Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 décembre 1996 et 10 avril 1997 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. François Y... et M. Philip Z..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 26 septembre 1996 par laquelle le Conseil national de l'Ordre des médecins a annulé la décision du 10 avril 1996 du conseil départemental de l'ordre de Paris, refusant à M. Lucien X... l'autorisation de s'installer ... ;
2°) de condamner le Conseil national de l'Ordre des médecins à leur payer une somme de 12 000 F, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Balmary, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Richard, Mandelkern, avocat de M. Y... et de M. Z..., de la SCP Vier, Barthélemy, avocat du Conseil national de l'Ordre des médecins et de la SCP Boré, Xavier, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 90 du code de déontologie médicale, établi par le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 : "Un médecin ne doit pas s'installer dans un immeuble où exerce un confrère de même discipline sans l'accord de celui-ci ou sans l'autorisation du conseil départemental de l'ordre. Cette autorisation ne peut être refusée que pour des motifs tirés d'un risque de confusion pour le public" ; que le risque de confusion ne peut résulter, sauf circonstances particulières, du seul fait que deux ou plusieurs praticiens exerceraient dans le même immeuble ;
Considérant que, pour annuler la décision du 10 avril 1996 par laquelle le conseil départemental de l'ordre des médecins de Paris a refusé à M. X..., médecin gynécologue-obstétricien, l'autorisation d'installer son cabinet ... (12ème), le Conseil national de l'Ordre a relevé que ce cabinet et celui de MM. Y... et Z..., qui exercent la même spécialité, étaient situés dans le même immeuble, mais à des étages différents et desservis par deux entrées distinctes ; qu'il a, de la sorte, suffisamment motivé la décision par laquelle il a estimé que l'installation de M. X... au ... n'entraînerait pas un risque de confusion pour le public ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des éléments de fait ci-dessus mentionnés, cette installation présenterait des particularités de nature à créer un risque de confusion pour le public ; que M. X... fait, en outre, valoir sans être contredit, que le magasin qui sépare les deux entrées de l'immeuble qui desservent son cabinet et celui de MM. Y... et Z..., n'est pas la propriété du cabinet de groupe au sein duquel il entend exercer sa profession, mais celle d'un opticien ; qu'il ne peut donc servir de lieu d'accueil pour les clients de ce cabinet, avec lequel il n'a aucun lien, que sa vitrine n'est pas davantage destinée à recevoir les plaques professionnelles des dix médecins du groupe et qu'enfin, l'existence de ce local ne peut créer un risque de confusion notamment pour les patientes qui viennent passer au cabinet de MM. Y... et Z... les examens prescrits par ces derniers dans l'exercice des fonctions qui sont les leurs à l'hôpital voisin des Diaconesses ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MM. Y... et Z... ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision contestée du Conseil national de l'Ordre des médecins du 26 septembre 1996 ;
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le Conseil national de l'Ordre des médecins, qui n'est pas, dans la présenteinstance la partie perdante, soit condamné à payer à MM. Y... et Z... la somme qu'ils demandent au titre des frais engagés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner MM. Y... et Z..., par application de l'article 75-I précité, à payer au Conseil national de l'Ordre des médecins et à M. X... les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de MM. Y... et Z... est rejetée.
Article 2 : MM. Y... et Z... paieront à M. X... une somme de 10 000 F et au Conseil national de l'Ordre des médecins une somme de 7 236 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. François Y..., à M. Philip Z..., à M. Lucien X..., au Conseil national de l'Ordre des médecins et au ministre de l'emploi et de la solidarité.