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16/10/1998 | FRANCE | N°169341

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 16 octobre 1998, 169341


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 mai 1995 et 15 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean X... demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 10 janvier 1995 par laquelle la chambre nationale de discipline auprès du conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés a réformé la décision de la chambre régionale de discipline de l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés de Montpellier, en date du 19 mars 1993, en ramenant la dur

ée de la peine de suspension à deux mois ;
Vu les autres pièces ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 15 mai 1995 et 15 septembre 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean X... demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 10 janvier 1995 par laquelle la chambre nationale de discipline auprès du conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés a réformé la décision de la chambre régionale de discipline de l'Ordre des experts-comptables et des comptables agréés de Montpellier, en date du 19 mars 1993, en ramenant la durée de la peine de suspension à deux mois ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 modifiée ;
Vu le décret n° 45-2370 du 15 octobre 1945 modifié ;
Vu le décret n° 70-147 du 19 février 1970 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Guyomar, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. X... et de la SCP Peignot, Garreau, avocat du conseil supérieur de l'Ordre des expertscomptables et des comptables agréés,
- les conclusions de M. Girardot, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toutes personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ( ...)" ; que l'article 20 du décret n° 45-2370 du 15 octobre 1945 modifié pris pour l'application de l'ordonnance du 19 septembre 1945 modifiée relative à l'Ordre des expertscomptables et des comptables agréés dispose que les séances des chambres régionales et de la chambre nationale de discipline ne sont pas publiques ;
Considérant qu'il résulte de l'article 53 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 précitée que les instances disciplinaires de l'Ordre des experts-comptables peuvent prononcer outre les sanctions de la réprimande et du blâme, les sanctions de la suspension pour une durée déterminée ou de la radiation du tableau comportant interdiction définitive d'exercer la profession ; qu'ainsi les décisions prises par lesdites instances sont susceptibles de porter atteinte à l'exercice du droit d'exercer la profession, lequel revêt le caractère d'un droit civil au sens des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il suit de là que les stipulations de l'article 6-1 précitées s'appliquent à la procédure suivie devant la chambre nationale discipline de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que la décision attaquée a été prise après une audience non publique en application de l'article 20 du décret précité du 15 octobre 1945 modifié ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que cette procédure est irrégulière ; que, dès lors, M. X..., qui est recevable à se prévaloir pour la première fois devant le juge de cassation de ce que la décision attaquée a été prononcée en séance non publique, est fondé à demander l'annulation de la décision du 10 janvier 1995 par laquelle la chambre nationale de discipline de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés a prononcé à son encontre la sanction de suspension pour une durée de deux mois ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Ordre des experts-comptables et comptables agrées à verser une somme de 5 000 F à M. X... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréées tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que M. X... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La décision du 10 janvier 1995 de la chambre nationale de discipline de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la chambre nationale de discipline de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés.
Article 3 : L'Ordre des experts-comptables et comptables agréés versera à M. X... la somme de 5 000 F en application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991.
Article 4 : Les conclusions de l'Ordre des experts-comptables et comptables agréés tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Jean X..., à l'Ordre des expertscomptables et comptables agréés et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 169341
Date de la décision : 16/10/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

55-03-048 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - EXPERTS-COMPTABLES ET COMPTABLES AGREES.


Références :

Décret 45-2370 du 15 octobre 1945 art. 20
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2138 du 19 septembre 1945 art. 53, art. 6-1


Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 1998, n° 169341
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guyomar
Rapporteur public ?: M. Girardot

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:169341.19981016
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