La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/03/1999 | FRANCE | N°183102

France | France, Conseil d'État, 4 ss, 05 mars 1999, 183102


Vu 1°) sous le n° 183102 la requête enregistrée le 21 octobre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 25 août 1996 en tant que, par ce jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé la décision, distincte de l'arrêté du 21 août 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Assetou Z..., fixant le pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande de Mlle Assetou Z... présentée devant le tribunal

administratif de Paris en tant qu'elle tendait à l'annulation de cette déci...

Vu 1°) sous le n° 183102 la requête enregistrée le 21 octobre 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 25 août 1996 en tant que, par ce jugement, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé la décision, distincte de l'arrêté du 21 août 1996 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Assetou Z..., fixant le pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande de Mlle Assetou Z... présentée devant le tribunal administratif de Paris en tant qu'elle tendait à l'annulation de cette décision ;
Vu 2°) sous le n° 187032 la requête enregistrée le 10 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mlle Assetou Y... demeurant c/o Me Mylène A..., ... ; Mlle Assetou Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 25 août 1996 du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation desarrêtés des 21 et 23 août 1996 du préfet de police décidant sa reconduite à la frontière et la plaçant en rétention administrative ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdits arrêtés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Japiot, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées du préfet de police et de Mlle Z... sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les conclusions de Mlle Z... dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article 22-1 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( ...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle Z... s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 juillet 1996, de la décision du PREFET DE POLICE du 2 juillet 1996, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3° de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision en date du 2 juillet 1996 refusant à Mlle Z... un titre de séjour comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, dès lors, elle est suffisamment motivée ; que Mlle Z... n'apporte aucun élément à l'appui de ses affirmations selon lesquelles cette décisionserait fondée sur une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; qu'il suit de là que Mlle Z... n'est pas fondée à soutenir que la reconduite à la frontière dont elle a fait l'objet aurait été prise sur le fondement d'un refus de séjour illégal ;
Considérant que si Mlle Z..., de nationalité malienne, fait valoir qu'elle vit en France depuis 1984 et y a noué des liens personnels et qu'elle n'a plus d'attache dans son pays d'origine, il ressort des pièces du dossier qu'elle vit en concubinage avec un ressortissant étranger qui n'était pas, contrairement à ses affirmations, en situation régulière à la date de l'arrêté attaqué et n'a pas de famille en France ; que compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions de séjour de Mlle Z... en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DE POLICE en date du 21 août 1996 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a par suite pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur les conclusions de Mlle Z... dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté la plaçant en rétention administrative :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE POLICE ait méconnu les dispositions de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en décidant du maintien de Mlle Z... dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de 24 heures ;
Sur les conclusions du PREFET DE POLICE dirigées contre le jugement attaqué en tant qu'il a annulé la décision fixant le pays de renvoi de Mlle Z... :
Considérant qu'il ressort du rapprochement des dispositions des articles 22 et 27 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée susvisée, que le représentant de l'Etat dans le département et à Paris, le PREFET DE POLICE, compétent en vertu des dispositions expresses de l'article 22, pour prendre des mesures de reconduite à la frontière, l'est également pour prendre sur le fondement de l'article 27 ter les décisions fixant le pays de renvoi des personnes faisant l'objet d'une mesure de reconduite ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que la décision fixant le pays de renvoi constitue, aux termes de l'article 27 ter de l'ordonnance, une "décision distincte", M. X..., sous-directeur de la police générale à la préfecture de police, qui avait régulièrement reçu délégation de signature du PREFET DE POLICE, par arrêté en date du 11 juillet 1996 pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière prévus à l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, tenait de cette délégation compétence pour signer la décision fixant le pays de renvoi de Mlle Z..., laquelle avait fait, le même jour, l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; que par suite, le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris s'est fondé sur l'incompétence de l'autorité qui a pris la décision attaquée pour annuler ladite décision ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué en première instance par Mlle Z... ;
Considérant que Mlle Z... soutient qu'en raison des risques que lui ferait courir son retour vers son pays d'origine, cette décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que toutefois Mlle Z... n'assortit ses dires d'aucune précision de nature àétablir la réalité de ces risques ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le PREFET DE POLICE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé la décision distincte de l'arrêté du 21 août 1996, fixant le pays de renvoi de Mlle Z... ; d'autre part que Mlle Z... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés des 21 et 23 août 1996 décidant sa reconduite à la frontière et son placement d'office en rétention administrative ;
Article 1er : Le jugement du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 25 août 1996 est annulé en tant qu'il a annulé la décision distincte de l'arrêté de reconduite à la frontière, fixant le pays de destination.
Article 2 : La demande présentée par Mlle Z... devant le tribunal administratif de Paris et tendant à l'annulation de la décision distincte de l'arrêté de reconduite à la frontière, fixant le pays de destination est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la requête de Mlle Z... sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mlle Assetou Z..., au PREFET DE POLICE et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4 ss
Numéro d'arrêt : 183102
Date de la décision : 05/03/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22-1, art. 22, art. 35 bis, art. 27 ter


Publications
Proposition de citation : CE, 05 mar. 1999, n° 183102
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Japiot
Rapporteur public ?: M. Schwartz

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:183102.19990305
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award