La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/11/1998 | FRANCE | N°181819

France | France, Conseil d'État, 10/ 7 ssr, 25 novembre 1998, 181819


Vu le recours du MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION enregistré le 13 août 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 13 juin 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement en date du 27 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du ministre en date du 23 juin 1992 et du 18 août 1993 radiant M. Jean-Michel X... des effectifs du ministère de la coopération et rejetant la demande d'in

demnisation de l'intéressé, et a condamné l'Etat à lui ver...

Vu le recours du MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION enregistré le 13 août 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION demande que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 13 juin 1996 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement en date du 27 juin 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du ministre en date du 23 juin 1992 et du 18 août 1993 radiant M. Jean-Michel X... des effectifs du ministère de la coopération et rejetant la demande d'indemnisation de l'intéressé, et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 98 000 F en réparation des préjudices subis du fait de cette radiation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 72-659 du 13 juillet 1972 ;
Vu la loi n° 83-481 du 11 juin 1983 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 84-721 du 17 juillet 1984 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gounin, Auditeur,
- les observations de Me Guinard, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Daussun, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 74 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : "Les enseignants non titulaires chargés de fonctions dans des établissements d'enseignement supérieur ... qui ont exercé leurs fonctions pendant deux ans à temps plein dans l'enseignement supérieur ont vocation à être titularisés, soit dans un corps de l'enseignement supérieur sur des emplois réservés à cet effet, soit dans un corps de l'enseignement secondaire, soit dans un corps technique ou administratif des administrations de l'Etat, sous réserve de remplir les conditions exigées pour l'accès à chacun de ces corps ..." ; que l'article 80 de la même loi précise que : "Les décrets en Conseil d'Etat prévus à l'article 79 fixent : 1) pour chaque ministère les corps auxquels les agents non titulaires ... peuvent accéder ; ces corps sont déterminés en tenant compte, d'une part, des fonctions réellement exercées par ces agents et du niveau et de la nature des emplois qu'ils occupent, d'autre part, des titres exigés pour l'accès à ces corps ... ; 2) pour chaque corps, les modalités d'accès à ce corps, le délai dont les agents non titulaires disposent pour présenter leur candidature ..." ;
Considérant que, par décret du 17 juillet 1984, le gouvernement a mis en place, par application des dispositions précitées, la procédure exceptionnelle d'accès au corps des adjoints d'enseignement d'enseignants non titulaires exerçant dans des établissements d'enseignement supérieur situés à l'étranger ;
Considérant que les dispositions précitées de l'article 74 de la loi du 11 janvier 1984 ne font pas obligation au gouvernement de prendre des décrets organisant la titularisation des agents susmentionnés dans chacune des catégories de corps qu'elles visent ; que c'est par suite en commettant une erreur de droit que la cour s'est fondée, pour rejeter le recours du MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION, sur le motif que, nonobstant la circonstance que la possibilité de demander sa titularisation avait déjà été ouverte à M. X... dans le corps des adjoints d'enseignement, par le décret susvisé du 17 juillet 1984, et que M. X... remplissait les conditions requises à cette fin aux termes dudit décret, l'intéressé pouvait prétendre à une titularisation dans un corps technique ou administratif de l'Etat dès lors qu'aucune disposition réglementaire n'était intervenue pour organiser les modalités de titularisation dans ces corps techniques ou administratifs ; que, par suite, l'arrêt attaqué doit être annulé ;
Considérant qu'en vertu de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction contentieuse statuant en dernier ressort peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 17 juillet 1984 relatif aux enseignants non titulaires exerçant dans des établissements d'enseignement supérieur situés à l'étranger : "Pendant une période de cinq années scolaires à compter de la rentrée scolaire 1984, les agents non titulaires pourvus d'une licence reconnue valable pour l'accès au certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré ... et qui sont en fonction dans des établissements d'enseignement supérieur au titre de la loi du 13 juillet 1972 ... peuvent demander leur intégration dans le corps des adjoints d'enseignement" ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., qui remplissait toutes les conditions nécessaires pour bénéficier de ces dispositions, n'en a pas sollicité l'application dans le délai précité qui s'imposait à lui sans que, contrairement à ce qu'il soutient, l'administration ait été tenue de l'en aviser spécialement ; qu'il résulte des dispositions précitées des articles 74 et 80 de la loi du 11 janvier 1984 qu'il ne pouvait dès lors plus prétendre, à la date de sa radiation des effectifs du ministère de la coopération, au bénéfice des mesures de titularisation prévues par cette loi ; que les dispositions de l'article 17 de la loi du 11 juin 1983, reprises par l'article 82 de la loi du 11 janvier 1984, aux termes desquelles "les agents non titulaires qui peuvent se prévaloir des dispositions qui précèdent ne peuvent être licenciés que pour insuffisance professionnelle ou pour motif disciplinaire jusqu'à l'expiration des délais d'option qui leur sont ouverts par les décrets prévus à l'article 80" ne faisaient dès lors pas obstacle à ce que le MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION prononce la radiation de l'intéressé des effectifs du ministère ; qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DELEGUE A LA COOPERATION est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision prononçant la radiation de M. X... des effectifs du ministère et condamné l'Etat à lui verser une indemnité de 98 000 F ainsi qu'une somme de 15 000 F au titre des frais non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris en date du 13 juin 1996 est annulé.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 27 juin 1994 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 4 : Les conclusions de M. X... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais irrépétibles sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre des affaires étrangères.


Synthèse
Formation : 10/ 7 ssr
Numéro d'arrêt : 181819
Date de la décision : 25/11/1998
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - APPLICATION DANS LE TEMPS - ENTREE EN VIGUEUR - ENTREE EN VIGUEUR SUBORDONNEE A L'INTERVENTION DE MESURES D'APPLICATION - Intégration d'enseignants non titulaires chargés de fonctions dans des établissements d'enseignement supérieur (article 74 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) - Obligation de prendre des décrets organisant leur titularisation dans chacun des corps visés par la loi - Absence.

01-08-01-02, 36-04-04(1) Les dispositions des articles 74 et 80 de la loi du 11 janvier 1984 ne font pas obligation au Gouvernement de prendre des décrets organisant la titularisation des enseignants non titulaires exerçant dans des établissements d'enseignement supérieur situés à l'étranger dans chacune des catégories de corps qu'elles visent. Par suite, dès lors que la possibilité de demander sa titularisation dans le corps des adjoints d'enseignement avait été ouverte par un décret du 17 juillet 1984 à M. R., qui remplissait les conditions requises à cette fin, l'absence de disposition réglementaire organisant les modalités de titularisation dans d'autres corps n'entache pas d'illégalité la radiation de l'intéressé des effectifs du ministère de la coopération.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CHANGEMENT DE CADRES - RECLASSEMENTS - INTEGRATIONS - INTEGRATION DE PERSONNELS N'APPARTENANT PAS ANTERIEUREMENT A LA FONCTION PUBLIQUE (1) Intégration d'enseignants non titulaires chargés de fonctions dans des établissements d'enseignement supérieur (article 74 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) - Obligation de prendre des décrets organisant leur titularisation dans chacun des corps visés par la loi - Absence - (2) Intégration d'enseignants non titulaires chargés de fonctions dans des établissements d'enseignement supérieur (article 74 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) - Obligation par l'administration d'aviser chacun des agents concernés du délai pendant lequel ils pouvaient en demander le bénéfice - Absence.

36-04-04(2) Le délai de cinq ans fixé par le décret du 17 juillet 1984 relatif aux enseignants non titulaires exerçant dans des établissements d'enseignement supérieur situés à l'étranger, pour prétendre à l'intégration dans le corps des adjoints d'enseignement, s'imposait à chacune des personnes remplissant toutes les conditions nécessaires pour bénéficier de cette possibilité, sans que l'administration ait été tenue de les en aviser spécialement.


Références :

Décret 84-721 du 17 juillet 1984 art. 1
Loi 83-481 du 11 juin 1983 art. 17
Loi 84-16 du 11 janvier 1984 art. 74, art. 80, art. 82
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 25 nov. 1998, n° 181819
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Gounin
Rapporteur public ?: Mme Daussun

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1998:181819.19981125
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award