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25/11/1998 | FRANCE | N°181242

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 25 novembre 1998, 181242


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le département du Nord, représenté par le président en exercice du conseil général ; le département demande que le Conseil d'Etat annule la décision en date du 5 janvier 1996 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a annulé la décision de la commission départementale d'aide sociale du Nord en date du 15 décembre 1993, décidant la récupération à l'encontre de Mme Annie Z... des frais de placement de Mme Hélène X... en maison de retraite ;
Vu les autr

es pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
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Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le département du Nord, représenté par le président en exercice du conseil général ; le département demande que le Conseil d'Etat annule la décision en date du 5 janvier 1996 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a annulé la décision de la commission départementale d'aide sociale du Nord en date du 15 décembre 1993, décidant la récupération à l'encontre de Mme Annie Z... des frais de placement de Mme Hélène X... en maison de retraite ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de la Ménardière, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat de Mme A...,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité du pourvoi :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le directeur général des services du département du Nord, signataire de la requête, justifiait d'une délégation régulière du président du conseil général ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir tirée de ce que la requête aurait été signée par une autorité incompétente ne peut être accueillie ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission centrale d'aide sociale :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que, d'après le premier alinéa de l'article 146 du code de la famille et de l'aide sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 janvier 1997, relatif à la récupération des allocations d'aide sociale, des recours peuvent être exercés par le département dans les hypothèses suivantes : "a) Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; b) Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d'aide sociale ou dans les cinq ans qui ont précédé cette demande ; c) Contre le légataire" ;
Considérant que, pour l'application de ces dispositions, il appartient aux juridictions de l'aide sociale, eu égard tant à la finalité de leur intervention qu'à leur qualité de juges de plein contentieux, non d'apprécier la légalité de la décision prise par la commission d'admission compétente pour autoriser ou refuser la récupération, mais de se prononcer elles-mêmes sur le bien-fondé de l'action engagée par la collectivité publique d'après l'ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l'une et l'autre parties à la date de leur propre décision ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme Y..., qui a bénéficié de l'aide sociale pour la prise en charge des frais de son placement à la maison de retraite de Croix (Nord) du 5 juillet 1991 au 31 mars 1992, avait le 17 avril 1990 fait donation à sa fille unique Mme Z... d'une maison évaluée à 300 000 F dont elle était propriétaire à Marcq-en-Baroeul ; que cette maison a fait l'objet d'une vente le 29 mars 1991 au prix de 470 000 F ; que, par décision du 19 mai 1992, la commission d'admission à l'aide sociale de Marcq-en-Baroeul a ordonné à l'encontre de Mme Z... la récupération de la somme de 48 607,89 F correspondant au montant de l'aide sociale accordée par le département du Nord à Mme

Y...

; que cette décision a été confirmée par une décision de la commission départementale d'aide sociale du Nord en date du 15 décembre 1993 ;

Considérant que, pour annuler cette dernière décision, au motif que la commission départementale avait fait une inexacte appréciation des circonstances de l'affaire, la commission centrale d'aide sociale a considéré qu'il n'était pas établi qu'à la date de la demande de récupération de l'aide sociale, les sommes provenant de la vente de la maison reçue en donation par Mme Z... étaient toujours à la disposition de l'intéressée ; qu'en se plaçant ainsi à la date de la demande de récupération pour apprécier si Mme Z... était en mesure desatisfaire à cette demande, sans rechercher l'existence éventuelle d'éléments postérieurs susceptibles d'avoir eu une incidence sur la situation financière de l'intéressée, la commission centrale d'aide sociale a commis une erreur de droit ; que, dès lors, le département du Nord est fondé à demander l'annulation de la décision de la commission centrale d'aide sociale en date du 5 janvier 1996 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de renvoyer l'affaire devant cette commission ;
Article 1er : La décision de la commission centrale d'aide sociale en date du 5 janvier 1996 est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la commission centrale d'aide sociale.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au président du conseil général du département du Nord, à Mme Annie Z..., au président de la commission centrale d'aide sociale et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 181242
Date de la décision : 25/11/1998
Sens de l'arrêt : Annulation renvoi
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

AIDE SOCIALE - CONTENTIEUX DE L'AIDE SOCIALE - Juridictions de l'aide sociale - Qualité de juges de plein contentieux - Conséquence - Obligation - pour statuer en matière de récupération d'allocations d'aide sociale - de se prononcer d'après l'ensemble des circonstances de fait à la date de leur décision.

04-04, 54-02-02-01 Pour l'application des dispositions du premier alinéa de l'article 146 du code de la famille et de l'aide sociale, relatif à la récupération des allocations d'aide sociale, il appartient aux juridictions de l'aide sociale, eu égard tant à la finalité de leur intervention qu'à leur qualité de juges de plein contentieux, non d'apprécier la légalité de la décision prise par la commission d'admission compétente pour autoriser ou refuser la récupération, mais de se prononcer elles-mêmes sur le bien-fondé de l'action engagée par la collectivité publique d'après l'ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l'une et l'autre parties à la date de leur propre décision.

PROCEDURE - DIVERSES SORTES DE RECOURS - RECOURS DE PLEIN CONTENTIEUX - RECOURS AYANT CE CARACTERE - Litiges soumis aux juridictions de l'aide sociale - Conséquence - Obligation - pour statuer en matière de récupération d'allocations d'aide sociale - de se prononcer d'après l'ensemble des circonstances de fait à la date de leur décision.


Références :

Code de la famille et de l'aide sociale 146
Loi du 24 janvier 1997


Publications
Proposition de citation : CE, 25 nov. 1998, n° 181242
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Aubin
Rapporteur ?: M. de la Ménardière
Rapporteur public ?: Mme Maugüé
Avocat(s) : SCP Coutard, Mayer, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:181242.19981125
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