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10/06/1998 | FRANCE | N°168718

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 10 juin 1998, 168718


Vu la requête enregistrée le 19 mai 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE CIPIERES (Alpes-Maritimes), représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE CIPIERES demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 22 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de Mme Claudine X..., annulé la délibération du 17 août 1989 de son conseil municipal portant approbation du plan d'occupation des sols de la commune en tant qu'elle institue l'emplacement réservé n° 5 et crée les zones NA al, NA a2

et la zone NA jouxtant la zone NA a1 et la zone NA bordée par l'empl...

Vu la requête enregistrée le 19 mai 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMUNE DE CIPIERES (Alpes-Maritimes), représentée par son maire en exercice ; la COMMUNE DE CIPIERES demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 22 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Nice a, à la demande de Mme Claudine X..., annulé la délibération du 17 août 1989 de son conseil municipal portant approbation du plan d'occupation des sols de la commune en tant qu'elle institue l'emplacement réservé n° 5 et crée les zones NA al, NA a2 et la zone NA jouxtant la zone NA a1 et la zone NA bordée par l'emplacement réservé n° 12 ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Nice ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Mignon, Auditeur,
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non recevoir opposée par Mme X... :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-3 du code de l'urbanisme : "En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours." ;
Considérant que l'article L. 600-3 précité du code de l'urbanisme n'impose pas à l'auteur de la décision litigieuse ou au bénéficiaire de l'autorisation, ni d'ailleurs à aucune autre personne ayant qualité pour faire appel d'un jugement annulant, au moins partiellement, un document d'urbanisme ou une décision valant autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le code de l'urbanisme, de notifier l'appel dirigé contre un tel jugement ; que, par suite, Mme X... n'est pas fondée à soutenir que, faute par la COMMUNE DE CIPIERES (Alpes-Maritimes) de l'avoir notifié, l'appel qu'elle forme contre le jugement rendu le 22 décembre 1994 par le tribunal administratif de Nice serait irrecevable ;
En ce qui concerne l'institution d'un emplacement réservé n° 5 :
Sur le moyen tiré de la violation du I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles et pastorales ou forestiers son préservées. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition. Seules les constructions nécessaires à cesactivités ainsi que les équipements sportifs liés notamment à la pratique du ski et de la randonnée peuvent y être autorisés." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain dont le classement en emplacement réservé n° 5 au plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE CIPIERES est contesté, est une prairie de fauche d'une superficie de 4 300 m à proximité immédiate du village ; que, compte tenu de l'existence, dans la commune, d'un millier d'hectares de prairies de fauche destinées à l'élevage ovin, le rôle et la place de ce terrain dans le système d'exploitation local ne faisait pas obstacle à son classement en emplacement réservé, en vue de la création d'une aire de stationnement et d'équipements sportifs ; qu'ainsi, la COMMUNE DE CIPIERES est fondée à soutenir que c'est à tort que, pour annuler ce classement, le tribunal administratif de Nice s'est fondé sur ce qu'il aurait été décidé en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif de Nice ;
Sur le moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation :
Considérant que Mme X... soutient que le rapport de présentation du plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE CIPIERES ne justifierait pas le choix retenu pour l'emplacement réservé, qui fait l'objet du litige ; qu'il ressort de ce rapport que l'un des objectifs poursuivis par la révision était de prévoir "les emplacements réservés nécessaires au développement et à la vie de l'agglomération" ; que le choix de l'emplacement réservé n° 5 est justifié dans le rapport de présentation par sa continuité avec le parc de stationnement principal du village, par sa position dans le village et par l'usage qu'en feront les randonneurs ; que le moyen doit, par suite, être écarté ;
Sur le moyen tiré de la violation du 8° de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme :
Considérant que l'annexe au plan d'occupation des sols, prévue par l'article R.122-24 du code de l'urbanisme, précise que l'emplacment réservé n° 5 est destiné à la réalisation d'un équipement sportif et à l'extension d'un parc de stationnement communal et non, comme le prétend Mme X..., en vue de la constitution d'une réserve foncière ; que ces objets sont au nombre de ceux que vise le 8° de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de cette disposition doit être rejeté ;
Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation d'un parc de stationnement et d'équipements sportifs à l'emplacement qui a été réservé à cet effet dans le plan d'occupation des sols soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que Mme X... soutient certes que d'autres emplacements auraient été mieux adaptés ; que, toutefois, il n'appartient pas au Conseil d'Etat, statuant au contentieux de se prononcer sur l'opportunité du choix opéré par les auteurs du plan d'occupation des sols ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE CIPIERES est fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé la délibération de son conseil municipal du 17 août 1989 portantapprobation du plan d'occupation des sols, en tant qu'elle institue l'emplacement réservé n° 5 sur le terrain de Mme X... ;
En ce qui concerne le classement de terrains en zone NA :
Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme : "L'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs et villages existants, sauf si le respect des dispositions prévues aux I et II ci-dessus ou la protection contre les risques naturels imposent la délimitation de hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. La capacité d'accueil des espaces destinés à l'urbanisation doit être compatible avec la préservation des espaces naturels et agricoles mentionnés aux I et II du présent article ..." ; qu'aux termes du II du même article : "Les documents et décisions relatifs à l'occupation des sols comportent les dispositions propres à préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DE CIPIERES, la zone NA a 1, la zone NA jouxtant la zone NA a1, la zone NA a2 et la zone NA bordée par l'emplacement réservé n° 12, telles que leur position a été prévue par les auteurs du plan d'occupation des sols, ne sont pas situées en continuité avec le village ; que la création de ces zones méconnaît ainsi les dispositions du III de l'article L. 145-3, précitées ; que, eu égard à leur ampleur et au règlement qui leur est applicable, ces mêmes zones ne peuvent avoir pour objet de permettre la réalisation de hameaux nouveaux intégrés à l'environnement et sont susceptibles de donner aux espaces destinés à l'urbanisation une capacité d'accueil incompatible avec la préservation des espaces naturels et agricoles de la commune, sans que le moyen tiré de leur utilité dans la protection des sites contre l'incendie puisse être utilement invoqué ; que, par suite, le classement contesté contrevient aux dispositions des I et II de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CIPIERES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé la délibération du 17 août 1989, en tant qu'elle créée les zones précitées ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner Mme X..., par application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, à payer à la COMMUNE DE CIPIERES la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 22 décembre 1994 est annulé, en tant qu'il a annulé la délibération du 17 août 1989 du conseil municipal de Cipières, approuvant le plan d'occupation des sols de la commune, en ce qu'elle crée un emplacement réservé n° 5.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Nice, dirigées contre la délibération mentionnée à l'article 1er ci-dessus, en tant qu'elle crée un emplacement réservé n° 5, ainsi que le surplus des conclusions de la requête présentée devant le Conseil d'Etat par la COMMUNE DE CIPIERES, sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE CIPIERES, à Mme X... et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 168718
Date de la décision : 10/06/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

68-01-01 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PLANS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME - PLANS D'OCCUPATION DES SOLS.


Références :

Code de l'urbanisme L600-3, L145-3, L123-1, R122-24
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 1998, n° 168718
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mlle Mignon
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:168718.19980610
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