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27/10/1999 | FRANCE | N°157647

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 27 octobre 1999, 157647


Vu la requête, enregistrée le 8 avril 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Pierre X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 10 février 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1992 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande en décharge de la taxe d'habitation à laquelle il a été assujetti au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;
2°) prononce la décharge de ladite taxe ;
Vu les autres pièces du doss

ier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administr...

Vu la requête, enregistrée le 8 avril 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Pierre X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt du 10 février 1994 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1992 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande en décharge de la taxe d'habitation à laquelle il a été assujetti au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;
2°) prononce la décharge de ladite taxe ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Guilhemsans, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Ricard, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I. de l'article 1414 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : "I. Sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation afférente à leur habitation principale lorsqu'ils occupent cette habitation dans les conditions prévues à l'article 1390 : ... 3° les contribuables atteints d'une infirmité ou d'une invalidité les empêchant de subvenir par leur travail aux nécessités de l'existence lorsqu'ils ne sont pas passibles de l'impôt sur le revenu en raison des revenus de l'année précédente" ; que ces dispositions subordonnent ainsi l'exemption de la taxe d'habitation afférente à l'habitation principale à ce que les intéressés ne soient pas imposables à l'impôt sur le revenu ;
Considérant qu'aux termes de l'article 81 du code général des impôts : "Sont affranchis de l'impôt : ...8°) les indemnités temporaires, prestations et rentes viagères servies aux victimes d'accidents du travail ou à leurs ayants-droit" ; que le champ d'application de cette disposition, issue de la loi du 27 décembre 1927, s'étend aux indemnités temporaires, prestations et rentes viagères qui ont pour seul objet la couverture des conséquences dommageables d'un accident du travail ou d'un accident de service, d'une maladie professionnelle ou d'une maladie contractée en service, et qui sont allouées au titre des régimes obligatoires de sécurité sociale ; que lorsque la victime de l'accident, compte tenu notamment du lieu où elle exerce son activité professionnelle, n'entre pas dans le champ d'un régime obligatoire de sécurité sociale couvrant le risque d'accident du travail, l'indemnité ou la rente qui lui est versée en exécution d'une assurance souscrite volontairement auprès d'une caisse de sécurité sociale ou d'une compagnie d'assurance est également exonérée de l'impôt sur le revenu dans la limite des prestations servies, à rémunération et taux d'incapacité identiques, par les régimes obligatoires de sécurité sociale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Lyon a fait une fausse application des dispositions précitées en jugeant que la rente qui, à la suite d'un accident du travail survenu le 21 juin 1978 au Gabon, a été servie à M. X... en exécution d'un contrat d'assurance de groupe souscrit par son employeur était, nonobstant la circonstance que l'intéressé ne pouvait pas être affilié à un régime obligatoire de sécurité sociale, exclue, pour l'intégralité de son montant, du bénéfice de l'exonération prévue par le 8°) de l'article 81 du code général des impôts ; que son arrêt doit, par suite, être annulé ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant que M. X..., salarié expatrié, ne pouvait, de ce fait, être affilié à un régime obligatoire de sécurité sociale ; qu'il résulte de l'instruction que l'entreprise qui employait M. X... a souscrit auprès d'une compagnie d'assurance, au profit de ses salariés expatriés, un contrat de groupe couvrant les risques d'accident du travail et de maladie professionnelle et prévoyant, notamment, en cas d'incapacité permanente de travail, évaluée d'après les critères de la sécurité sociale française, le paiement d'une rente viagère ; qu'en exécution de ce contrat, M. X..., qui souffre d'une incapacité professionnellepermanente de 100 % consécutive à l'accident du travail dont il a été victime en 1978, a perçu, à compter du 1er janvier 1981, une rente égale à 85 % de sa rémunération et revalorisée selon les coefficients applicables aux pensions servies par la sécurité sociale française, dont le montant s'élevait pour l'année 1984, compte tenu des revalorisations opérées, à 181 501 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la rente perçue par M. X... en 1985, 1986 et 1987 devait être exonérée de l'impôt sur le revenu dans la limite du montant de la prestation qui aurait été servie, compte tenu de son taux d'incapacité permanente et de sa rémunération, à un affilié du régime général de la sécurité sociale ; que, par suite, et compte tenu de ses autres revenus, M. X... n'était pas redevable de l'impôt sur le revenu au titre des années 1985, 1986 et 1987 ; qu'il n'est pas contesté qu'il occupait son habitation dans les conditions prévues à l'article 1390 du code général des impôts ; qu'il était, par suite, en droit de prétendre, compte tenu de son invalidité, au dégrèvement d'office de la taxe d'habitation des années 1986, 1987 et 1988 ; que M. X... est ainsi fondé à demander aussi bien l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande que la décharge de la taxe d'habitation à laquelle il a été assujetti au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 10 février 1994 et le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 30 avril 1992 sont annulés.
Article 2 : M. X... est déchargé de la taxe d'habitation à laquelle il a été assujetti au titre des années 1986, 1987 et 1988 dans les rôles de la ville de Nice.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 157647
Date de la décision : 27/10/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-03-031 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE D'HABITATION.


Références :

CGI 1414, 81, 1390
Loi du 27 décembre 1927
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11


Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 1999, n° 157647
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Guilhemsans
Rapporteur public ?: M. Goulard

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1999:157647.19991027
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