Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 26 août 1998, présentée par M. Jamaa Y... demeurant ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 juillet 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 18 juin 1998 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990, la loi du 26 février 1992 et la loi du 24 août 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Guyomar, Auditeur,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Seine-Saint-Denis ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire français au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Sur le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 18 juin 1998, par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé la reconduite à la frontière de M. Y..., énonce de façon précise les circonstances qui justifient qu'il soit fait application à l'intéressé des dispositions de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ; que, par suite, il est suffisamment motivé ;
Sur la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :
Considérant que, par un arrêté du 21 juillet 1997, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet de la Seine-Saint-Denis a donné à M. Claude d'X..., secrétaire général de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, délégation pour signer notamment les arrêtés de reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que M. d'X... n'aurait pas été compétent pour signer l'arrêté attaqué manque en fait ;
Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :
Considérant que si M. Y... invoque la méconnaissance, par l'arrêté attaqué, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des pièces du dossier que la femme et les enfants du requérant résident au Maroc ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement du territoire français a porté, à son droit au respect de sa vie familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise ;
Considérant que si M. Y... allègue que sa présence en France est nécessaire pour lui permettre d'entretenir sa famille résidant au Maroc, cette circonstance ne suffit pas à établir que le préfet de la Seine-Saint-Denis, en prenant la décision de reconduite attaquée, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son arrêté sur la situation personnelle de M. Y... ;
Considérant que si M. Y... excipe de l'illégalité de la décision de refus de séjour sur le fondement de laquelle l'arrêté de reconduite a été pris, il ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 juin 1997 qui sont dépourvues de valeur réglementaire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'en dehors du cas prévu par l'article 77 de la loi du 8 février 1995, dont les conditions d'application ne sont pas remplies en l'espèce, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration ; qu'ainsi les conclusions de M. Y... tendant à la régularisation de sa situation administrative sont, en tout état de cause, irrecevables ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jamaa Y..., au préfet de la SeineSaint-Denis, et au ministre de l'intérieur .