La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/07/1998 | FRANCE | N°187887

France | France, Conseil d'État, 9 ss, 29 juillet 1998, 187887


Vu la requête, enregistrée le 21 mai 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD ; le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 avril 1997 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 19 avril 1997 prononçant la reconduite à la frontière de M. Michel X...
Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Ajebo Y... devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;


Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté...

Vu la requête, enregistrée le 21 mai 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD ; le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 avril 1997 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 19 avril 1997 prononçant la reconduite à la frontière de M. Michel X...
Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. Ajebo Y... devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Froment, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, le préfet "peut décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité" ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Ajebo Y..., de nationalité zaïroise, est entré en France en 1990, que le statut de réfugié lui a été refusé par décision du 12 mai 1993 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée le 30 juin 1994 par la commission des recours des réfugiés ; qu'il a fait l'objet de plusieurs invitations à quitter le territoire puis d'un premier arrêté de reconduite à la frontière le 8 octobre 1996 ; qu'ayant quitté la France pour la Belgique, il est revenu irrégulièrement sans titre de séjour ; qu'il a fait l'objet d'un deuxième arrêté de reconduite à la frontière le 19 avril 1997 ;
Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. Ajebo Y..., le 19 avril 1997, doit être regardé, dans les termes où il est rédigé, comme comportant également une décision de renvoi dans son pays d'origine ;
Sur la décision de reconduite à la frontière :
Considérant que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lille ne pouvait se fonder sur la seule circonstance que l'intéressé serait exposé à des risques en cas de retour dans son pays d'origine pour annuler l'arrêté préfectoral en tant qu'il prononçait la reconduite à la frontière de M. Ajebo Y... ; que, par suite, le PREFET DE LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, ce magistrat a, pour un tel motif, annulé l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. Ajebo Y... ;
Considérant qu'il appartient au juge d'appel saisi par l'effet dévolutif d'examiner les autres moyens soulevés par M. Ajebo Y... à l'encontre de la décision de reconduite à la frontière ;
Considérant que si M. Ajebo Y... fait valoir que cinq de ses neuf enfants seraient établis en France, que quatre d'entre eux auraient la nationalité française et qu'il vivrait à la charge de l'un d'eux, ces circonstances ne sont pas de nature à établir que l'arrêté attaqué ait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel cet arrêté a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que le fait que M. Ajebo Y... n'ait commis aucun trouble à l'ordre public est sans incidence sur la légalité de l'arrêté qu'il conteste ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Ajebo Y... n'est pasfondé à demander l'annulation de la décision de reconduite à la frontière dont il a fait l'objet ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "L'étranger qui ... doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1°) à destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou la commission des recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ... Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacés ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme" ;
Considérant que si M. Ajebo Y... soutient qu'il pouvait être exposé, à la date de l'arrêté attaqué, en cas de retour dans son pays, à des risques tenant à sa qualité d'opposant politique au Maréchal Mobutu, il n'apporte à l'appui de ses allégations aucune justification susceptible d'établir la réalité des risques alors encourus ; qu'il ressort, en revanche, des pièces du dossier, qu'en sollicitant, en 1994, c'est-à-dire postérieurement à son départ du Zaïre en raison de son opposition politique, la prorogation de son passeport national, qu'il a d'ailleurs obtenue pour la période du 6 juin 1994 au 5 juin 1997, l'intéressé a entendu se placer sous la protection des autorités de son pays ; que, par suite, le PREFET DE LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD est fondé à soutenir que c'est à tort que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lille a annulé sa décision portant renvoi de M. Ajebo Y... dans son pays d'origine ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande présentée par M. Ajebo Y... contre l'arrêté du 19 avril 1997 ;
Article 1er : Le jugement du 22 avril 1997 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Ajebo Y... contre l'arrêté du 19 avril 1997 est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA REGION NORD-PAS-DE-CALAIS, PREFET DU NORD, à M. Michel X...
Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 9 ss
Numéro d'arrêt : 187887
Date de la décision : 29/07/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 27 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 29 jui. 1998, n° 187887
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. de Froment
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:187887.19980729
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award