Vu la requête, enregistrée le 8 février 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le DEPARTEMENT DE L'AISNE ; le DEPARTEMENT DE L'AISNE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 17 janvier 1995 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a réouvert l'instruction de la demande tendant à l'annulation de la décision du 10 septembre 1993, confirmée le 26 octobre 1993, par laquelle le président du Conseil général de l'Aisne a rejeté le projet de création d'un établissement d'accueil pour personnes âgées à Essomes-sur-Marne ;
2°) de condamner M. X... et la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine" à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Eoche-Duval, Auditeur,
- les observations de la SCP Ghestin, avocat de M. Jacques X...,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 152 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Si, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée, le demandeur n'a pas produit le mémoire complémentaire dont il avait expressément annoncé l'envoi, ... il est réputé s'être désisté" ; que si la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine" qui avait annoncé la production d'un mémoire complémentaire dans sa requête introductive d'instance enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Amiens le 13 novembre 1993, n'a produit ce mémoire que le 28 décembre 1994, soit après expiration du délai de quinze jours qui lui avait été imparti pour produire cet ampliatif par lettres du greffe du tribunal reçues par leur destinataire les 19 novembre 1993 et 28 mars 1994, il résulte de l'examen des termes de ces lettres, qui se bornent à mentionner la référence à l'article R. 152 du code sans citer cet article ou préciser la sanction qu'il prévoit dans le cas où le délai imparti n'est pas respecté, qu'elles ne sauraient valoir mise en demeure au sens de l'article R. 152 du code précité ; qu'il suit de là que la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine" ne peut être réputée s'être désistée de sa requête devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 156 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Les mémoires produits après la fin de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. Si les parties présentent avant la clôture de l'instruction des conclusions nouvelles ou des moyens nouveaux, la juridiction ne peut les adopter sans ordonner un supplément d'instruction" ; qu'aux termes de l'article R. 157 du même code : "Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours ... La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. Les mémoires qui auraient été produits pendant la période comprises entre la clôture et la réouverture de l'instruction sont communiqués aux parties" ;
Considérant que le tribunal administratif d'Amiens a ordonné, par le jugement attaqué, la réouverture de l'instruction ; que les dispostions de l'article R. 157 du code précité, prévoient expressément une telle possibilité, sans que puissent leur être opposées celles de l'article R. 156 auxquelles elles ont précisément pour objet de déroger, ni celles de l'article R. 152, eu égard à la circonstance que, ainsi qu'il vient d'être dit, les lettres adressées à la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine" ne valaient pas mises en demeure au sens de l'article R. 152 et ne pouvaient par conséquent entraîner un désistement d'office ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement méconnaîtrait les dispositions de l'article R. 156 du code précité n'est pas fondé ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le mémoire ampliatif produit le 28 décembre 1994 devant le tribunal administratif a été présenté par Mme X... au nom de la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine", et non par M. X..., qui avait signé la requête introductive d'instance ;
Considérant, toutefois, qu'il ressort des termes de cette requête que M. X... doit être regardé comme ayant agi au nom de la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine", dont il est président ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le mémoire complémentaire n'émane pas du demandeur doit être écarté ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine", qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer au DEPARTEMENT DE L'AISNE la somme de 8 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE L'AISNE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DE L'AISNE, à la société anonyme "Maison de retraite Jean de la Fontaine" et au ministre de l'emploi et de la solidarité.