeurant ..., M. Denis K..., demeurant ..., M. Maurice L..., demeurant ..., M. Gérard M..., demeurant ..., M. Alain N..., demeurant Corniche John XW... à Marseille (13007), M. Hugues Q..., demeurant ..., M. Guy R..., demeurant ..., M. Jean-Claude S..., demeurant ..., M. Laurent T..., demeurant ..., M. Gary U..., demeurant ..., M. Claude XX..., demeurant ..., M. Serge XY..., demeurant ..., M. Jean XA..., demeurant ..., M. Michel XB..., demeurant ..., M. Bernard XD..., demeurant ..., M. Thomas XC..., demeurant ..., M. Louis XE..., demeurant ..., M. Xavier XF..., demeurant ..., M. Jacques XG..., demeurant ..., M. Sydney XG..., demeurant ..., Mme Isabelle XH..., demeurant ..., M. B. XI..., demeurant ..., M. Rami V...
XJ..., demeurant ..., M. Bernard XK..., demeurant ..., M. Sylvain XL..., demeurant ..., M. Gilbert XM..., demeurant ... et M. B. XN..., demeurant ... ; M. H... de Saint Cyr et autres demandent au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 17 octobre 1996 du ministre délégué aux finances et au commerce extérieur relatif à la publicité des prix des actes médicaux et chirurgicaux à visée esthétique ;
Vu 2°/, sous le n° 184557, la requête, enregistrée le 24 décembre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Luc XZ..., demeurant ... ; M. XZ... demande au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 17 octobre 1996 du ministre délégué aux finances et au commerce extérieur relatif à la publicité des prix des actes médicaux et chirurgicaux à visée esthétique ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution, et notamment son article 34 ;
Vu le code civil ;
Vu le code de la consommation ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ;
Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lafouge, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. Bernard I... et autres,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre l'arrêté du ministre délégué aux finances et au commerce extérieur du 17 octobre 1996 relatif à la publicité des prix des actes médicaux et chirurgicaux à visée esthétique ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les moyens dirigés contre l'arrêté attaqué pris dans son ensemble :
Sur la compétence :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 113-3 du code de la consommation: "Tout vendeur de produit ou tout prestataire de services doit, par voie de marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre procédé approprié, informer le consommateur sur les prix, les limitations éventuelles de la responsabilité contractuelle et les conditions particulières de la vente, selon des modalités fixées par arrêtés du ministre chargé de l'économie, après consultation du Conseil national de la consommation" ;
Considérant, d'une part, que par décret du 28 novembre 1995, publié au Journal officiel le 29 novembre 1995, le ministre de l'économie et des finances a confié à M. Yves O..., ministre délégué aux finances et au commerce extérieur, l'exercice des attributions relatives notamment à la consommation et lui a donné délégation pour signer, en son nom, tous actes, arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions ; qu'il suit de là que le ministre délégué aux finances et au commerce extérieur était compétent pour signer l'arrêté attaqué pris en application des dispositions précitées du code de la consommation ;
Considérant, d'autre part, qu'aucune disposition n'exigeait que l'arrêté attaqué fût signé également par le ministre chargé de la santé ;
Sur le moyen tiré du défaut de base légale :
Considérant que l'article L. 113-3 du code de la consommation s'applique à toutes les activités entrant dans le champ d'application de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, c'est-à-dire "à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnnes publiques, notamment dans le cadre de conventions de délégation de service public" ;
Considérant que l'obligation d'information du consommateur instituée au premier alinéa de l'article L. 113-3 est mise à la charge de tous les prestataires de services, sans considération du caractère commercial ou libéral de leur activité et concerne notamment les prestations à caractère médical ; que l'arrêté attaqué a donc été légalement pris sur le fondement de l'article L. 113-3 ;
Sur le moyen tiré de l'illégalité des dispositions de l'arrêté relatives à l'établissement d'un devis :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 55 du code de déontologie médicale tel qu'il résulte du décret du 6 septembre 1995 : "Le forfait pour l'efficacité d'un traitement et la demande d'une provision sont interdits en toutes circonstances" ; que le premier alinéa de l'article 1er de l'arrêté attaqué dispose que : "Pour toute prestation à visée esthétique, dont le montant estimé est supérieur ou égal à 2 000 F ou comportant une anesthésie générale, le praticien remet un devis détaillé" ; que l'obligation ainsi mise à la charge despraticiens réalisant des prestations à visée esthétique de remettre à leur client un devis, lequel ne porte que sur un prix estimatif, n'a pas eu pour objet et ne saurait légalement avoir pour effet de contraindre ces praticiens à se faire rémunérer au moyen d'un forfait, en méconnaissance de l'article 55 du code de déontologie ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'obligation édictée par l'arrêté attaqué ne concerne que les prestations à visée esthétique effectuées en dehors de toute considération d'urgence thérapeutique, à l'exclusion notamment des interventions à visée réparatrice, et ne met à la charge des praticiens aucune obligation de résultat ; que, par suite, le ministre chargé de la consommation n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que l'obligation résultant de l'article L. 113-3 du code de la consommation justifiait la remise d'un devis préalable ;
Considérant, en troisième lieu, que les médecins ou chirurgiens qui effectuent des prestations à visée esthétique non prises en charge par l'assurance maladie et dont les honoraires sont fixés librement, ne sont pas, au regard des modalités qui permettent de s'acquitter de l'obligation d'informer le consommateur prescrite par l'article L. 113-3 du code de la consommation, dans une situation de fait et de droit identique à celle des autres praticiens ; que, dans ces conditions, en leur imposant la remise d'un devis à leur client, le ministre n'a pas méconnu le principe d'égalité ; que les médecins et chirurgiens qui effectuent des prestations à visée esthétique ne sont pas dans la même situation que les esthéticiens non médecins ; que la circonstance que l'arrêté attaqué ne s'applique pas à cette seconde catégorie de professionnels ne méconnaît pas davantage le principe d'égalité ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article 261 du code général des impôts :
Considérant que l'article 2 de l'arrêté attaqué prévoit notamment que le devis détaillé doit mentionner "la somme globale à payer, TTC" ; que cette disposition n'a pas pour objet de soumettre à la taxe à la valeur ajoutée des prestations exonérées de cette taxe en vertu de l'article 261 du code général des impôts, mais seulement de rappeler aux praticiens que les prix des prestations et fournitures figurant au devis doivent inclure la taxe à la valeur ajoutée lorsqu'elles y sont assujetties ;
Sur le moyen tiré de l'illégalité des dispositions relatives au délai de réflexion :
Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : "La loi détermine les principes fondamentaux : (...) des obligations civiles et commerciales" ;
Considérant que l'arrêté attaqué prévoit, au paragraphe 9 de son article 2, que tout devis doit comporter les phrases suivantes : "Il est convenu que doit être respecté un délai minimum de quinze jours entre la remise de ce document et l'intervention éventuelle. C'est un délai de réflexion avant toute décision, pour le praticien comme pour la personne examinée. Pendant cette période, il ne peut être exigé ou obtenu de la personne examinée, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit ni sous quelque forme que ce soit, une contrepartie quelconque ni aucun engagement, à l'exception du prix de la présente consultation. / Ce délai peut toutefois être réduit à sept jours, à la demande expresse de la personne examinée qui devra mentionner elle-même, de manière manuscrite et signée, cette demande sur le présent devis" ;
Considérant que l'obligation faite par ces dispositions au praticien et à la personne examinée de respecter un délai minimum de réflexion avant la décision éventuelle d'intervention, porte atteinte au principe de la liberté contractuelle et excède l'habilitation donnéepar l'article L. 113-3 du code de la consommation au ministre chargé de l'économie ; qu'aucune autre disposition législative n'autorisait ce ministre à prendre de telles dispositions, qui sont, par suite, entachées d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler les dispositions du paragraphe 9 de l'article 2 de l'arrêté attaqué relatives au délai de réflexion, lesquelles ne forment pas avec les autres dispositions de cet arrêté un ensemble indivisible et de rejeter le surplus des conclusions des requêtes ;
Article 1er : Le paragraphe 9 de l'article 2 de l'arrêté du 17 octobre 1996 relatif à la publicité des prix des actes médicaux et chirurgicaux à visée esthétique est annulé en tant qu'il prévoit que tout devis doit comporter un délai préalable et obligatoire de réflexion avant la décision éventuelle d'intervention.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Bernard H... de Saint Cyr, à Mme Nelly P..., à l'ASSOCIATION FRANCAISE DES MEDECINS ESTHETICIENS, à M. Gilbert X..., à M. Benjamin Y..., à M. Patrick Z..., à M. Henri-Marc A..., à M. Martial B..., à Mme Catherine C..., à M. Thierry D..., à M. Victor E..., à M. Alain F..., à M. Jean-Baudoin G..., à M. Pierre-Alain J..., à M. Denis K..., à M. Maurice L..., à M. Gérard M..., à M. Alain N..., à M. Hugues Q..., à M. Guy R..., à M. Jean-Claude S..., à M. Laurent T..., à M. Gary U..., à M. Claude XX..., à M. Serge XY..., à M. Jean XA..., à M. Michel XB..., à M. Bernard XD..., à M. Thomas XC..., à M. Louis XE..., à M. Xavier XF..., à M. Jacques XG..., à M. Syndney XG..., à Mme Isabelle XH..., à M. B. XI..., à M. Rami V...
XJ..., à M. Bernard XK..., à M. Sylvain XL..., à M. Gilbert XM..., à M. B. XN..., à M. Jean-Luc XZ... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.