Vu 1°), sous le n° 186 333, la requête, enregistrée le 18 mars 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 17 février 1997 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé ses arrêtés en date du 5 février 1997 décidant la reconduite à la frontière de M. Toufik Y... et fixant le pays à destination duquel il sera éloigné et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. Y... ;
- ordonne le sursis à exécution de ce jugement ;
- rejette la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif ;
Vu 2°), sous le n° 186 334, la requête, enregistrée le 18 mars 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 17 février 1997 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé ses arrêtés en date du 5 février 1997 décidant la reconduite à la frontière de Mme Hayat Y... née X... et fixant le pays à destination duquel elle sera éloignée et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à Mme Y... ;
- ordonne le sursis à exécution de ce jugement ;
- rejette la demande présentée par Mme Y... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Donnat, Auditeur,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la légalité des arrêtés ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme Y... :
Considérant que M. et Mme Y..., qui sont entrés régulièrement en France respectivement en 1991 et 1992, suivent conjointement un traitement médical spécialisé dont l'interruption compromettrait gravement les chances de succès et qui ne peut être assuré dans le pays vers lequel ils devraient être reconduits ; que, dans les circonstances de l'espèce, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, en ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme Y... à destination de l'Algérie, a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une telle mesure sur la situation des intéressés ; que, dès lors, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé sesarrêtés en date du 5 février 1997 ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme Y... et fixant le pays à destination duquel ils devraient être reconduits ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'injonction de délivrer une carte de séjour à M. et Mme Y... :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure assortie le cas échéant d'un délai d'exécution par le même jugement ou le même arrêt" ;
Considérant que la compétence spéciale attribuée par l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 au président du tribunal administratif ou à son délégué est limitée au jugement des recours formés contre les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ; que, s'il est saisi de conclusions fondées sur l'article L. 8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le président du tribunal administratif ou son délégué n'est pas compétent pour y statuer et doit les renvoyer au tribunal administratif statuant collégialement ; qu'il suit de là que l'article 2 des jugements attaqués par lesquels le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a enjoint au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS de délivrer un titre de séjour à M. et Mme Y... doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur les conclusions de M. et Mme Y... tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte à l'administration de leur délivrer un titre de séjour ;
Considérant que l'annulation des arrêtés ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme Y..., si elle implique, en application des dispositions du III de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, qu'une autorisation provisoire de séjour leur soit délivrée jusqu'à ce que le préfet ait à nouveau statué sur leur cas, n'implique pas nécessairement qu'un titre de séjour leur soit délivré ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. et Mme Y... ne peuvent être accueillies ;
Sur les frais exposés par M. et Mme Y... et non compris dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à chacun des époux Y... la somme de 5 000 F qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'article 2 des jugements n°s 972143/3/2 et 972144/3/2 en date du 17 février 1997 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS et les conclusions de M. et Mme Y... devant le tribunal administratif tendant auprononcé d'une injonction sont rejetés.
Article 3 : L'Etat versera à chacun des époux Y... une somme de 5 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, à M. et Mme Y... et au ministre de l'intérieur.