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14/04/1999 | FRANCE | N°186386

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 14 avril 1999, 186386


Vu la requête enregistrée le 20 mars 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE SETUCAF dont le siège est ... ; la SOCIETE SETUCAF demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 21 janvier 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du 28 décembre 1994 du tribunal administratif de Paris annulant les titres exécutoires émis à son encontre le 25 septembre 1992 par l'Office national interprofessionnel des céréales (ONIC) ;
2°) de condamner l'ONIC à lui verser la somme de 54 270 F au titre de l'art

icle 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du doss...

Vu la requête enregistrée le 20 mars 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE SETUCAF dont le siège est ... ; la SOCIETE SETUCAF demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 21 janvier 1997 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du 28 décembre 1994 du tribunal administratif de Paris annulant les titres exécutoires émis à son encontre le 25 septembre 1992 par l'Office national interprofessionnel des céréales (ONIC) ;
2°) de condamner l'ONIC à lui verser la somme de 54 270 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement (CEE) n° 3665/87 de la Commission du 27 novembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 97-1177 du 24 décembre 1997 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Séners, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE SETUCAF et de la SCP Vincent, Ohl, avocat de l'Office national interprofessionnel des céréales,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le 19 octobre 1987, la SOCIETE SETUCAF a obtenu un certificat d'exportation portant sur 130 000 tonnes de blé à destination de plusieurs pays d'Afrique mais qu'à la suite d'enquêtes administratives l'Office national interprofessionnel des céréales (ONIC) a constaté que les quantités livrées au Niger faisaient apparaître un déficit de 454,17 tonnes et que celles livrées au Gabon et au Cameroun avaient été partiellement détruites à l'arrivée pour raisons sanitaires, à concurrence respectivement de 762 tonnes et 1 193 tonnes ; qu'à la suite de ces constats, l'ONIC a réclamé à la SOCIETE SETUCAF le remboursement des restitutions à l'exportation accordées au titre des marchandises exportées vers ces pays et a émis en conséquence le 12 juin 1992 deux titres exécutoires pour un montant total de 2 530 420,26 F ; que si le tribunal administratif de Paris a annulé ces titres exécutoires par un jugement du 28 décembre 1994, la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement par un arrêt en date du 21 janvier 1997 contre lequel la SOCIETE SETUCAF se pourvoit en cassation ;
Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 5 du règlement n° 3665/87 du 27 novembre 1987 de la Commission des communautés européennes : "Le paiement de la restitution différenciée ou non différenciée est subordonné, en sus de la condition que le produit ait quitté le territoire douanier de la Communauté, à la condition que le produit ait été, sauf s'il a péri en cours de transport par suite d'un cas de force majeure, importé dans un pays tiers, et, le cas échéant, dans un pays tiers déterminé dans les douze mois suivant la date d'acceptation de la déclaration d'exportation : / a) lorsque des doutes sérieux existent quant à la destination réelle du produit/ b) lorsque le produit est susceptible d'être réintroduit dans la Communauté par suite de la différence entre le montant de la restitution applicable au produit exporté et le montant des droits à l'importation applicables à un produit identique à la date d'acceptation de la déclaration d'exportation. ( ...)/ En outre, les services compétents des Etats membres peuvent exiger des preuves supplémentaires de nature à démontrer à la satisfaction des autorités compétentes que le produit a été effectivement mis en l'état, sur le marché du pays tiers d'importation" ; qu'il résulte clairement de ces dispositions que, dans tous les cas où il y a lieu à versement de restitutions, le paiement des sommes correspondantes est subordonné à la preuve que le produit a été mis sur le marché dans le pays de destination ;

Considérant qu'aux termes de l'article 13 du même règlement : "Aucune restitution n'est octroyée lorsque les produits ne sont pas de qualité saine, loyale et marchande et, si ces produits sont destinés à l'alimentation humaine, lorsque leur utilisation à cette fin est exclue ou considérablement diminuée en raison de leurs caractéristiques ou de leur état" ; qu'il résulte clairement de la combinaison de ces dispositions et de celle de l'article 5 précité que, saufcas de force majeure survenu lors du transport, la destruction de marchandises pour raison sanitaire par les autorités du pays destinataire fait obstacle à ce que les marchandises soient regardées comme ayant été mises sur le marché et par voie de conséquence, à ce que les restitutions soient versées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en jugeant qu'il appartenait à la société requérante d'apporter la preuve que le blé pour lequel elle avait obtenu un certificat d'exportation avait été mis sur le marché des pays de destination la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant que si l'article 18 du règlement communautaire précité énumère une liste de documents pouvant permettre à l'exportateur d'établir la réalité de la mise à la consommation dans le pays tiers, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que les autorités du pays d'exportation estiment, sur la foi d'autres éléments de preuve dont elles disposent, qu'une opération d'exportation est entachée de fraude et qu'elles décident, pour ce motif, sous le contrôle du juge, de ne pas accorder de restitutions à l'exportation ; que, par suite, la cour n'a ni méconnu ces dispositions, ni fait reposer à tort sur la seule société requérante la charge de la preuve en estimant que les procès-verbaux de la direction générale des douanes françaises permettaient d'établir la fraude alléguée portant sur la marchandise livrée au Niger, nonobstant les attestations produites par la SOCIETE SETUCAF dont la cour a souverainement apprécié le caractère probant ; qu'il ne ressort pas des pièces soumises aux juges du fond que la cour ait dénaturé les faits de l'espèce en estimant que le directeur commercial de la SOCIETE SETUCAF avait reconnu avoir falsifié plusieurs certificats de mise à la consommation ;
Considérant que la cour administrative d'appel s'est bornée à relever, dans l'arrêt attaqué, que la SOCIETE SETUCAF n'établissait ni même ne soutenait que la détérioration de 1 955 tonnes de blé destinées au Gabon et au Cameroun était due à un événement de force majeure ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait dénaturé les pièces du dossier en déniant ce caractère à la tempête subie par le navire transporteur doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 20-1 du règlement susmentionné de la Commission des communautés européennes : "Par dérogation à l'article 16 et sans préjudice de l'article 5, une partie de la restitution est payée dès que la preuve est apportée que le produit a quitté le territoire douanier de la Communauté" ; que ces dispositions n'ont clairement ni pour objet ni pour effet de conférer un caractère définitif à l'avance ainsi versée, laquelle doit être remboursée par l'exportateur s'il s'avère que les conditions définies à l'article 5 de ce règlement ne sont pas remplies ; que, par suite, en jugeant que cette avance n'était pas définitivement acquise par la société exportatrice, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Office national interprofessionnel des céréales, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE SETUCAF la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner la SOCIETE SETUCAF à payer à l'office une somme de 15 000 F au titre des frais de même nature qu'il a exposés ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE SETUCAF est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE SETUCAF est condamnée à payer à l'Office national interprofessionnel des céréales la somme de 15 000 F au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SETUCAF, à l'Office national interprofessionnel des céréales et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

14-07 COMMERCE, INDUSTRIE, INTERVENTION ECONOMIQUE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - COMMERCE EXTERIEUR.


Références :

Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 14 avr. 1999, n° 186386
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Séners
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Formation : 3 / 5 ssr
Date de la décision : 14/04/1999
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 186386
Numéro NOR : CETATEXT000007990712 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1999-04-14;186386 ?
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