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22/02/1999 | FRANCE | N°167521

France | France, Conseil d'État, 2 ss, 22 février 1999, 167521


Vu l'ordonnance en date du 24 février 1995, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 28 février 1995 par laquelle le Président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette cour par Mme X... épouse Y... demeurant ... ;
Vu la demande enregistrée le 7 février 1995 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée par Mme X... épouse Y... ; Mme X... épouse Y... demande que le Cons

eil d'Etat :
1°) annule le jugement du 9 décembre 1994 par leque...

Vu l'ordonnance en date du 24 février 1995, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 28 février 1995 par laquelle le Président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette cour par Mme X... épouse Y... demeurant ... ;
Vu la demande enregistrée le 7 février 1995 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée par Mme X... épouse Y... ; Mme X... épouse Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 9 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation 1° de la décision implicite du Préfet de police refusant de lui délivrer une carte de résident en tant que conjoint d'un ressortissant français 2° de la décision du 5 février 1992 dudit préfet refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salariée.
2°) annule pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bordry, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;

Sur la décision implicite de refus de délivrance d'une carte de résident en tant que conjoint d'un ressortissant français :
Considérant que la seule décision de refus de carte de résident dont justifie la requérante est celle résultant du silence gardé par l'administration sur sa demande du 29 septembre 1993 ; qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 24 août 1993 en vigueur à la date de la décision implicite attaquée : "Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public la carte de résident est délivrée de plein droit ...1°) à l'étranger marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier que la communauté de vie entre les époux Y... avait cessé au plus tard en 1991 ; que, par suite, le préfet de police a pu légalement estimer que Mme X... épouse Y... n'était pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé et de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ; qu'il ressort des pièces du dossier que si Mme X... épouse Y... vivait en concubinage en France avec un ressortissant marocain, et si leur premier enfant y est né et scolarisé, l'atteinte portée par la décision attaquée au droit au respect de la vie familiale de l'intéressée, qui a conservé des liens avec son pays d'origine et dont le second enfant est né et a vécu au Maroc, n'est pas disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;
Considérant que si la requérante invoque pour la première fois en appel un moyen tiré de l'absence de consultation de la commission de séjour des étrangers, ce moyen fondé sur une cause juridique distincte de celle dont relèvent les moyens de première instance n'est pas recevable ;
Sur la décision du 5 février 1992 refusant la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de salariée :
Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que la décision du 5 février 1992 ait été notifiée à Mme X... épouse Y... ; que si, en raison du recours gracieux qu'elle a formé contre ladite décision le 5 octobre 1993, l'intéressée se trouvait par là même avoir eu connaissance à cette dernière date de ladite décision dans des conditions faisant courir le délai de recours contentieux, celui-ci s'est trouvé prorogé du fait même de la présentation du recours gracieux et n'était pas expiré à la date du 4 avril 1994, à laquelle Mme X... épouse Y... a saisi le tribunal administratif de Paris de sa demande d'annulation de la décision du 5 février 1992 ; que la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande présentée par Mme X... épouse Y... doit être rejetée ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 341-1 du code du travail : "sauf dans le cas où l'étranger bénéficie de plein droit de la carte de résident par application des articles 15 et 16 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, pour accorder ou refuser le titre de travail sollicité, le préfet du département où réside l'étranger prend notamment en considération les éléments suivants d'appréciation ... 1) la situation de l'emploi ..." ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté ministériel du 14 décembre 1984 modifié par l'arrêté ministériel du 30 septembre 1987 applicable à la date de la décision attaquée : "la situation de l'emploi dans la profession demandée et dans la zone géographique où il compte exercer cette profession ne peut être opposée à un ressortissant étranger sollicitant la délivrance ou le renouvellement d'une autorisation de travail ... lorsque le demandeur entre dans l'une des catégories suivantes : 11° conjoint d'un ressortissant français ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite du retrait de sa carte de résident en qualité de conjoint d'un ressortissant français, Mme X... épouse Y... a sollicité une carte de séjour temporaire en qualité de salariée, laquelle lui a été refusée au motif que le préfet de Paris avait refusé, par décision du 27 décembre 1991, de lui délivrer une autorisation de travail en raison de la situation de l'emploi dans la profession de cuisinière ; que Mme X... épouse Y... figurait, en tant qu'épouse d'un ressortissant français, au nombre des étrangers candidats au séjour en qualité de salarié auxquels, en application des dispositions susrappelées, la situation de l'emploi n'était pas opposable ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté la demande de Mme X... épouse Y... tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 5 février 1992 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... épouse Y... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 9 décembre 1994, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en tant qu'elle est dirigée contre la décision du 5 février 1992 lui refusant un titre de séjour en qualité de salariée ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de Mme X... épouse Y... tendant à l'annulation de la décision du 5 février 1992. La décision du 5 février 1992 du préfet de police de Paris est annulée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X... épouse Y... est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X... épouse Y... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2 ss
Numéro d'arrêt : 167521
Date de la décision : 22/02/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01 ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS.


Références :

Arrêté du 14 décembre 1984 art. 1
Arrêté du 30 septembre 1987
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R102
Code du travail R341-1


Publications
Proposition de citation : CE, 22 fév. 1999, n° 167521
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bordry
Rapporteur public ?: M. Hubert

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:167521.19990222
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