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28/09/1998 | FRANCE | N°190192

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 28 septembre 1998, 190192


Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Joseph X..., demeurant 1, place Magenta à Nice (06000) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 19 juin 1997 par laquelle le conseil national de l'Ordre des pharmaciens lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant neuf mois ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le conseil national de l'Ordre des pharmaciens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n°

95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31...

Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Joseph X..., demeurant 1, place Magenta à Nice (06000) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 19 juin 1997 par laquelle le conseil national de l'Ordre des pharmaciens lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant neuf mois ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le conseil national de l'Ordre des pharmaciens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Japiot, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. X... et de la SCP Célice, Blancpain, avocat du conseil national de l'Ordre des pharmaciens,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que le conseil régional de l'ordre des pharmaciens a retenu, parmi les fondements de la sanction qu'il a infligée à M. X..., le motif suivant : "Vente de médicaments du tableau C, en dehors de toute prescription médicale individualisée, alors surtout qu'il s'agissait de produits pour lesquels le dépassement des doses prévues présente pour la santé des dangers particulièrement graves (art. R. 5179 et R. 5188 ancien code)" ; que M. X... a soulevé, dans son mémoire d'appel enregistré le 5 mai 1992 au secrétariat du conseil national de l'Ordre des pharmaciens, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire par le conseil régional de l'ordre, en tant que celui-ci s'était fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article R. 5179 du code de la santé publique sans mettre le requérant à même de présenter sa défense sur ce point ; que le conseil national de l'Ordre des pharmaciens a omis de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; qu'ainsi, la décision attaquée doit être annulée ;
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987 : "Lorsque l'affaire fait l'objet d'un deuxième pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire" ; qu'ainsi, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 5179 du code de la santé publique, dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits : "L'auteur de la prescription est tenu de la dater, de la signer, de mentionner lisiblement son nom et son adresse ainsi que le mode d'administration du médicament" ; qu'aux termes de l'article R. 5188 du même code : " ... les préparations contenant des substances du tableau A substances toxiques ne peuvent être renouvelées que sur indications écrites du prescripteur. Dans ce cas, le renouvellement ne peut être exécuté qu'après le délai déterminé par le mode d'emploi du médicament indiqué par l'auteur de la prescription ( ...)" ;
Considérant que M. X... a pu s'expliquer sur les faits qui lui étaient reprochés devant la chambre de discipline du conseil régional de l'ordre, notamment en ce qui concerne les irrégularités affectant les ordonnances sur lesquelles ce pharmacien s'était fondé pour délivrer des médicaments anabolisants ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que le conseil régional de l'ordre s'est fondé sur l'article R. 5179 précité du code de la santé publique et a ainsi retenu une qualification juridique différente de celle mentionnée dans la plainte formée par le directeur régional des affaires sanitaires et sociales, M. X... a été mis en mesure de présenter utilement sa défense ;
Considérant que la circonstance que certains des faits reprochés au requérant seraient susceptibles de recevoir une qualification pénale est sans incidence sur la compétence des juridictions ordinales pour prononcer des sanctions disciplinaires en cas de faute professionnelle ; qu'ainsi, la chambre de discipline du conseil régional de l'ordre était compétente pour prendre la décision attaquée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X..., pharmacien d'officine, a délivré de grandes quantités de médicaments anabolisants ; qu'il a ainsi méconnu lesdispositions de l'article L. 568 du code de la santé publique, qui prohibent la "vente en gros" de médicaments par les pharmaciens d'officine ; que M. X... a en outre méconnu les dispositions précitées des articles R. 5179 et R. 5188 du code de la santé publique ; que si le requérant soutient qu'il ignorait que les médicaments qu'il délivrait seraient utilisés à des fins non thérapeutiques, il aurait dû manifester davantage de prudence eu égard aux quantités de médicaments en cause et à leurs conditions de délivrance ; qu'il ressort du rapport du pharmacien inspecteur que M. X... n'a pas retranscrit sur son ordonnancier l'intégralité des ventes de médicaments anabolisants qu'il a délivrés ; qu'ainsi, il a méconnu les dispositions de l'article R. 5177 du code de la santé publique qui prévoient cette retranscription ; que la méconnaissance des règles imposées par le code de la santé publique pour la délivrance de ces médicaments est de nature à justifier la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant neuf mois prononcée par le conseil régional de l'ordre ;
Considérant qu'eu égard à la quantité des médicaments délivrés et à la gravité des manquements reprochés à M. X..., les faits qui ont motivé la sanction prononcée par la chambre de discipline du conseil régional de l'ordre des pharmaciens sont contraires à l'honneur et sont ainsi exclus du champ d'application de la loi susvisée du 3 août 1995 portant amnistie ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, la chambre de discipline du conseil régional de l'ordre des pharmaciens de la circonscription de Marseille lui a infligé la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant neuf mois ;
Article 1er : La décision du conseil national de l'Ordre des pharmaciens en date du 19 juin 1997 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le conseil national de l'Ordre des pharmaciens est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Joseph X..., au conseil national de l'Ordre des pharmaciens et au ministre de l'emploi et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 190192
Date de la décision : 28/09/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

55-03-04 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - PHARMACIENS.


Références :

Code de la santé publique R5179, R5188, L568, R5177
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 95-884 du 03 août 1995


Publications
Proposition de citation : CE, 28 sep. 1998, n° 190192
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Japiot
Rapporteur public ?: Mme Roul

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:190192.19980928
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