Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 janvier et 21 mai 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la S.A. "FINANCIERE BAYARD", dont le siège est ... ; la S.A. "FINANCIERE BAYARD" demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 novembre 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 9 mars 1989, rejetant sa demande en décharge des compléments de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre des années 1980 et 1981 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la S.A. "FINANCIERE BAYARD",
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Paris que les compléments de taxe sur les salaires auxquels la S.A. "FINANCIERE BAYARD" a, comme venant aux droits de la société Unipol, été assujettie au titre de chacune des années 1980 et 1981, ont été établis à l'issue d'une procédure de redressement contradictoire qui a comporté, le 13 octobre 1983, une première notification de redressements, commune aux deux années, les 11 mai 1984 et 18 juillet 1984, deux notifications rectificatives, propres à chacune de ces années, ainsi que des réponses aux observations formulées par la société sur chacune de ces notifications, les 10 janvier 1984, 20 juin 1984 et 10 décembre 1985 ; que la S.A. "FINANCIERE BAYARD" a, devant la cour administrative d'appel, contesté la régularité de la procédure d'imposition en soutenant que les notifications rectificatives des 11 mai et 18 juillet 1984, ainsi que la réponse du 20 juin 1984, à ses observations sur la première de ces notifications, n'auraient pas été suffisamment motivées au regard des prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'en écartant le moyen ainsi soulevé, au motif que l'ensemble des notifications et réponses reçues par la société satisfaisait aux exigences de motivation formulées par cet article, la cour administrative d'appel a, contrairement à ce que soutient la S.A. "FINANCIERE BAYARD", apprécié la régularité de chacun de ces actes au regard de son contenu propre ; qu'en observant, surabondamment, que la société avait, d'ailleurs, pu engager, à la suite de chacun d'entre eux, un débat utile avec l'administration, la Cour n'a pas entendu juger que cette circonstance était de nature à rendre sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition une éventuelle insuffisance de motivation de l'un ou de l'autre de ces actes ; qu'enfin, en estimant que les notifications rectificatives des 11 mai et 18 juillet 1984, qui faisaient suite à la notification du 13 octobre 1983, avaient été suffisamment motivées, la cour administrative d'appel a porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis, sans les dénaturer, une appréciation souveraine qui ne peut être discutée devant le juge de cassation ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts : "Les sommes payées à titre de traitements, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature, sont soumises à une taxe sur les salaires ... à la charge des personnes ou organismes ... qui paient des traitements, salaires, indemnités et émoluments lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ..." ; que, lorsque les activités d'une entreprise sont, pour l'exercice de ses droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, réparties en plusieurs "secteurs" distincts, au sens de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, les dispositions précitées de l'article 231 de ce code doivent recevoir application à l'intérieur de chacun de ces "secteurs", en sorte que l'assiette de la taxe sur les salaires soit, pourchacun d'eux, déterminée en appliquant au montant des rémunérations versées au personnel qui lui est spécialement affecté, le rapport qui lui est propre entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ; que la taxe sur les salaires afférente aux rémunérations des personnels qui ne seraient pas exclusivement affectés à l'un des "secteurs" ne peut, toutefois, qu'être établie en appliquant à ces rémunérations le rapport existant, pour l'entreprise dans son ensemble, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total ;
Considérant que la S.A. "FINANCIERE BAYARD" a contesté, devant la cour administrative d'appel, le bien-fondé des compléments de taxe sur les salaires mis à sa charge au titre des années 1980 et 1981, du chef de la société Unipol qu'elle a absorbée, et dont les activités étaient, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, réparties entre plusieurs "secteurs", en soutenant que les rémunérations versées par celle-ci à des salariés concurremment employés dans cette pluralité de "secteurs" devaient être fractionnées, suivant un procédé de comptabilité analytique visant à la détermination d'assiettes "sectorielles" de la taxe sur les salaires ; que, bien que, pour écarter cette prétention, elle se soit à tort appuyée, ainsi que le relève la S.A. "FINANCIERE BAYARD", sur les dispositions, relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, du second alinéa de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la cour administrative d'appel, en jugeant que l'administration avait à bon droit, tout en ne remettant pas en cause, au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, la répartition des activités d'Unipol en plusieurs "secteurs", déterminé l'assiette de la taxe sur les salaires en appliquant aux rémunérations de leur personnel commun le rapport défini par le 1 de l'article 231 du code général des impôts, tel qu'il s'établissait pour l'entreprise dans son ensemble, a fait de ce texte une exacte application ; que la S.A. "FINANCIERE BAYARD" n'est, par suite, pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Article 1er : La requête de la S.A. "FINANCIERE BAYARD" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la S.A. "FINANCIERE BAYARD" et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.