Vu 1°) sous le n° 179 784, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 7 mai et 6 septembre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES, dont le siège est ... représenté par son président en exercice ; le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 février 1996 par lequel le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et le ministre délégué au budget ont modifié, pour les années 1991 à 1995, les conditions d'établissement de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne ;
2) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 50 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu, 2°) sous le n° 180959, la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 juin et 28 octobre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES ; le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES demande l'annulation pourexcès de pouvoir de l'arrêté du 16 avril 1996, par lequel le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et le ministre délégué au budget ont fixé le champ d'application et les taux unitaires de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'aviation civile ;
Vu l'article 97 de la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Struillou, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 134-4 du code de l'aviation civile : "Les services rendus par l'Etat pour la sécurité de la circulation aérienne et pour la rapidité de ses mouvements à l'arrivée et au départ des aérodromes dont l'activité dépasse un certain seuil donnent lieu à rémunération sous forme d'une redevance pour services rendus dite redevance pour services terminaux de la circulation aérienne. -La liste de ces aérodromes est fixée par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des finances ... (Le montant de la redevance) est déterminé en fonction de la masse maximum au décollage de l'aéronef, par application d'un taux unitaire, suivant des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des finances. Le taux unitaire normal doit tenir compte du coût national du service rendu ...." ;
Considérant, que par un arrêté du 21 février 1996, modifiant les conditions d'établissement de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et le ministre délégué au budget ont fixé rétroactivement pour les années 1991 à 1995, en application de l'article 97 de la loi de finances pour 1996, n° 95-1346 du 30 décembre 1995, le seuil d'activité et la liste des aérodromes, ainsi que les taux de la redevance, prévus par l'article R. 134-4 du code de l'aviation civile précité ; que, par un arrêté du 16 avril 1996, fixant le champ d'application etles taux unitaires de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, les mêmes ministres ont fixé pour l'année 1996 la liste des aérodromes et les taux de la redevance, prévus par le même article ;
Considérant que les deux requêtes par lesquelles le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés ci-dessus analysés des 21 février et 16 avril 1996, présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité de ces requêtes :
Considérant qu'en l'absence, dans les statuts d'une association ou d'un syndicat, de stipulation réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif, celle-ci est régulièrement engagée par l'organe tenant des mêmes statuts le pouvoir de représenter en justice cette association ou ce syndicat ;
Considérant qu'aux termes de l'article 15 des statuts du SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES : "Le président représente le syndicat dans tous les actes vis-à-vis des tiers et des administrations et en justice" ; qu'aucune autre stipulation des statuts ne réserve à un autre organe le pouvoir de décider d'engager une action en justice au nom du syndicat ; qu'ainsi, le président du SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES avait qualité pour former, au nom de cette organisation, les recours pour excès de pouvoir dirigés contre les arrêtés ci-dessus mentionnés des 21 février et 16 avril 1996 ;
Sur la légalité des arrêtés attaqués :
En ce qui concerne la compétence des signataires de ces arrêtés :
Considérant que, par un arrêté du 16 novembre 1995, publié au Journal officiel du 22 novembre 1995, le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme a donné délégation à M. A..., directeur de la navigation aérienne, pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. Y..., directeur général de l'aviation civile, et dans la limite de ses attributions, tous actes et arrêtés, à l'exclusion des décrets ; que, par un arrêté du 26 décembre 1995, publié au Journal officiel du 29 décembre 1995, le ministre délégué au budget a donné délégation à M. B..., sous-directeur à la direction du budget, pour signer, dans la limite de ses attributions, en cas d'absence ou d'empêchement de M. X..., directeur du budget, et de M. C..., chef de service, tous actes et arrêtés, à l'exclusion des décrets ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que MM. Y..., X... et C... n'aient pas été absents ou empêchés lorsque MM. Z... et B... ont signé les arrêtés attaqués ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de MM. Z... et B... pour signer ces arrêtés doit être écarté ;
En ce qui concerne la fixation, par l'arrêté du 21 février 1996, du seuil d'activité des aérodromes :
Considérant que l'article 2 de l'arrêté du 21 février 1996 fixe un seuil de 5 000 "unités de service", calculées en fonction de la masse maximale au décollage des aéronefs, au-delà duquel les aérodromes entrent dans le champ d'application de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ce seuil aurait étéfixé à un niveau manifestement insuffisant ; que les "unités de service" retenues, par l'arrêté du 21 février 1996, étant des unités taxables, le seuil de 5 000 unités de services ne doit pas tenir compte, contrairement à ce que soutient le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES, des vols d'aéronefs militaires non soumis à la redevance ; que le fait que, pour certains aérodromes, les services terminaux de la circulation aérienne sont partiellement rendus par l'organisme gestionnaire de l'aérodrome et font l'objet d'une facturation spécifique aux compagnies aériennes, est sans influence sur la légalité de l'arrêté attaqué qui fixe le seuil d'application de la redevance rémunérant les services terminaux de la circulation aérienne rendus par l'Etat ;
En ce qui concerne la liste des aérodromes où la redevance est applicable :
Considérant que l'inclusion dans cette liste, telle qu'elle a été fixée par les arrêtés des 21 février 1996 et 16 avril 1996, de certains aérodromes, où le contrôle d'approche est assuré par des contrôleurs militaires, n'est pas contraire aux dispositions, précitées, de l'article R. 134-4 du code de l'aviation civile, dès lors que ce service est rendu par l'Etat ; que le moyen tiré par le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES de ce que le coût des services rendus sur ces aérodromes aux vols d'aéronefs militaires serait pris en compte dans le calcul des taux de la redevance et mis illégalement à la charge des compagnies aériennes, est inopérant au soutien d'une contestation portant sur le principe de l'inclusion desdits aérodromes dans la liste prévue par l'article R. 134-4 ;
En ce qui concerne les taux de la redevance :
Considérant que les arrêtés des 21 février 1996 et 16 avril 1996 tiennent compte, pour le calcul des taux de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, des coûts afférents au balisage lumineux des pistes, aux services de sécurité d'incendie et de sauvetage et à diverses installations affectées à la gendarmerie ; qu'il ne résulte pas des explications fournies par le ministre chargé des transports que les coûts pris en compte au titre du balisage lumineux sont exclusivement ceux des signaux permettant l'approche des aéronefs ; que les services rendus par les services de sécurité d'incendie et de sauvetage et par la gendarmerie correspondent à des missions d'intérêt général qui incombent, par nature, à l'Etat ; qu'ainsi, les coûts de ces services ne peuvent être mis à la charge des usagers au moyen de redevances ; qu'ils n'ont donc pu être légalement inclus dans le calcul de la redevance prévue par l'article R. 134-4 du code de l'aviation civile ; qu'en outre, le ministre ne justifie pas de l'imputation à la mission "navigation aérienne" de 57 % des coûts de fonctionnement de l'Ecole nationale de l'aviation civile, en invoquant une répartition de ces coûts, tantôt au prorata des coûts "opérationnels" de la direction générale de l'aviation civile, tantôt, mais sans aucune précision sur ce point, en tenant compte des catégories de personnels formés par cette école ; que, dans ces conditions, le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES est fondé à demander l'annulation de l'article 4 de l'arrêté du 21 février 1996 et de l'article 2 de l'arrêté du 16 avril 1996, qui fixent les taux de la redevance ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'Etat la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat, par application des mêmes dispositions, à payer au SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES une somme de 20 000 F, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 4 de l'arrêté du ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme et du ministre délégué au budget du 21 février 1996, modifiant les conditions d'établissement de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, ainsi que l'article 2 de l'arrêté des mêmes ministres, du 16 avril 1996, fixant le champ d'application et les taux unitaires de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, sont annulés.
Article 2 : L'Etat paiera au SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES une somme de 20 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes du SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES, ainsi que les conclusions présentées par le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT DES COMPAGNIES AERIENNES AUTONOMES, au ministre de l'équipement, des transports et du logement et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.