Vu la requête, enregistrée le 21 janvier 1998, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE M6, ayant son siège au 16 cours Albert Ier à Paris (75008) ; la SOCIETE M6 demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 11 décembre 1997 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a retiré à l'émission "Graines de star" la qualité d'oeuvre audiovisuelle ;
2°) l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 31 mars 1998 par laquelle le Conseil supérieur de l'audiovisuel a confirmé la décision du 11 décembre 1997 ;
3°) la condamnation du Conseil supérieur de l'audiovisuel à lui payer 20 000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée relative à la liberté de communication ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 90-66 du 17 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Thiellay, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la SOCIETE M6,
- les conclusions de M. Salat-Baroux, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 du décret n° 90-66 du 17 janvier 1990 modifié : "Constituent des oeuvres audiovisuelles les émissions ne relevant pas d'un des genres suivants : oeuvres cinématographiques de longue durée ; journaux et émissions d'information ; variétés ; jeux ; émissions autres que de fiction majoritairement réalisées en plateau ; retransmissions sportives ; messages publicitaires ; télé-achat ; autopromotion ; services de télétexte" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l'audiovisuel a indiqué dans les décisions du 11 décembre 1997 et du 31 mars 1998 les éléments de fait et de droit qui le conduisaient à estimer que l'émission "Graines de star" n'avait pas la qualité d'oeuvre audiovisuelle, au sens des dispositions précitées du décret du 17 janvier 1990 ; qu'ainsi, la SOCIETE M6 n'est pas fondée à soutenir que ces décisions ne seraient pas suffisamment motivées ;
Considérant que des échanges de lettres ont eu lieu à propos de l'émission "Graines de star" entre la SOCIETE M6 et le Conseil supérieur de l'audiovisuel à la suite d'une première lettre du conseil du 25 septembre 1997 qui s'interrogeait sur la nature de l'émission ; qu'une réunion a été organisée le 18 septembre 1997 entre les services du conseil et la société requérante pour évoquer cette question ; qu'ainsi la SOCIETE M6 a été mise à même de connaître les interrogations du conseil à propos de la qualification donnée à l'émission et d'y répondre avant que celui-ci ne prenne sa décision ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'émission "Graines de star" met en scène des artistes débutants, parrainés par des vedettes confirmées ; que, d'abord réalisée en dehors de la présence du public, l'émission a ensuite été adaptée pour être enregistrée dans des conditions se rapprochant d'un spectacle vivant, dans une salle de spectacle et en présence de spectateurs qui avaient acquitté un droit d'entrée ; qu'en estimant que l'émission ne se rattachait pas moins à la catégorie des "variétés", et qu'en vertu de l'article 4 précité du décret du 17 janvier 1990, elle ne pouvait de ce fait être regardée comme une oeuvre audiovisuelle, le conseil ne s'est ni mépris sur la portée des critères définis par ce texte, ni livré à une appréciation erronée des caractéristiques de l'émission ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE M6 n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel du 11 décembre 1997 et 31 mars 1998 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIETE M6 la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner la SOCIETE M6 à payer au Conseil supérieur de l'audiovisuel la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE M6 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du Conseil supérieur de l'audiovisuel tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE M6, au Conseil supérieur de l'audiovisuel, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.