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08/06/1998 | FRANCE | N°177953

France | France, Conseil d'État, 10 / 7 ssr, 08 juin 1998, 177953


Vu la requête, enregistrée le 16 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 janvier 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé, en premier lieu, son arrêté du 5 octobre 1995 décidant la reconduite à la frontière de M. Unal X..., en second lieu, son arrêté du même jour fixant la Turquie comme pays de destination et, en troisième lieu, son arrêté en date du 15 janvier 1996 pl

açant l'intéressé en rétention administrative ;
2°) rejette les demandes...

Vu la requête, enregistrée le 16 février 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 17 janvier 1996 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé, en premier lieu, son arrêté du 5 octobre 1995 décidant la reconduite à la frontière de M. Unal X..., en second lieu, son arrêté du même jour fixant la Turquie comme pays de destination et, en troisième lieu, son arrêté en date du 15 janvier 1996 plaçant l'intéressé en rétention administrative ;
2°) rejette les demandes présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gounin, Auditeur,
- les conclusions de M. Combrexelle, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'arrêté du 5 octobre 1995 ordonnant la reconduite de M. X... à la frontière :
Considérant qu'aux termes des dispositions du 5ème alinéa de l'article 25 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 modifiée, ne peut faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière : "L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français résidant en France, à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins ( ...)" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 44 du code de la nationalité applicable à la date de l'arrêté attaqué : "Tout individu né en France de parents étrangers acquiert la nationalité française à sa majorité si, à cette date, il a en France sa résidence et s'il a eu, pendant les cinq années qui précèdent, sa résidence habituelle en France ..." ; qu'aux termes de l'article 54 du même code, les personnes qui exercent l'autorité parentale "si l'enfant est âgé de moins de seize ans, ... peuvent déclarer qu'elles réclament, au nom du mineur, la qualité de Français, à condition, toutefois, que le gardien de l'enfant, s'il est étranger, ait lui-même, depuis au moins cinq années, sa résidence habituelle en France ..." ;
Considérant que M. X..., de nationalité turque, père d'un enfant né en France en 1991, a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière et a été effectivement éloigné du territoire le 23 mars 1992 ; que, rentré irrégulièrement en France quelques semaines plus tard, il a souscrit, le 1er septembre 1992, auprès du tribunal d'instance, une déclaration tendant à l'acquisition de la nationalité française au nom de son fils mineur ; que, par décision du 13 juillet 1993, le ministre des affaires sociales et de l'intégration a refusé l'enregistrement de cette déclaration au motif que M. X... ne remplissait pas la condition de résidence de cinq ans en France prévue par les dispositions précitées de l'article 54 du code de la nationalité ;

Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 105 du code de la nationalité alors applicable, "La décision de refus d'enregistrement doit intervenir six mois au plus après la date à laquelle le récépissé de la déclaration a été délivré au déclarant au vu de la remise des pièces nécessaires à la preuve de la recevabilité de ladite déclaration" ; que la décision précitée du ministre des affaires sociales et de l'intégration, intervenue au-delà du délai de six mois prévu par l'article 105 précité, n'a pu faire obstacle à ce que la déclaration souscrite par M. X... le 1er septembre 1992 auprès du tribunal d'instance soit considérée comme enregistrée ; qu'ainsi, c'est à bon droit que, par son jugement en date du 17 janvier 1996, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur le fait qu'à la date à laquelle le PREFET DE L'ISERE a pris la décision litigieuse, M. X... faisait partie des personnes visées à l'article 25-5° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée interdisant de reconduire à la frontière l'étranger père d'un enfant français, pour annuler l'arrêté précité du 5 octobre 1995 ;
Sur les arrêtés du 5 octobre 1995, fixant la Turquie comme pays de destination, et du 15 janvier 1996, décidant le placement de M. X... en rétention administrative :
Considérant que, pour prendre les arrêtés du 5 octobre 1995, fixant la Turquiecomme pays de destination et du 15 janvier 1996 décidant le placement de M. X... en rétention administrative, le PREFET DE L'ISERE s'est fondé sur l'arrêté en date du 5 octobre 1995 ordonnant la reconduite de l'intéressé à la frontière ; qu'il résulte de ce qui précède que cette décision est entachée d'illégalité ; que c'est, par suite, à bon droit que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a estimé que les arrêtés litigieux du 5 octobre 1995 et du 15 janvier 1996 étant ainsi privés de base légale, il y avait lieu de les annuler ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE L'ISERE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 17 janvier 1996, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de M. X..., annulé ses trois arrêtés précités en date du 5 octobre 1995 et 17 janvier 1996 ;
Article 1er : La requête du PREFET DE L'ISERE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE, à M. Unal X... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 177953
Date de la décision : 08/06/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Code de la nationalite française 44, 54, 105
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 25


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 1998, n° 177953
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Gounin
Rapporteur public ?: M. Combrexelle

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:177953.19980608
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