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12/03/1999 | FRANCE | N°135626

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 12 mars 1999, 135626


Vu la requête, enregistrée le 25 mars 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Marie X..., demeurant à Dorgisière, Saint-Amandsur-Sèvre (79700) Mauléon ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 décembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant 1/ à l'annulation de la déclaration d'ouverture de travaux du 21 avril 1975, modifiée le 19 septembre 1975, 2/ à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 12 février 1982 autorisant la Compagnie générale des matières nucléaire

s (C.o.g.e.m.a.) à modifier son exploitation de la mine de Dorgisière, 3/ ...

Vu la requête, enregistrée le 25 mars 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Marie X..., demeurant à Dorgisière, Saint-Amandsur-Sèvre (79700) Mauléon ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 20 décembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant 1/ à l'annulation de la déclaration d'ouverture de travaux du 21 avril 1975, modifiée le 19 septembre 1975, 2/ à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 12 février 1982 autorisant la Compagnie générale des matières nucléaires (C.o.g.e.m.a.) à modifier son exploitation de la mine de Dorgisière, 3/ à l'annulation des arrêtés préfectoraux du 28 juillet 1979 et du 28 juillet 1981 concernant les tirs, 4/ à l'annulation de la lettre de la C.o.g.e.m.a. du 30 décembre 1983, 5/ à l'annulation d'une autorisation de pompage, 6/ à la condamnation de la commune de Mauléon à lui verser la somme de 16 000 F au titre des préjudices qu'il a subis, 7/ à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F au titre des frais irrépétibles pour la procédure ayant abouti à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 4 septembre 1980, et à lui verser la somme de 30 000 F au titre des frais irrépétibles pour les présentes procédures ;
2°) d'annuler les décisions attaquées ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 35 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 58-997 du 23 octobre 1958 ;
Vu le code minier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 ;
Vu le décret du 14 août 1923 ;
Vu le décret n° 59-680 du 19 mai 1959 ;
Vu le décret n° 70-789 du 29 octobre 1970 ;
Vu le décret n° 72-645 du 4 juillet 1972 ;
Vu le décret n° 77-759 du 7 juillet 1977 ;
Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;
Vu le décret n° 80-330 du 7 mai 1980 ;
Vu le décret n° 90-222 du 9 mars 1990 ;
Vu le décret n° 93-742 du 29 mars 1993 ;
Vu le décret n° 93-743 du 29 mars 1993 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lerche, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Delaporte, Briard, avocat de la Compagnie générale des matières nucléaires - C.o.g.e.m.a.

- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 12 février 1982 autorisant la C.o.g.e.m.a. à modifier son exploitation de la mine de la Dorgisière :
Considérant que l'absence de notification et de publication d'une décision est sans incidence sur sa légalité ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité dudit arrêté pour défaut de notification et de publication ne peut qu'être rejeté ;
Considérant que l'autorisation de modifier l'exploitation de la mine de la Dorgisière, accordée par arrêté préfectoral du 12 février 1982 à la C.o.g.e.m.a., ne revêt pas le caractère d'une décision défavorable au sens des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cet arrêté n'est pas fondé ;
Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu, l'arrêté attaqué du 12 février 1982, relatif à une exploitation de mines, n'était soumis ni à la législation sur les installations classées, ni aux dispositions de la loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement, qui est intervenue postérieurement à la date à laquelle a été pris l'arrêté attaqué ;
Considérant que si le requérant soutient que l'arrêté attaqué aurait dû être précédé d'une étude d'impact, il résulte des dispositions combinées des articles 10, 11, 14 et 15 du décret du 7 mai 1980 que les modifications apportées aux travaux d'exploitation de mines sont soumises seulement à l'établissement d'une notice d'impact lorsqu'elles ne sont pas de nature "à entraîner un changement notable de l'impact sur l'environnement" ; qu'en l'espèce, les modifications demandées par la C.o.g.e.m.a., qui se limitent à accroître l'emprise de la mine de 5 m sur le bord nord-est, à l'approfondir de 3 m et à modifier la pente de la route d'accès au chantier n'entraînent pas de changements notables de l'impact sur l'environnement ; que, par suite, le moyen invoqué n'est pas fondé ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X..., il ne ressort pas des pièces du dossier que des erreurs, omissions ou fausses indications auraient entaché d'irrégularité la procédure de délivrance de l'arrêté attaqué ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X..., l'arrêté attaqué n'a pour objet ni l'expropriation d'un terrain privé, ni l'installation de servitudes sur celuici ; que, dès lors, les moyens tirés de la violation des articles du code minier et des autres textes réglementant l'expropriation pour cause d'utilité publique ou l'installation de servitudes sont inopérants et doivent être rejetés ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12-I a) du décret du 4 juillet 1972 ... : "les bords des excavations des mines et carrières à ciel ouvert sont établis et tenus à distance horizontale de dix mètres au moins des bâtiments, monuments ou constructions quelconques publics ou privés, ainsi que des murs de clôture qui enceignent des cimetières ou des cours attenants à des habitations. Ils ne peuvent déborder les limites du périmètre sur lequel porte le droit d'exploitation" ; qu'il ressort des pièces du dossier que la maison de M. X... est à 35 m du bord le plus rapproché de l'excavation ; que si un bâtiment de stabulation vétuste se trouvait à moins de 10 m du périmètre de la carrière, il a fait l'objet d'une expropriation ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées, ni à invoquer celles de l'article 70 du code minier, applicables seulement aux "puits, sondages de plus de 100 m et galeries" et non aux mines à ciel ouvert ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis, au regard des dispositions des articles 84 et 85 du code minier et de celles du décret n° 77-789 du 7 juillet 1977, une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des travaux d'extraction sur la sécurité et la salubrité publiques ni sur la solidité de certains édifices ;
Considérant que le requérant ne saurait utilement se prévaloir, à l'appui de son recours contre l'arrêté du 12 février 1982, de l'illégalité prétendue de l'arrêté du 23 mars 1982, qui établit des servitudes sur diverses parcelles, ce dernier arrêté étant, en tout état de cause, intervenu postérieurement à l'arrêté attaqué ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce qui est soutenu, la manière dont la C.o.g.e.m.a. aurait procédé à la mise en oeuvre de l'autorisation initiale aurait été de nature à justifier le refus de l'extension mineure d'exploitation demandée ;
Considérant que les moyens tirés de la violation des lois des 17 juillet 1978 et 11 juillet 1979, des articles 640 et suivant du code civil et des articles 97 et suivants du code rural ne sont assortis d'aucune précision de nature à en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, ils ne peuvent être accueillis ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 février 1982 du préfet des Deux Sèvres ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation d'une autorisation de pompage :
Considérant que si M. X... demande l'annulation de l'autorisation, explicite ou tacite, qu'aurait accordée le maire de Mauléon ou l'autorité administrative chargée de la police des eaux, aux consorts Y... pour les pompages à des fins agricoles qu'ils effectuent dans la mine à ciel ouvert de la Dorgisière, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une décision administrative soit intervenue en l'espèce ;
Sur les conclusions tendant à ce que le Conseil d'Etat adresse une injonction à l'administration :

Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif, en dehors des cas prévus par la loi du 8 février 1995, de se substituer à l'administration ou de lui adresser des injonctions ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'autorisation d'ouverture de travaux délivrée par l'ingénieur en chef des mines le 17 juin 1975 et à ce que le Conseil d'Etat tire les conséquences des fautes qu'aurait commises l'avocat de M. X... en première instance :
Considérant que ces conclusions sont présentées pour la première fois en appel ; que, par suite et en tout état de cause, elles ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la lettre du 30 décembre 1983 de la C.o.g.e.m.a. et de l'acte d'achat de terrains :
Considérant que les demandes présentées par M. X... devant le tribunal administratif de Poitiers et tendant à l'annulation de la lettre du 30 décembre 1983 de la C.o.g.e.m.a. et de l'acte d'achat passé entre celle-ci et un particulier, ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative ;
Considérant, toutefois, que l'appel dirigé contre le jugement qui a rejeté ces conclusions doit être porté devant le juge d'appel de droit commun au sein de l'ordre juridictionnel administratif ; que ni les dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif, ni celles du décret du 17 mars 1992 pris pour son application, ne confèrent compétence au Conseil d'Etat pour connaître de l'appel formé par M. X... ; qu'il y a lieu, dès lors, de transmettre ces conclusions à la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la déclaration d'ouverture des travaux du 21 avril 1975 :
Considérant que la déclaration, par laquelle la C.o.g.e.m.a. a fait connaître l'ouverture des travaux sur le site, n'est pas une décision faisant grief ; que, par suite, M. X... n'est pas recevable à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de la commune de Mauléon à verser au requérant une indemnité de 16 000 F et à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 150 000 F :
Considérant qu'aux termes de l'article 41 de l'ordonnance du 31 juillet 1945 : "la requête des parties doit être signée par un avocat au Conseil d'Etat" ; qu'en vertu de l'article 42 de la même ordonnance, la requête peut être signée par la partie intéressée ou son mandataire lorsque des lois spéciales ont dispensé du ministère d'avocat" ; que la requête de M. X... présente des conclusions tendant à l'octroi d'indemnités de 16 000 F et 150 000 F au titre des préjudices subis du fait de l'exploitation de la mine de la Dorgisière, autorisée par l'arrêté du 12 février 1982 ; qu'aucun texte ne dispense une telle demande du ministère d'un avocat au Conseil d'Etat ; que faute pour M. X... d'avoir répondu à l'invitation qui lui avait été faite de recourir à ce ministère et de régulariser ainsi sa requête, ses conclusions indemnitaires, présentées sans le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat, ne sont pas recevables ;
Sur les autres conclusions de la requête :

Considérant que les conclusions à fin d'annulation des arrêtés préfectoraux du 28 juillet 1979 et du 28 juillet 1981 concernant les tirs effectués dans la mine de la Dorgisière, ne sont assortis d'aucun moyen permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que, par suite, elles ne peuvent être accueillies ;
Considérant que les demandes de M. X... dirigées contre les décisions n° 48-416 du 6 mars 1987 et n° 86-935 du 20 novembre 1987 du Conseil d'Etat statuant au contentieux n'entrent dans aucun des cas énumérés par les articles 75 à 79 de l'ordonnance n° 451708 du 31 juillet 1945 ; que, par suite, les conclusions de M. X... tendant à la révision de ces arrêts ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant, d'une part, que la procédure engagée par M. X..., et ayant abouti à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 4 septembre 1980 par la décision du Conseil d'Etat du 6 mars 1987, s'est achevée à cette date ; que les conclusions du requérant tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 15 000 F exposée par lui au titre de cette procédure sont, dès lors, irrecevables ;
Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme de 30 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui dans cette instance :
Sur les conclusions de la C.o.g.e.m.a. tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner M. X... à payer à la C.o.g.e.m.a. la somme de 5 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les conclusions de la requête de M. X... tendant à l'annulation de la lettre du 30 décembre 1983 de la C.o.g.e.m.a. ainsi que de l'acte d'achat de terrains, sont renvoyées devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ;
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
Article 3 : M. X... versera à la C.o.g.e.m.a. une somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Marie X..., à la Compagnie générale des matières nucléaires (C.o.g.e.m.a.) et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 135626
Date de la décision : 12/03/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MINES ET CARRIERES - MINES - EXPLOITATION DES MINES.

MINES ET CARRIERES - CARRIERES - AUTORISATION D'EXPLOITATION.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - RENVOI DE CONCLUSIONS A LA JURIDICTION COMPETENTE.


Références :

Arrêté du 28 juillet 1979
Arrêté du 04 septembre 1980
Arrêté du 28 juillet 1981
Arrêté du 12 février 1982
Arrêté du 23 mars 1982
Code minier 12, 70, 84, 85
Code rural 97
Décret 72-645 du 04 juillet 1972
Décret 77-789 du 07 juillet 1977
Décret 80-330 du 07 mai 1980 art. 10, art. 11, art. 14, art. 15
Loi 78-753 du 17 juillet 1978
Loi 79-587 du 11 juillet 1979
Loi 83-630 du 12 juillet 1983
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-1708 du 31 juillet 1945 art. 41, art. 75 à 79


Publications
Proposition de citation : CE, 12 mar. 1999, n° 135626
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lerche
Rapporteur public ?: M. Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:135626.19990312
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