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07/10/1998 | FRANCE | N°156653

France | France, Conseil d'État, 7 /10 ssr, 07 octobre 1998, 156653


Vu la requête, enregistrée le 1er mars 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 1er juillet 1994, présentés pour la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A. dont le siège est ... ; la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A. demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler sans renvoi l'arrêt en date du 29 juin 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, avant dire droit sur les conclusions de la société requérante, ordonné un supplément d'instruction aux fins, pour l'OPAC des Bouches-du-Rhône, de produire d'une part les

pièces comptables et justificatives établissant qu'il a personnellement...

Vu la requête, enregistrée le 1er mars 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, et le mémoire complémentaire, enregistré le 1er juillet 1994, présentés pour la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A. dont le siège est ... ; la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A. demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler sans renvoi l'arrêt en date du 29 juin 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, avant dire droit sur les conclusions de la société requérante, ordonné un supplément d'instruction aux fins, pour l'OPAC des Bouches-du-Rhône, de produire d'une part les pièces comptables et justificatives établissant qu'il a personnellement supporté les frais de réfection de l'étancheité des terrasses des immeubles "Miami" et "Nouméa", d'autre part la liste des lots décrite dans les motifs de l'arrêt ;
2°) d'annuler l'arrêt en date du 31 décembre 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a réformé le jugement en date du 19 février 1991 du tribunal administratif de Marseille en ramenant la réparation à laquelle la société requérante a été condamnée solidairement envers l'OPAC à 799 068,98 F ;
3°) de rejeter la demande présentée par l'OPAC des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille ;
4°) subsidiairement, de condamner les architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras, la société Colas et la société Céramétal à garantir la société requérante des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
Vu le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ;
Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Challan-Belval, Maître des Requêtes,
- les observations de :
- Me Parmentier, avocat de la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A,
- Me Boullouche, avocat du cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil,
Vignal, Schoeller et Charras,
- la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la société Colas,
- la SCP Guiguet, Bachellier, Potier de la Varde, avocat de l'OPAC des Bouches-du-Rhône,
- les conclusions de Mme Bergeal, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité en la forme de l'arrêt du 31 décembre 1993 :
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la cour a suffisamment motivé sa décision en ce qui concerne la mise en oeuvre de sa responsabilité ; que, notamment, dès lors qu'elle fondait cette responsabilité sur une présomption dont la société requérante n'aurait pu être exonérée qu'en cas de force majeure ou de faute du maître d'ouvrage, elle pouvait, par la simple formule "que cette activité fût ou non fautive", écarter l'argumentation, au demeurant inopérante, de la société requérante tendant à démontrer qu'elle n'avait pas commis de faute ;
Sur la recevabilité de l'OPAC à agir sur le fondement de la responsabilité décennale :
Considérant que si l'action en garantie décennale se transmet aux acquéreurs avec la propriété de l'immeuble, le maître de l'ouvrage ne perd cependant pas la faculté d'exercer cette action dans la mesure où elle présente pour lui un intérêt direct et certain ; que, dès lors, en décidant que l'OPAC, qui avait justifié devant elle avoir supporté des dépenses de remise enétat des bâtiments concernés à raison des dommages pour lesquels sa responsabilité décennale est mise en cause, disposait, à concurrence des dites dépenses, de la qualité pour agir sur le fondement de la garantie décennale, la cour administrative d'appel de Lyon n'a pas commis d'erreur de droit ;
Sur la dénaturation des stipulations de l'article 7 de la convention du 25 mai 1973 :
Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 7 de la convention du 25 mai 1973, relative à l'intervention d'un bureau d'études techniques, signée entre l'Office Public d'Habitation à Loyer Modéré du Département des Bouches-du-Rhône et le bureau d'études O.T.H. MEDITERRANNEE S.A. : "Pour toutes les difficultés que pourrait soulever l'application des dispositions de la présente convention, il est expressément convenu entre les parties de solliciter les avis du directeur départemental de la construction avant d'engager toute action contentieuse" ; qu'en jugeant que ces stipulations ne trouvaient pas à s'appliquer préalablement à l'engagement d'une action qui était fondée sur la responsabilité décennale, et non sur la responsabilité contractuelle, la cour n'a pas dénaturé la commune intention des parties ;
Sur la recevabilité des appels en garantie dirigés par la société O.T.H. contre les architectes et les sociétés Colas et Céramétal :
Considérant que la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les pièces du dossier soumis aux juges du fond en estimant que la société requérante n'avait développé aucun moyen à l'appui de ses conclusions d'appel en garantie ; qu'elle a pu légalement en déduire que ces conclusions n'étaient pas recevables ;
Sur la méconnaissance des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil :

Considérant que la garantie qu'impliquent, pout tout constructeur d'un ouvrage, les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, repose sur une présomption de responsabilité, dont lesdits constructeurs ne peuvent être exonérés qu'en cas de force majeure ou de faute du maître de l'ouvrage ; que, dès lors, en écartant l'argumentation de la société requérante exclusivement fondée sur le fait qu'elle s'était acquittée correctement de sa mission et n'avait commis aucune faute, la cour n'a commis aucune erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A. n'est pas fondée à demander l'annulation des arrêts attaqués de la cour administrative d'appel de Lyon ; que les pourvois provoqués de la société Colas et du cabinet d'architectes Kalt et autres doivent, par voie de conséquence, être rejetés ;
Sur les conclusions de la société Colas et du cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras :
Considérant que la présente décision, qui rejette le pourvoi principal de la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A., n'aggrave pas la situation de la société Colas ni celle du cabinet d'architectes ; que les pourvois provoqués de cette société et du cabinet susmentionné ne sont donc pas recevables ;
Sur les conclusions du cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras tendant à ce que l'OPAC SUD soit condamné à lui verser une somme de10 000 F en application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'office public d'aménagement et de construction OPAC Sud, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer au cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de l'office public d'aménagement et de construction OPAC Sud tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner la Société O.T.H. MEDITERRANEE S.A. à payer à l'office public d'aménagement et de construction OPAC Sud la somme de 15 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le pourvoi de la Société O.T.H. MEDITERRANNEE S.A. est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de la société Colas et du cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras sont rejetés.
Article 3 : La Société O.T.H. MEDITERRANNEE S.A. et le cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras verseront solidairement à l'Office Public d'Aménagement et de Construction OPAC SUD une somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Société O.T.H. MEDITERRANNEE S.A., au cabinet d'architectes Kalt, Pouradier-Duteil, Vignal, Schoeller et Charras, à l'Office Public d'Aménagement et de Construction OPAC SUD, à la société Colas et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Formation : 7 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 156653
Date de la décision : 07/10/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

39-06-01-04-01 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - QUALITE POUR LA METTRE EN JEU -Maître de l'ouvrage, malgré le transfert de propriété de l'immeuble - Existence, en cas d'intérêt direct et certain.

39-06-01-04-01 Si l'action en garantie décennale se transmet aux acquéreurs avec la propriété de l'immeuble, le maître de l'ouvrage ne perd cependant pas la faculté d'exercer cette action dans la mesure où elle présente pour lui un intérêt direct et certain. Dès lors, en décidant que le maître de l'ouvrage, qui avait justifié devant elle avoir supporté des dépenses de remise en état des bâtiments concernés à raison des dommages pour lesquels sa responsabilité décennale était mise en cause, disposait, à concurrence de ces dépenses, de la qualité pour agir sur le fondement de la garantie décennale, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.


Références :

Code civil 1792, 2270
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 1998, n° 156653
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Challan-Belval
Rapporteur public ?: Mme Bergeal

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:156653.19981007
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