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13/01/1999 | FRANCE | N°172052

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 13 janvier 1999, 172052


Vu le recours, enregistré le 18 avril 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE ; le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du 6 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 29 avril 1993 refusant à M. Ahmed X..., médecin de nationalité syrienne, l'autorisation d'exercer la médecine en France ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal admin

istratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code d...

Vu le recours, enregistré le 18 avril 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE ; le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du 6 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 29 avril 1993 refusant à M. Ahmed X..., médecin de nationalité syrienne, l'autorisation d'exercer la médecine en France ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Balmary, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées du premier alinéa de l'article L. 356 du code de la santé publique et du 1° de l'article L. 356-2 du même code, nul ne peut exercer en France la profession de médecin s'il n'est de nationalité française ou ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne, du Maroc ou de la Tunisie, et titulaire, soit du diplôme français d'Etat de docteur en médecine, soit, si l'intéressé est ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne, d'un diplôme, certificat ou autre titre de médecin délivré par l'un de ces Etats ; que diverses règles particulières, de caractère permanent ou transitoire, dérogent à ces dispositions ; qu'il en est ainsi du troisième alinéa de l'article L. 356 du code précité, aux termes duquel : " ... le ministre chargé de la santé peut, après avis d'une commission ... autoriser individuellement à exercer ... des personnes françaises ou étrangères titulaires d'un diplôme, titre ou certificat de valeur scientifique reconnue équivalente par le ministre chargé des universités à celle d'un diplôme français permettant l'exercice de la profession et qui ont subi avec succès des épreuves définies par voie réglementaire. Le nombre maximum de ces autorisations est fixé par chaque année par le ministre chargé de la santé en accord avec la commission prévue ci-dessus et compte tenu du mode d'exercice de la profession" ;
Considérant que, par une décision du 29 avril 1993, le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE a refusé d'accorder l'autorisation d'exercer en France la profession de médecin à M. X..., titulaire d'un diplôme de docteur en médecine délivré par l'université de Damas (Syrie), dont, en 1987, la valeur scientifique avait été reconnue équivalente à celle du diplôme français de docteur en médecine par le ministre chargé des universités ;
Considérant qu'il ressort des énonciations du procès-verbal de la séance tenue le 12 février 1993 par la commission constituée en application du troisième alinéa, précité, de l'article L. 356 du code de la santé publique, que celle-ci a procédé à l'examen individuel de toutes les demandes d'autorisation qui lui étaient soumises et, notamment, de celle de M. X... ; qu'ainsi c'est à tort que le tribunal administratif de Paris s'est fondé, pour annuler la décision ministérielle du 29 avril 1993 ci-dessus mentionnée, sur l'absence d'examen, par la commission, des mérites de cette demande ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que l'absence de mention dans la décision contestée du 29 avril 1993 des délais et voies de recours est sans influence sur sa légalité ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979,modifié par la loi n° 86-76 du 17 janvier 1986 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : restreignent les libertés publiques ..., refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, refusent une autorisation ..." ; que la décision attaquée du 29 avril 1993 n'entre dans aucune des catégories de décisions définies par ces dispositions ; qu'en particulier, elle ne restreint l'exercice d'aucune liberté publique et ne refuse pas un avantage dont l'attribution constitue un droit, dès lors que M. X..., qui n'est pas titulaire de l'un des diplômes mentionnés au 1° de l'article L. 356-2 du code de la santé publique, ne remplit pas les conditions légales pour exercer en France la profession de médecin ; qu'elle ne refuse pas non plus une autorisation, au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, dès lors, elle n'avait pas à être motivée, en application de ce texte ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un rapport individuel a été établi sur les diplômes, titres ou certificats possédés par chacune des personnes ayant demandé à être autorisées, au titre de l'année 1992, à exercer en France la profession de médecin en application du troisième alinéa de l'article L. 356 du code de la santé publique ; que le procèsverbal, déjà mentionné, de la séance tenue le 12 février 1993 par la commission prévue par cet alinéa comporte aussi bien les mentions exigées par les dispositions du premier alinéa de l'article 14 du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983, selon lesquelles un tel document doit indiquer le nom et la qualité des membres présents, les questions traitées au cours de la séance et le sens de chacune des délibérations, que les éléments nécessaires à l'information de l'autorité chargée de prendre la décision ;
Considérant que les dispositions ci-dessus rappelées du troisième alinéa de l'article L. 356 du code de la santé publique, qui n'ont pas pour objet d'instituer un concours entre des candidats, n'interdisent pas au ministre, lorsqu'il est appelé à se prononcer sur les demandes d'autorisation d'exercer la médecine en France par des personnes françaises ou étrangères titulaires d'un diplôme, titre ou certificat reconnu équivalent au diplôme français de docteur en médecine, de tenir compte d'autres éléments que la valeur scientifique des demandeurs ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appréciation portée sur la demande de M. X..., au regard de l'ensemble des éléments qui pouvaient être légalement pris en compte, ait été entachée d'une erreur manifeste ;

Considérant, enfin, que le moyen tiré par M. X... de ce que l'application de l'arrêté ministériel du 5 mars 1993, qui a fixé le nombre maximum des autorisations individuelles d'exercice de la profession de médecin à accorder au titre de l'année 1992 en application du troisième alinéa de l'article L. 356 du code de la santé publique, ferait échec au principe d'égalité devant la loi, met en cause la conformité à la Constitution de cette disposition législative ; que le juge administratif n'est pas compétent pour connaître d'une telle contestation ; que le moyen par lequel M. X... entend soutenir que l'application du même arrêté ferait aussi échec à l'obligation faite à l'administration d'examiner cas par cas les demandes d'autorisation qui lui sont présentées doit être écarté, dès lors, ainsi qu'il a été dit, que la demande de l'intéressé a fait l'objet d'un examen de ses mérites propres ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision du 29 avril 1993 ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Paris du 6 décembre 1994 est annulé.
Article 2 : Les conclusions dirigées conte la décision du MINISTRE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE L'ASSURANCE MALADIE du 29 avril 1993 de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'emploi et de la solidarité, à M. Ahmed X... et au Conseil national de l'Ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 172052
Date de la décision : 13/01/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

55-03-01 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - CONDITIONS D'EXERCICE DES PROFESSIONS - MEDECINS.


Références :

Code de la santé publique L356, L356-2
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 14
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1
Loi 86-76 du 17 janvier 1986


Publications
Proposition de citation : CE, 13 jan. 1999, n° 172052
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Balmary
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:172052.19990113
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