Vu la requête, enregistrée le 29 octobre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un jugement du 31 août 1998 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme Fatou X...
Y..., son arrêté du 22 juillet 1998 décidant la reconduite à la frontière de l'intéressée ;
2°) de rejeter la demande de Mme Maliki Y... devant le tribunal administratif ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Le Bihan-Graf, Auditeur,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Ne peuvent faire l'objet d'un arrêté d'expulsion, en application de l'article 23 : ( ...) 4° L'étranger marié depuis au moins un an avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; ( ...) Les étrangers mentionnés aux 1° à 6° ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article 22 de la présente ordonnance ( ...)" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 170 du code civil : "Le mariage contracté en pays étranger entre Français et entre Français et étranger sera valable s'il a été célébré dans les formes usitées dans le pays, pourvu qu'il ait été précédé de la publication prescrite par l'article 63 ( ...) et que le Français n'ait point contrevenu aux dispositions contenues au chapitre précédent" ; qu'aux termes de l'article 47 du même code : "Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers, fait en pays étranger, fera foi, s'il a été rédigé dans les formes usitées dans ledit pays" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Maliki Y..., de nationalité camerounaise, a épousé au Cameroun, le 1er mai 1996, M. Maliki Y..., de nationalité française ; qu'un acte de mariage a été dressé par l'officier d'état civil camerounais qui célébrait le mariage ; que le PREFET DE POLICE n'allègue pas que ce mariage aurait été contracté dans des conditions non conformes à celles que prévoit l'article 170 précité du code civil ; que la circonstance que l'acte de mariage n'a pas été transcrit sur les registres de l'état-civil français est sans incidence sur sa validité, en l'absence de toute disposition législative ou réglementaire imposant une telle condition, le PREFET DE POLICE ne pouvant utilement invoquer à cet égard les dispositions de l'article 48 du code civil qui n'ont ni pour objet ni pour effet d'instaurer cette condition ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la communauté de vie entre Mme Fatou X...
Y... et son époux aurait cessé ni que celui-ci n'aurait pas conservé la nationalité française ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions précitées du 4° de l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, faisaient obstacle à la reconduite à la frontière de Mme Fatou X...
Y... ; que, par suite, le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 juillet 1998 décidant la reconduite à la frontière de Mme Fatou X...
Y... ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à Mme Fatou X...
Y... et au ministre de l'intérieur.