Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février 1997 et 11 juin 1997 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Zoubir Y..., demeurant ... ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 5 décembre 1996 rapportant le décret du 5 mai 1994 en tant qu'il prononce sa naturalisation ;
2°) la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 12 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Bordry, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de M. Y...,
- les conclusions de M. Martin Laprade, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du code civil : "Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation." et qu'aux termes de l'article 27-2 du même code :" Les décrets portant naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai d'un an à compter de leur publication au Journal Officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales. Si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... a déclaré lors du dépôt de sa demande de naturalisation le 20 août 1992 qu'il était célibataire et n'a pas indiqué qu'il était marié depuis le 6 mai 1992 avec Mlle X... ressortissante algérienne demeurant en Algérie ; que dès lors, le décret du 5 mai 1994 qui prononçait sa naturalisation doit être regardé comme ayant été obtenu par fraude ; que le délai de deux ans imparti au gouvernement pour prononcer le retrait de la naturalisation de M. Y... a commencé à courir à la date à laquelle l'existence du mariage de l'intéressé a été portée à la connaissance du ministre chargé des naturalisations, par le ministre des affaires étrangères, soit le 6 décembre 1994, nonobstant la circonstance que ce dernier aurait été informé de ce mariage dès janvier 1994 ; que par suite, M. Y... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 5 décembre 1996, qui a été signé dans le délai de deux ans prévu par l'article 27-2 du code civil, et a été précédé d'une procédure contradictoire, au cours de laquelle il a d'ailleurs produit un mémoire en défense ;
Sur les conclusions de M. Y... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante, dans la présente instance, soit condamné à payer à M. Y... la somme qu'il demande au titre des frais irrépétibles ;
Article 1er : La requête de M. Y... est rejetée .
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Zoubir Y... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.