Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 octobre 1995, présentée par M. Miguel X..., demeurant ... ; M. X... demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision en date du 8 septembre 1995 par laquelle le ministre de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion lui a notifié le décret du 6 décembre 1977 lui refusant l'acquisition de la nationalité française ;
Vu les autres pièces du dossier;
Vu le code de la nationalité française ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme de Margerie, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Hubert, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 37-1 du code de la nationalité française, dans sa rédaction issue de la loi du 9 janvier 1973 : "l'étranger ... qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut acquérir cette nationalité par déclaration ..." ; qu'aux termesde l'article 39 du même code : "le gouvernement peut s'opposer, par décret en Conseil d'Etat, à l'acquisition de la nationalité française dans le délai d'un an à compter de la date prévue à l'article 106, deuxième alinéa, pour indignité, défaut d'assimilation ou lorsque la communauté de vie a cessé entre les époux. En cas d'opposition du gouvernement, l'intéressé est réputé n'avoir jamais acquis la nationalité française" ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 106 du même code : "le délai d'opposition court à compter de la date du récépissé prévu à l'article 105, deuxième alinéa ..." ;
Considérant que M. X... a souscrit le 7 décembre 1976, sur le fondement des dispositions précitées, une déclaration en vue d'acquérir la nationalité française, dont il lui a été donné récépissé le même jour ; qu'un décret portant opposition à l'acquisition de la nationalité française par M. X..., a été pris le 6 décembre 1977, mais faute d'avoir été notifié, n'a pas produit d'effet ; que toutefois, par lettre datée du 8 septembre 1995 et que l'intéressé a reçue le 3 octobre 1995, le ministre de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion a entendu notifier à M. X... le décret d'opposition signé le 6 décembre 1977 ;
Considérant qu'eu égard au délai anormalement long, et non imputable à M. X..., écoulé depuis la signature du décret du 6 décembre 1977 ce décret n'était plus susceptible d'être notifié ; qu'ainsi, la lettre du 8 septembre 1995 doit être regardée comme ayant notifié à M. X... une nouvelle décision d'opposition, qui lui fait par elle-même grief ; que cette nouvelle décision ne satisfaisant pas aux conditions, notamment de délai, auxquelles la loi subordonne la faculté d'opposition à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger, M. X... est fondé à en demander l'annulation ;
Article 1er : La lettre du ministre de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion du 8 septembre 1995 est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Miguel X... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.