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08/07/1998 | FRANCE | N°187480

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 08 juillet 1998, 187480


Vu la requête, enregistrée le 28 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Weyi X...
Y..., demeurant ..., porte 19 à Melun (77000) ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1 ) d'annuler le jugement du 21 mars 1997 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 1997 du préfet de Seine-et-Marne ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une

somme de 5 226 F au titre de l'article 75-I de la loi n 91-647 du 10 juillet 1...

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Weyi X...
Y..., demeurant ..., porte 19 à Melun (77000) ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1 ) d'annuler le jugement du 21 mars 1997 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 1997 du préfet de Seine-et-Marne ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 226 F au titre de l'article 75-I de la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ;
4 ) d'enjoindre le préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'article 75-I de la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Froment, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu présentées par le préfet de Seine-et-Marne :
Considérant que la circonstance que le préfet de Seine-et-Marne indique par un mémoire enregistré le 17 avril 1998 qu'un titre de séjour serait prochainement accordé à Mme Y... dans le cadre des procédures de régularisation, n'est pas de nature à priver la requête de son objet dès lors que l'arrêté attaqué n'a pas été retiré ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3 ) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait" ; que Mme Weyi X...
Y..., s'étant maintenue en France pendant plus d'un mois après que lui eut été notifiée la décision du préfet de Seine-et-Marne lui retirant son titre de séjour, se trouvait dans le cas prévu ci-dessus ;
Sur la légalité externe :
Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté attaqué qui énonce les considérations de droit et de fait ayant fondé la décision est suffisamment motivé ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, que si un acte de droit privé opposable aux tiers est en principe opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec, même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que la nationalité française des enfants nés de l'union de la requérante avec un compatriote zaïrois, M. Bangala Z..., a été obtenue par fraude, en raison de l'usurpation, par le père des enfants, sous le nom de Luthed, de la nationalité française ; que, du fait de cette fraude, quand bien même lesdits enfants ne se seraient pas vu retirer, à la date de la décision attaquée, la nationalité française, la requérante ne saurait se prévaloir des dispositions du 5 de l'article 25 de l'ordonnance précitée relatives à l'impossibilité d'expulser l'étranger père ou mère d'un enfant français résidant en France ;

Considérant, en second lieu, que si Mme Y... fait valoir que ses enfants sont scolarisés en France, pays où ils sont nés et où ils ont toujours vécu et qu'ils risquent d'être séparés de leur père en cas de départ, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu des circonstances de l'espèce, et en l'absence de toute circonstance mettant la requérante et son concubin, lequel fait également l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière, dans l'impossibilité d'emmener leurs enfants avec eux, l'arrêté attaqué n'a pas porté aux droits de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en troisième lieu, que si la requérante soutient que son plus jeune fils, victime d'un accident grave de la voie publique le 27 novembre 1995, doit être suivi médicalement en France, les circonstances qu'elle invoque et les justificatifs qu'elle produit ne suffisent pas à établir que le préfet de Seine-et-Marne, en prenant la décision de reconduite attaquée, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Y... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 7 mars 1997 du préfet de Seine-et-Marne décidant sa reconduite à la frontière, et qui a pris suffisamment en compte sa situation personnelle ;
Sur les conclusions de Mme Y... tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour :
Considérant que la présente décision qui rejette la requête de l'intéressée n'appelle aucune mesure d'exécution ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme Y... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Weyi X...
Y..., au préfet de Seine-et-Marne et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25


Publications
Proposition de citation: CE, 08 jui. 1998, n° 187480
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. de Froment
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Formation : 9 ss
Date de la décision : 08/07/1998
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 187480
Numéro NOR : CETATEXT000007980951 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1998-07-08;187480 ?
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