Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 avril 1994 et 8 août 1994 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (ROC) dont le siège est à SaintQuentin, BP 261 (02106), représenté par son président en exercice ; le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 1er février 1994 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 15 septembre 1992 par laquelle le préfet de l'Aisne a refusé d'accorder l'agrément à la désignation de M. Francis X... en qualité de garde particulier de l'association RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE pour la surveillance d'un refuge créé par celle-ci à Veslud ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
3°) de condamner l'Etat à payer au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (ROC) une somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi du 12 avril 1892 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fougier, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Boré, Xavier, avocat du RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 228-28 du code rural : "Les gardes chasse particuliers assermentés constatent par procès-verbaux les infractions aux dispositions du présent titre qui portent préjudice aux détenteurs des droits de chasse qui les emploient. / Leurs procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les gardes chasse particuliers doivent constater par procès-verbaux les infractions aux dispositions du titre II du livre II du code rural portant préjudice aux détenteurs des droits de chasse qui les emploient ; que les procès-verbaux dressés, qui font foi jusqu'à preuve contraire, doivent rapporter la nature exacte des infractions constatées afin de permettre à l'autorité judiciaire compétente d'en déterminer la qualification et d'en assurer, le cas échéant, la poursuite ; que le titre II du livre II du code rural visé par l'article L. 228-28 comporte des dispositions qui exigent, pour que soient éventuellement constatées les infractions résultant de leur méconnaissance, des connaissances en matière cynégétique et de réglementation de la chasse ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Aisne a pu légalement, lors de l'instruction de la demande d'agrément de garde particulier présentée par le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE, faire procéder au contrôle des connaissances du candidat proposé en matière cynégétique ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdit ou ne limite la faculté de l'autorité administrative de recueillir les avis qu'elle juge utiles pour éclairer la décision qu'elle est amenée à prendre ; qu'ainsi le préfet de l'Aisne pouvait, avant de se prononcer sur la demande d'agrément qui lui était soumise, consulter la fédération départementale des chasseurs de ce département chargée, en vertu de l'article L. 221-2 du code rural, de la répression du braconnage, de la constitution et de l'aménagement des réserves de chasse, de la protection et de la reproduction du gibier ;
Mais considérant qu'en fondant sa décision de rejet de la demande d'agrément exclusivement sur l'avis défavorable de la fédération départementale des chasseurs, motivé par l'absence de réponse du candidat au questionnaire qui lui avait été présenté, le préfet de l'Aisne a commis une erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Aisne refusant l'agrément comme garde-chasse particulier de M. X... ;
Sur les conclusions du RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE une somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 1er février 1994 et la décision du préfet de l'Aisne du 15 septembre 1992 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE une somme de 10 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE et au ministre de l'intérieur.