La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/05/1999 | FRANCE | N°201824

France | France, Conseil d'État, 3 ss, 26 mai 1999, 201824


Vu la requête enregistrée le 16 novembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 23 juillet 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 19 juin 1998 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Hafida X... ;
2°) de rejeter la demande de Mlle X... présentée devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la con

vention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamen...

Vu la requête enregistrée le 16 novembre 1998 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 23 juillet 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 19 juin 1998 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Hafida X... ;
2°) de rejeter la demande de Mlle X... présentée devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Derepas, Auditeur,
- les conclusions de M. Touvet, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, le représentant de l'Etat dans le département peut "décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ( ....) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de sa date de notification du refus ou du retrait ( ...)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité marocaine, s'est maintenue au-delà du délai d'un mois à compter de la notification le 1er décembre 1997 de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour sur le territoire national et entrait ainsi dans le champ d'application de cette disposition ;
Considérant que Mlle X... fait valoir qu'elle est entrée en France en 1989, qu'elle vit avec son père qui serait atteint d'une grave maladie et auquel elle apporterait un soutien exclusif et qu'elle souffre elle-même d'une maladie chronique pour laquelle elle reçoit des soins réguliers ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier et en particulier des documents médicaux produits que Mlle X... n'était pas en état de voyager ni que les soins qui lui sont nécessaires ne pouvaient être dispensés dans son pays d'origine ; que l'intéressée n'apporte pas, en tout état de cause, de justifications suffisantes à l'appui de ses allégations relatives à la situation de dépendance de son père à son égard et à l'état de santé de ce dernier ; que, par suite, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a estimé qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure attaquée sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que le moyen tiré de ce que l'auteur de la décision attaquée ne bénéficiait pas d'une délégation de signature régulière manque en fait ;
Considérant que l'arrêté du 19 juin 1998 attaqué, qui énonce les considérations de droit et de fait qui le justifient, est suffisamment motivé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou dela morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus Mlle X..., entrée en France en 1989 sous couvert d'un visa de tourisme de 45 jours, a notamment soutenu qu'elle vit en France avec son père qui serait dépendant d'elle ; que compte tenu des circonstances de l'espèce, notamment des conditions de son séjour en France et du fait que l'intéressée n'allègue pas ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite, l'arrêté par lequel le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a décidé sa reconduite à la frontière n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que le moyen tiré de ce que Mlle X... remplissait les conditions requises pour pouvoir bénéficier d'une mesure de régularisation en application de la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 juin 1997 est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 19 juin 1998 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Hafida X... et à en demander l'annulation ;
Article 1er : Le jugement susvisé du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris en date du 23 juillet 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mlle Hafida X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE, à Mlle Hafida X..., au président du tribunal administratif de Versailles et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3 ss
Numéro d'arrêt : 201824
Date de la décision : 26/05/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Circulaire du 24 juin 1997
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 1999, n° 201824
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Derepas
Rapporteur public ?: M. Touvet

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:201824.19990526
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award