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29/04/1998 | FRANCE | N°160776

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 29 avril 1998, 160776


Vu la requête, enregistrée le 23 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par les CONSORTS X..., demeurant Chanelet à Saint-Cyr-sur-Menthon (01380) ; les CONSORTS X... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande dirigée contre, d'une part, la décision du 6 juin 1988 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier de l'Ain a statué sur la situation de leurs propriétés et, d'autre part, l'arrêté du 10 février 1989 par lequel le préfet d

e l'Ain a ordonné le dépôt en mairie du plan de remembrement de Saint-...

Vu la requête, enregistrée le 23 août 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par les CONSORTS X..., demeurant Chanelet à Saint-Cyr-sur-Menthon (01380) ; les CONSORTS X... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 1994 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande dirigée contre, d'une part, la décision du 6 juin 1988 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier de l'Ain a statué sur la situation de leurs propriétés et, d'autre part, l'arrêté du 10 février 1989 par lequel le préfet de l'Ain a ordonné le dépôt en mairie du plan de remembrement de Saint-Cyr-sur-Menthon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision et ledit arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 62-933 du 8 août 1962 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Pineau, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision de la commission départementale de l'aménagement foncier de l'Ain du 6 juin 1988 en tant qu'elle concerne la propriété de M. Prosper Hippolyte X... :
Considérant qu'aux termes de l'article 2-4 du code rural : "Les décisions prises par la commission communale peuvent être portées par les intéressés ( ...) devant la commission départementale d'aménagement foncier" ; qu'en vertu de l'article 2-7 du même code, les décisions de ladite commission départementale peuvent faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que les décisions de la commission communale ne peuvent pas être directement contestées devant le juge administratif ; qu'à supposer même qu'ils en aient reçu mandat, si les CONSORTS X... entendent contester le rejet des réclamations concernant le compte n° 14200 M de M. Prosper Hippolyte X..., ils n'ont adressé aucune réclamation à la commission départementale en ce sens ; qu'ils ne sont, par suite, pas recevables à saisir directement le juge de l'excès de pouvoir de ces conclusions ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision de la commission départementale de l'aménagement foncier de l'Ain du 6 juin 1988 en tant qu'elle concerne les propriétés des CONSORTS X... :
Sur la légalité externe :
Considérant qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 86-1415 du 31 décembre 1986 concernant la commission départementale : "Il est tenu procès-verbal des séances" ; et qu'aux termes de son article 11 : "Les intéressés présentent par écrit ( ...) leurs observations et réclamations. Sur leur demande adressée par écrit au président de cette commission, ils sont entendus par celle-ci. ( ...) les observations et réclamations adressées par écrit sont inscrites sur un registre d'ordre et il en est donné récépissé. Il est tenu procès-verbal des dires des intéressés" ; qu'en application de ces dispositions, M. Prosper Jean-Marie X... a été entendu en son nom et celui de son épouse par la commission départementale d'aménagement foncier de l'Ain, en séance, le 25 février 1988 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure à l'issue de laquelle la commission a pris la décision du 6 juin 1988 ait été irrégulière ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions susmentionnées que les décisions de la commission communale ne peuvent pas être directement contestées devant le juge administratif ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les CONSORTS Y... adressé une réclamation à la commission départementale concernant la suppression d'une servitude de passage au lieudit "Bois de Cormorey" ; qu'ils ne sont, par suite, pas recevables à saisir directement le juge de l'excès de pouvoir de ces conclusions ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 19 du code rural alors applicable : "Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcellées et dispersées. Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes percelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis ( ...) Sauf accord des propriétaires et exploitants intéressés, le nouveau lotissement ne peut allonger la distance moyenne des terres au centre d'exploitation principal, si ce n'est dans la mesure nécessaire au regroupement parcellaire" ; qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 8 août 1962 : "Toutefois, sont autorisées les dérogations aux dispositions de l'article 19 du code rural qui seraient rendues inévitables en raison de l'implantation de l'ouvrage et des caractéristiques de la voirie mise en place à la suite de sa réalisation" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du plan de situation, que l'éloignement de leur centre d'exploitation dont se plaignent les requérants soit excessif, alors que la distance moyenne est passée de 1949 mètres à 900 mètres pour le compte n° 1400 M et est sans changement pour le compte n° 1400 C ; que le léger allongement constaté pour le compte n° 1400 F n'est pas de nature à entacher la décision litigieuse d'illégalité dès lors que ce compte a bénéficié d'un bon regroupement parcellaire ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 21 du même code : "Chaque propriétaire doit recevoir, par la nouvelle distribution, une superficie globale équivalente, en valeur de productivité réelle, à celle des terrains qu'il a apportés, déduction faite de la surface nécessaire aux ouvrages collectifs visés à l'article 25 ..." ; qu'il résulte des dispositions précitées que si la loi ne garantit aux propriétaires ni une égalité absolue entre la surface et la productivité des terres qui leur sont attribuées et celles de leurs apports, ni une équivalence parcelle par parcelle ou classe par classe entre ces terres, les modifications appréciées compte par compte qui sont apportées à la répartition des terres ne doivent pas entraîner un grave déséquilibre dans les conditions d'exploitation ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des fiches de répartition concernant les comptes que les requérants ont reçu respectivement pour le compte n° 1400 M 6 ha 84 a 40 ca valant 56 498 points en échange d'apports réduits de 6 ha 75 a 69 ca d'une valeur de 53 991 points, pour le compte n° 1400 C 29 a 45 ca valant 2 503 points en échange d'apports réduits de 28 a 86 ca d'une valeur de 2 491 points, enfin, pour le compte n° 1400 F 11 ha 55 a 60 ca valant 92 291 points en échange de 11 ha 50 a 47 ca d'une valeur de 92 050 points ; qu'ainsi, la légère augmentation de superficie s'est accompagnée dans les trois cas d'un gain en valeur de productivité ; que si les requérants ont reçu moins de terres dans certaines classes et plus de terres dans des classes inférieures qu'ils n'en avaient apportées ni le glissement ainsi réalisé dans la répartition des terres, ni le faible accroissement en superficie des attributions ne révèlent en l'espèce un grave déséquilibre dans les conditions d'exploitation des trois comptes ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de l'Ain du 10 février 1989 ordonnant le dépôt en mairie du plan de remembrement de Saint-Cyr-sur-Menthon :
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi n° 62-933 du 8 août 1962 telle que modifiée par les lois n° 67-1253 du 30 décembre 1967 et n° 80-502 du 4 juillet 1980 : "Lorsque les expropriations en vue de la réalisation des aménagements ou ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature sontsusceptibles de compromettre la structure des exploitations dans une zone déterminée, l'obligation sera faite au maître de l'ouvrage ( ...) de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations de remembrement ( ...) lorsqu'un remembrement est réalisé en application du présent article, les dispositions du chapitre III du titre Ier du livre Ier du code rural sont applicables ; qu'en vertu de l'article 22 du code rural alors applicable, le préfet de département ordonne le dépôt et l'affichage du plan définitif de remembrement ; que son arrêté est soumis aux règles d'édiction et de publicité prévues à l'article 30 du décret n° 86-1415 du 31 décembre 1986 ;
Considérant, d'une part, que la circonstance que l'arrêté du 10 février 1989 ne mentionne pas les délais et voies de recours conformément au décret du 11 janvier 1965 tel qu'il a été modifié par le décret du 28 novembre 1983 et, d'autre part, le fait qu'à la date de son intervention, tous les litiges concernant les opérations de remembrement n'étaient pas réglés, sont sans incidence sur la légalité de cet arrêté ;
Considérant que l'arrêté attaqué a été pris sur le fondement des dispositions législatives susmentionnées ; que, dès lors, le moyen tiré de que cet arrêté aurait méconnu le principe constitutionnel du droit de propriété posé à l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle se réfère la Constitution du 4 octobre 1958, est inopérant ; que l'article 545 du code civil ne saurait faire obstacle à l'application des dispositions législatives relatives au remembrement ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les CONSORTS X... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes ;
Article 1er : La requête des CONSORTS X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée aux CONSORTS X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 160776
Date de la décision : 29/04/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

03-04 AGRICULTURE, CHASSE ET PECHE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE.


Références :

Code civil 545
Code rural 2-4, 2-7, 19, 21, 22
Décret 65-29 du 11 janvier 1965
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983
Décret 86-1415 du 31 décembre 1986 art. 10, art. 30
Loi 62-933 du 08 août 1962 art. 10
Loi 67-1253 du 30 décembre 1967
Loi 76-629 du 10 juillet 1976 art. 2
Loi 80-502 du 04 juillet 1980


Publications
Proposition de citation : CE, 29 avr. 1998, n° 160776
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pineau
Rapporteur public ?: M. Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:160776.19980429
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