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19/05/1999 | FRANCE | N°200650

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 19 mai 1999, 200650


Vu 1°/, sous le n° 200650, la requête, enregistrée le 16 octobre 1998 au secrétariat du Conseil d'Etat, présentée par M. Avdhurrahman Y..., demeurant chez M. Y..., ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 septembre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 1998 du préfet de Seine-et-Marne ordonnant sa reconduite à la frontière ainsi que de la décision fixant implicitement la Serbie comme pays de destination ;
2°) d'

annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;
Vu 2°/, sous...

Vu 1°/, sous le n° 200650, la requête, enregistrée le 16 octobre 1998 au secrétariat du Conseil d'Etat, présentée par M. Avdhurrahman Y..., demeurant chez M. Y..., ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 septembre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 1998 du préfet de Seine-et-Marne ordonnant sa reconduite à la frontière ainsi que de la décision fixant implicitement la Serbie comme pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;
Vu 2°/, sous le n° 200669, la requête, enregistrée le 19 octobre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Sevdije X... épouse Y..., demeurant chez M. Y..., ... ; Mme Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 30 septembre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 septembre 1998 du préfet de Seine-et-Marne ordonnant sa reconduite à la frontière ainsi que de la décision fixant implicitement la Serbie comme pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté et cette décision ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Vestur, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Seban, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la régularité des jugements attaqués :
Considérant que si les observations en défense, présentées par le préfet, n'ont été communiquées à l'avocat des époux Y... qu'au début de l'audience qui s'est tenue pour l'examen de leurs seules requêtes, ce qui ne lui a pas permis de présenter utilement des observations en réplique, il ressort du jugement attaqué que le conseiller délégué par le président du tribunal administratif ne s'est pas fondé sur des éléments nouveaux qu'auraient contenus ces observations pour rejeter les demandes présentées par les époux Y... ; que ces derniers ne sont par suite pas fondés à soutenir que le jugement, faute d'avoir été rendu sur une procédure contradictoire, serait entaché d'irrégularité ;
Sur la légalité des arrêtés de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, le préfet peut : "décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de la notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme Y..., de nationalité serbe, entrés irrégulièrement en France le 25 octobre 1996, se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 22 juin 1998 de la décision du mêmejour du préfet de Seine-et-Marne leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et les invitant à quitter le territoire, suite au rejet de leur demande d'admission au statut de réfugié politique par décisions du 14 août 1997 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides confirmées le 25 mai 1998 par la commission des recours des réfugiés ; qu'ainsi, ils se trouvaient dans un des cas prévus par la disposition précitée où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger ;
Considérant que la circonstance que la notification des arrêtés attaqués comporte une mention erronée quant au délai du recours contentieux ouvert aux intéressés est sans influence sur la légalité desdits arrêtés ; que de même les mentions figurant dans les visas des arrêtés attaqués sont en tout état de cause sans influence sur leur légalité ;
Considérant que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des arrêtés manque en fait ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945, relatives à la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, et notamment des dispositions des articles 22 et 22 bis qui ouvrent un recours suspensif devant le juge administratif, organisent les garanties dont bénéficie l'étranger pour pouvoir exercer utilement ledit recours et fixent les délais dans lesquels ces recours doivent être présentés et jugés, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite et, par suite, exclure l'application des dispositions de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983 doit être écarté ;
Considérant que si, pour contester les arrêtés ordonnant leur reconduite à la frontière, les requérants invoquent l'illégalité des refus de titre de séjour qui leur ont été opposés, faute pour le préfet d'avoir préalablement consulté la commission du titre de séjour, compétente pour donner un avis en vertu de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 lorsque le préfet envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article 12 bis ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné à l'article 15 de ladite ordonnance, le préfet n'était en tout état de cause pas tenu de consulter cette commission pour refuser un titre de séjour aux époux Y... qui n'entrent dans aucune des catégories d'étrangers mentionnées aux articles 12 bis et 15 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant, par ailleurs, que si les requérants soutiennent que le préfet était tenu de leur accorder un titre de séjour en application de l'article 1er du décret n° 98-503 du 23 juin 1998 aux termes duquel "la demande d'asile territorial vaut titre de séjour", il ne ressort, en tout état de cause, pas des pièces des dossiers qu'ils aient sollicité le bénéfice de l'asile territorial ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les arrêtés ordonnant la reconduite à la frontière des époux Y... aient porté à leur droit au respect de leur vie familiale et privée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris ni que ces arrêtés procèdent d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle des intéressés, compte tenu notamment de la brièveté de leur séjour en France ;
Considérant que les arrêtés attaqués ne fixant pas le pays à destination duquelles intéressés doivent être reconduits, le moyen tiré de ce qu'ils encourent des risques sérieux en cas de retour en Serbie, ne peut être utilement invoqué ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à verser à M. Y... la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. Y... la somme qu'il demande au titre des dépenses exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes présentées par M. Y... et par Mme X... épouse Y... sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Avdhurrahman Y..., à Mme Sevdije X... épouse Y..., au préfet de Seine-et-Marne et au ministre de l'intérieur.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Décret 98-503 du 23 juin 1998 art. 1
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 22 bis, art. 12 quater, art. 15, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation: CE, 19 mai. 1999, n° 200650
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Vestur
Rapporteur public ?: M. Seban

Origine de la décision
Formation : 6 ss
Date de la décision : 19/05/1999
Date de l'import : 05/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 200650
Numéro NOR : CETATEXT000007957701 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1999-05-19;200650 ?
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