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05/05/1999 | FRANCE | N°158821

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 05 mai 1999, 158821


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mai et 26 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. et Mme Tayeb X..., demeurant ..., M. et Mme Jacques Y..., demeurant Le Robinson, Côte de Surel (26 230), Mlle Marie-Thérèse Z..., demeurant ..., Mlle Marie-Christine Z..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000), Mme Gisèle A..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000), M. et Mme Thierry B..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000) et M. Jean

Claude C..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entra...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 26 mai et 26 septembre 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. et Mme Tayeb X..., demeurant ..., M. et Mme Jacques Y..., demeurant Le Robinson, Côte de Surel (26 230), Mlle Marie-Thérèse Z..., demeurant ..., Mlle Marie-Christine Z..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000), Mme Gisèle A..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000), M. et Mme Thierry B..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000) et M. Jean Claude C..., demeurant "Le Triolet", 11 ter du Forest d'Entrais, à Gap (05000) ; ils demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 22 mars 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a, faisant droit aux conclusions de la requête de la SCI "Le Clos Boyer", annulé le jugement du 3 juillet 1992 du tribunal administratif de Marseille qui avait, sur leur demande, annulé l'arrêté du 22 février 1989 du maire de Gap accordant à la SCI "Le Clos Boyer" un permis de construire modificatif concernant l'immeuble "Le Triolet" ;
2°) de condamner la commune de Gap et la SCI "Le Clos Boyer" à leur payer une somme de 15 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Ribadeau Dumas, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de M. Tayeb X... et autres,
- les conclusions de M. Honorat, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme : "La demande de permis de construire est présentée, soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain ..." ;
Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article 25, b) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, les travaux affectant les parties communes d'un immeuble sont soumis à autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un arrêté du 23 mai 1984, le maire de Gap (Hautes-Alpes) a autorisé la société civile immobilière "Le Clos Boyer" à construire, au lieudit "Clos le Boyer", un immeuble à usage d'habitation et de bureaux dénommé "Le Triolet", destiné à être vendu en l'état futur d'achèvement, sous le régime de la copropriété ; que, par un arrêté ultérieur, du 22 février 1989, le maire de Gap a délivré à la SCI "Le Clos Boyer", sur présentation d'une demande signée par sa gérante, un permis de construire modificatif, autorisant la suppression de sept emplacements pour le stationnement des véhicules, prévus, en tant que partie commune, dans le règlement de copropriété et figurant sur les plans annexés à la demande du permis de construire initial ; que, pour juger que, même en l'absence, non contestée, d'une délibération de l'assemblée générale des copropriétaires l'ayant autorisée à formuler cette demande de permis modificatif, la SCI "Le Clos Boyer" justifiait d'un titre l'habilitant à le faire et, par suite, que cette société était fondée à demander l'annulation du jugement du 3 juillet 1992 par lequel, faisant droit aux conclusions de la demande dont il avait été saisi par M. et Mme ALAOUI et par six autres copropriétaires de l'immeuble "Le Triolet", le tribunal administratif de Marseille avait annulé le permis de construire modificatif du 22 février 1989, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée, dans les motifs de son arrêt du 22 mars 1994, sur les stipulations de l'article 2 du cahier des charges et conditions des ventes en l'état futur d'achèvement des biens et droits immobiliers dépendant de cet immeuble, selon lesquelles la SCI "Le Clos Boyer" devait conserver, en dépit de la passation des actes de vente, la qualité de maître de l'ouvrage, notamment dans les relations avec toutes les administrations afin de conduire l'opération de construction jusqu'à la délivrance du certificatde conformité ; qu'en statuant ainsi, alors que le permis de construire modificatif sollicité avait pour objet, ainsi qu'il a été dit, de supprimer un élément des parties communes prévu dans le règlement de copropriété et que l'article 2 du cahier des charges ne donnait clairement pouvoir à la SCI "Le Clos Boyer" d'apporter, le cas échéant, à ce règlement des modifications qu'à la condition que celles-ci ne portent pas atteinte aux droits acquis par les copropriétaires sur les parties privatives et sur les parties communes de l'immeuble, la cour a dénaturé ces stipulations ; que M. et Mme X... et autres sont, dès lors, fondés à demander l'annulation de son arrêt du 22 mars 1994 ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;
Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que la SCI "Le Clos Boyer" ne disposait, ni en vertu d'une délibération de l'assemblée générale des copropriétaires, ni sur le fondement des clauses du cahier des charges et conditions des ventes en l'état futur d'achèvement des biens et droits immobiliers dépendant de l'immeuble "Le Triolet", d'un titre l'habilitant à présenter la demande qui est à l'origine du permis de construire modificatif contesté ; que le maire de Gap, qui avait lui même accordé le permis de construire initialement sollicité par la société, en 1984, ne pouvait ignorer, à la date à laquelle il a délivré le permis modificatif, que celui-ci concernait un immeuble en copropriété et devait, en conséquence, s'assurer que la SCI "Le Clos Boyer" disposait des autorisations nécessaires pour le demander ; que son arrêté du 22 février 1989 est, par suite, entaché d'illégalité ; que la SCI "Le Clos Boyer" n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 3 juillet 1992, le tribunal administratif de Marseille en a prononcé l'annulation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner la S.C.I. "Le Clos Boyer" et la ville de Gap à payer, respectivement, une somme globale de 10 000 F et une somme globale de 5 000 F à M. et Mme X... et aux autres demandeurs de première instance, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 22 mars 1994 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la SCI "Le Clos Boyer"devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejetée.
Article 3 : La SCI "Le Clos Boyer" paiera à M. et Mme X..., à M. et Mme Y..., à Mlles Marie-Thérèse et Marie-Christine Z..., à Mme A..., à M. et Mme B... et à M. C... une somme globale de 10 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991. La ville de Gap paiera à ces mêmes personnes et au même titre, une somme globale de 5 000 F.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Tayeb X..., à M. et Mme Jacques Y..., à Mlle Marie-Thérèse Z..., à Mlle Marie-Christine Z..., à Mme Gisèle A..., à M. et Mme Thierry B..., à M. Jean Claude C..., à la SCI "Le Clos Boyer", à la ville de Gap et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


Synthèse
Formation : 2 / 6 ssr
Numéro d'arrêt : 158821
Date de la décision : 05/05/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours en cassation

Analyses

- RJ1 PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTROLE DU JUGE DE CASSATION - REGULARITE INTERNE - DENATURATION - Cahier des charges et conditions d'une vente en l'état futur d'achèvement - Existence d'un titre habilitant le maître d'ouvrage à formuler une demande de permis de construire modificatif.

54-08-02-02-01-04, 68-03-04-04, 68-06-04 La cour s'est fondée sur les stipulations de l'article 2 du cahier des charges et conditions des ventes en l'état futur d'achèvement des biens et droits immobiliers dépendant d'un immeuble, selon lesquelles la SCI L. devait conserver, en dépit de la passation des actes de vente, la qualité de maître d'ouvrage, notamment dans les relations avec toutes les administrations afin de conduire l'opération de construction jusqu'à la délivrance du certificat de conformité, pour juger que, même en l'absence d'une délibération des copropriétaires, la SCI justifiait d'un titre l'habilitant, en application de l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme, à formuler une demande de permis modificatif (1). En statuant ainsi, alors que le permis modificatif avait pour objet la suppression d'un élément (emplacements pour le stationnement des véhicules) des parties communes prévu dans le règlement de copropriété et que l'article 2 du cahier des charges ne donnait clairement pouvoir à la SCI d'apporter à ce règlement des modifications qu'à la condition que celles-ci ne portent pas atteinte aux droits acquis par les copropriétaires, elle a dénaturé les stipulations du cahier des charges.

- RJ1 URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - REGIME D'UTILISATION DU PERMIS - PERMIS MODIFICATIF - Demande devant être formulée par une personne disposant d'un titre l'y habilitant (article R - 421-1 du code de l'urbanisme) - Cas de copropriété (1) - Vente en l'état futur d'achèvement - Stipulations du cahier des charges - Dénaturation.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - POUVOIRS DU JUGE - Cassation - Etendue du contrôle - Dénaturation - Cahier des charges et conditions d'une vente en l'état futur d'achèvement - Existence d'un titre habilitant le maître d'ouvrage à formuler une demande de permis de construire modificatif.


Références :

Arrêté du 23 mai 1984
Arrêté du 22 février 1989
Code de l'urbanisme R421-1
Loi 65-557 du 10 juillet 1965 art. 25
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75

1.

Cf. pour une demande de permis, 1989-01-20, Commune de Gennevilliers, T. p. 997 et 1992-04-06, SARL Espace 9, T. p. 1386


Publications
Proposition de citation : CE, 05 mai. 1999, n° 158821
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Groux
Rapporteur ?: M. Ribadeau Dumas
Rapporteur public ?: M. Honorat

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:158821.19990505
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