Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 1er avril 1996 et 29 juillet 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X... demeurant ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat annule le décret du 7 janvier 1996 rapportant le décret du 6 janvier 1995 en tant qu'il naturalisait Mme X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code civil ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Colmou, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme X...,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du code civil : "nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation" ; qu'il résulte de ces dispositions que les conditions légales de la naturalisation ne sont pas satisfaites lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts ; qu'aux termes de l'article 27-2 du même code : "les décrets portant naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai d'un an à compter de leur publication au Journal Officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales" ;
Considérant que le décret du 6 janvier 1995 accordant la nationalité française à Mme X... a été publié au Journal officiel le 8 janvier 1995 ; que par suite le décret attaqué rapportant le décret susmentionné, qui a été pris le 7 janvier 1996, est intervenu dans le délai d'un an prévu par l'article 27-2 du code civil, alors même qu'il a été notifié à l'intéressée le 1er février 1996 et publié au Journal officiel le 17 janvier 1996 ;
Considérant qu'il est constant qu'à la date à laquelle le décret qui lui accordait la naturalisation a été signé, Mme X... était l'épouse d'un ressortissant étranger qui ne résidait pas en France ; que les démarches qu'invoque Mme X... pour faire venir son époux en France sont en tout état de cause postérieures au décret de naturalisation, donc sans incidence sur sa résidence à la date de ce décret ; que par suite elle ne pouvait pas être considérée comme ayant fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts et ne remplissait pas la condition de résidence fixée à l'article 21-16 précité ;
Considérant enfin que le décret attaqué n'a pas porté atteinte au droit de Mme X... de se marier ; que, par suite, celle-ci n'est pas fondée à se prévaloir d'une méconnaissance de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui énonce que l'homme et la femme d'âge nubile ont le droit de se marier ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que le décret du 7 janvier 1996 rapportant le décret du 6 janvier 1995 lui accordant la nationalité française est entaché d'excès de pouvoir ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme X... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.