Vu la requête enregistrée le 20 novembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE ; le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 21 octobre 1998 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a annulé :
1°) son arrêté du 12 octobre 1998 décidant la reconduite à la frontière de M. X... Imtiaz ;
2°) sa décision du 12 octobre 1998 fixant le pays de renvoi ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Desrameaux, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que pour annuler les arrêtés du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE du 12 octobre 1998 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Y... et fixant le pays de destination, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans s'est fondé sur des pièces produites lors de l'audience par M. Y... et rédigées en langue portugaise ; que si ces pièces qui étaient présentées par M. Y... à l'appui d'allégations nouvelles ont été montrées au représentant du préfet celui-ci, qui n'avait pas de connaissance de la langue portugaise, n'a été d'aucune façon mis en mesure d'en apprécier la portée ; qu'ainsi le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE est fondé à soutenir que le principe du contradictoire a été méconnu et à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif d'Orléans ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté décidant la reconduite à la frontière de M. Y... :
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "situation personnelle et familiale" est délivrée de plein droit :
... 4°) à l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière ..." ;
Considérant que M. Y..., ressortissant pakistanais, était entré en France une première fois en juillet 1995 sous couvert d'un visa de quinze jours ; que, toutefois, d'une part, il ressort des déclarations faites à l'office français de protection des réfugiés et apatrides par M. Y... que celui-ci résidait à nouveau au Pakistan en août 1995 et qu'il est ensuite entré en France le 12 janvier 1996 et que d'autre part, il n'est pas contesté que cette dernière entrée en France était irrégulière ; qu'enfin, M. Y... n'est pas entré régulièrement en France en juin 1997 en provenance du Portugal dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que les autorités portugaises lui ont refusé la délivrance d'une autorisation de séjour le 10 décembre 1996 ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision du 29 mai 1998 par laquelle le PREFET D'INDRE-ET-LOIRE a confirmé sa décision du 13 mai 1998 par laquelle il avait refusé de lui délivrer un titre de séjour au motif qu'il était entré irrégulièrement en France ;
Considérant que si M. Y... qui s'est marié avec une personne de nationalité française le 14 février 1998 et déclare disposer d'un travail et subvenir aux besoins de sa femme et des deux enfants de cette dernière, il résulte des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. Y... en France, aux effets d'un arrêté de reconduite à la frontière et à la brève durée du mariage, l'arrêté du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE du 12 octobre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteintedisproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant que si M. Y... soutient qu'il courrait des risques sérieux en cas de retour dans son pays d'origine eu égard à ces croyances religieuses, il n'apporte à l'appui de ces allégations aucune précision ni justification de nature à établir la réalité de ces risques ; qu'ainsi, ses conclusions contre la décision ordonnant sa reconduite à destination de son pays d'origine ne sauraient être accueillies ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du PREFET D'INDRE-ET-LOIRE en date du 12 octobre 1998 ordonnant sa reconduite à la frontière et la décision prise le même jour fixant le pays de destination ;
Article 1er : Le jugement en date du 21 octobre 1998 du tribunal administratif d'Orléans est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif d'Orléans est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET D'INDRE-ET-LOIRE, à M. X... Imtiaz et au ministre de l'intérieur.